30 septembre 2017

[akacatholic.com] Scoop: Le Cardinal Burke s'en prend à la FSSPX

SOURCE - akacatholic.com - traduction depuis l'anglais - 30 septembre 2017

[propos tenus le 15 juillet 2017]

MODÉRATEUR: Est-il toujours licite d'assister et de recevoir la Communion lors d'une liturgie de la FSSPX? S'il n'y a pas d'autres messes respectueuse, à distance raisonnable. Cela peut-il remplir l'obligation du dimanche?

(L'archevêque Sample, qui était également sur le panneau, renvoie vers le Cardinal Burke.)

CARDINAL BURKE: Malgré les divers arguments entourant la question, le fait est que la société sacerdotale de saint Pie X est en schisme depuis que l'archevêque Marcel Lefebvre a ordonné quatre évêques sans mandat du pontife romain. Et donc, il n'est pas légitime d'assister à la messe ni de recevoir les sacrements dans une église sous la direction de la Société sacerdotale de saint Pie X.

Cela dit, la de confusion générale de l'Église concerne aussi cette question, parce que le Saint-Père a donné aux prêtres de la Société sacerdotale de saint Pie X des facultés pour célébrer valablement les mariages, de manière licite et valable. Mais il n'y a pas d'explication canonique à cela, et c'est simplement une anomalie.

Et, aussi, le pape Benoît XVI, avant son abdication, a levé l'excommunication des quatre évêques qui ont été ordonnés sans le mandat pontifical, mais l'exigence pour la levée d'une excommunication est que la personne quitte sa désobéissance, et désire maintenant être pleinement conciliée avec l'Église, mais en fait, cela n'a pas eu lieu, et c'est une autre situation anormale

Ils ne sont plus excommuniés, mais ils ne son pas en communion régulière avec l'Église catholique.

Et donc, tout cela est très compliqué, mais je vous dirais que je ne pense pas que ce soit un bon signe de recevoir des sacrements de la Société sacerdotale de Saint-Pie X parce que cela ne les aide pas ; avant tout, les sacrements ne sont pas célébrés licitement. Ils sont valables, il n'y a pas de question à ce sujet si les prêtres sont ordonnée valablement, mais ce n'est pas un, c'est un contresigne de la communion de l'Eglise. Au lieu de cela, nous devrions encourager les membres de la Société sacerdotale de saint Pie X à se réconcilier avec l'Église

En fait, je pense que le Père Saguto pourrait confirmer cela, je sais que c'était à la fois à où il y avait des apostolats de l'Institut du Christ Roi Souverain Prêtre aussi bien à Lacrosse qu’à Saint-Louis pour ceux qui désirent les rites de l'Église selon l'usage ancien, beaucoup de gens qui fréquentaient la Fraternité Sacerdotale de Saint Pie X ont été réconciliés et sont retournés à l'église.

Et je dis que si, au lieu de cela, nous allons librement à ces messes [de la FSSPX] et ainsi de suite qui sont célébrées, quel encouragement leur donne-t-il pour se réconcilier avec l'Église?

29 septembre 2017

[FSSXP Actualités] Prise d'habit à Flavigny

SOURCE - FSSXP Actualités - 29 septembre 2017

Ce 28 septembre à Flavigny, l’abbé Patrick Troadec, directeur du Séminaire Saint-Curé d’Ars, a remis la soutane à deux postulants qui ont prononcé ensuite, avec un troisième frère, leur oblation dans la Fraternité Saint-Pie X qui marque le début du noviciat des frères. Parmi ces trois novices, on compte deux Français et un Italien. Quatre nouveaux postulants, tous Français, ont rejoint le séminaire et commencent aujourd'hui leur formation.

[FSSXP Actualités] Réforme de la Curie: «le parcours est accompli aux trois-quarts

SOURCE - FSSPX Actualités - 29 septembre 2017

La vingt-et-unième réunion du Conseil des cardinaux - ou C9 - s’est ouverte le lundi 11 septembre 2017 pour s’achever le 13. Institué par le pape François le 28 septembre 2013, le C9 a pour mission de mettre en œuvre un projet de réforme de la Constitution apostolique « Pastor Bonus » concernant l'organisation de la Curie romaine.

Mgr Marcello Semeraro, évêque d’Albano (Italie), est le secrétaire du Conseil des cardinaux. Au micro de Radio Vatican, le prélat a déclaré que « les trois quarts du chemin ont déjà été accomplis », ajoutant que, selon lui, « d’ici quelques mois cette révision sera plus ou moins complète, et ensuite le pape aura à sa disposition les propositions qui concernent tous les dicastères, et ce sera à lui de décider comment et quand les mettre en œuvre ».

Il est intéressant de noter que la réforme de la Curie ne semble pas être un projet émanant premièrement de la volonté du Saint-Père. En effet, selon ce que Mgr Semeraro a déclaré au journaliste Alessandro Gisotti, « si le Pape a lancé ce travail de réforme de la Curie, il l’a fait conformément aux suggestions qui ont émergé principalement lors des réunions précédant le conclave. » Ce qui laisse clairement entendre que les congrégations des cardinaux tenues durant le dernier conclave avaient dressé une sorte de « feuille de route » du futur pontificat.

Le conseil des cardinaux, souligne encore Mgr Semeraro, est « un organisme qui se situe au sein de la collégialité épiscopale ». Ainsi donc, la réforme curiale s’inscrit dans la dynamique de décentralisation et d'exercice solidaire de l'autorité, telle qu'elle a été lancée lors du concile Vatican II. Quand on constate les effets dévastateurs qu’a provoqués la collégialité dans les Eglises locales, on ne peut que redouter de voir à travers la réforme curiale un affaiblissement de l’autorité romaine, aux dépens de la foi et de la morale. Et malheureusement le souverain pontife actuel abonde en ce sens.

Un accent particulier de la prochaine réforme de la Curie devrait être mis sur la communication : le tout nouveau « Secrétariat pour la Communication a aussi une énorme responsabilité administrative par sa dimension », confie l’évêque d’Albano avant d’ajouter que, « en raison de l’importance du thème de la communication, c’est un dicastère central dans le projet de réforme de la Curie. »

Pour avoir une vue plus précise du déroulement de cette vingt-et-unième réunion, Greg Burke, le directeur de la salle de presse du Saint-Siège, a déclaré que le travail du C9 avait été marqué, selon ses propres termes, par « une pause réflexive » dans le processus de réforme de la Curie.

Il aura été surtout question d’une « réflexion sur les textes du pape » relatifs au thème de la réforme, notamment le discours à la Curie de décembre 2016, les discours aux consistoires de novembre 2016 et de juin 2017 ainsi que celui que François a donné pour les 50 ans du Synode des évêques, le 17 octobre 2015.

Sur la base de ces textes, les cardinaux ont donc travaillé sur « la Curie comme instrument d’évangélisation et de service pour le pape et les Eglises locales, la décentralisation, le rôle des nonciatures apostoliques, la sélection et la compétence du personnel, moins clérical et plus international, avec une augmentation du nombre de jeunes et de femmes », précise encore le communiqué de la salle de presse du Saint-Siège.

Bien entendu, le tout récent document pontifical Magnum principium sur le pouvoir renforcé des Conférences épiscopales nationales relativement aux traductions liturgiques a été évoqué, et Nicolas Senèze, dans le quotidien La Croix, précise que le C9 a d’ores et déjà pensé aux « conséquences » de ce document « sur les compétences de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements ». Le cardinal Robert Sarah, préfet de ce dicastère, qui n’est pas membre du C9, doit s’attendre à voir dans un avenir proche son domaine de compétences se réduire telle une peau de chagrin.

La prochaine réunion du C9 est prévue pour le mois de décembre. Elle devra elle aussi être lue à la lumière du programme que le pape François a fait sien depuis son élection, et qu’il a explicité dans le discours à la Curie du 22 décembre 2016 : « réformer ce qui a été déformé, conformer ce qui a été réformé, confirmer ce qui a été conformé, transformer ce qui a été confirmé ». Au risque d’une dilution supplémentaire du pouvoir magistériel dans l’Eglise ? L’avenir le dira.

[Anne Le Pape - Présent] Colloque Summorum Pontificum – “Cette source d’eau vive que constitue la liturgie”

SOURCE - Anne Le Pape - Présent - 29 septembre 2017

Comment ne pas commencer un colloque remerciant de la remise à l’honneur de la messe de rite tridentin par une célébration de cette messe ? C’est ainsi que le 14 septembre, dans la chapelle de l’Angelicum – l’université pontificale Saint-Thomas-d’Aquin, dirigée par les Dominicains – le père Nuara offrit aux participants arrivés dès 8 heures la possibilité d’assister à cette cérémonie.

Puis le père accueillit les participants dans le grand amphithéâtre de l’université. Prélats (le cardinal Sarah, le cardinal Burke, le cardinal Muller, Mgr Pozzo, Mgr Wach, Dom Pateau, le père de Blignières entre autres) présidaient en quelque sorte l’assemblée, placés au premier rang. Des religieuses, des prêtres parsemaient le public des laïcs, fervents et studieux, venus manifestement à Rome pour marquer de cette façon leur reconnaissance pour le pape émérite.

Le père Nuara souligna combien les catholiques avaient attendu cette décision prise par Benoît XVI, qui les avait enfin entendus. Il dit aussi le « succès » de ce rite près des jeunes catholiques ou l’attirance qu’il exerce près des futurs convertis, un trait que rappelèrent plusieurs des intervenants.
Bilan
Il revint à Mgr Pozzo de faire le bilan de ces dix années, bilan en demi-teintes. Car il rappela les chiffres : si le nombre des célébrations dans le « rite extraordinaire » a augmenté, elles n’ont pas vraiment « bondi » : en France, il y a dix ans, nous avions 104 célébrations le dimanche. Nous en trouvons aujourd’hui 224, donc plus du double, sans oublier que, si nous comptons celles de la Fraternité Saint-Pie X, cela nous en donne 430. En Allemagne, nous sommes passés de 35 à 54, en Angleterre de 18 à 40, en Pologne de 5 à 40… Mgr Pozzo précisa qu’en Extrême-Orient et en Europe orientale, le « rite ancien » suscitait un grand intérêt. Il n’esquiva pas les problèmes pratiques : le faible nombre de prêtres pouvant célébrer, la méfiance de certains évêques, le manque de formation dans les séminaires. Il conclut en affirmant que cette liturgie ne constituait en rien une gêne ou une menace contre l’unité de l’Eglise mais qu’au contraire, elle était un don qui servait à l’unification du corps du Christ.

Le cardinal Muller traita brillamment le sujet « dogme et liturgie », insistant sur l’idée centrale de sacrifice, évacuée par Luther. La liturgie ne peut être reconstruite artificiellement à partir d’écrits paléochrétiens, comme on a tenté de le faire au XIXe siècle. Elle est constituée de divers éléments, dont l’héritage des Apôtres, les saintes écritures et la tradition. Il insista aussi sur les dangers des traductions en langue vernaculaire (n’oublions pas l’expression italienne : traduttore, traditore, ou « traduire, c’est trahir »).

Dom Pateau, père abbé de Fontgombault, donna un témoignage sur l’expérience faire par le monastère de la liturgie nouvelle, sur ordre de l’évêque du lieu, dès 1974. Dom Roy, alors père abbé, obtempéra, malgré les réticences qu’il ressentait. Il mourut « dans ce climat liturgique pesant » à Rome, en 1977. Dès 1985, les moines reprirent le rite traditionnel sous certaines conditions, tout en conservant le nouveau calendrier et en adoptant de nouvelles préfaces.

A Fontgombault passent de nombreux prêtres désirant découvrir la messe de toujours. Soit ils la célèbrent ensuite régulièrement, soit exceptionnellement, mais quoi qu’il en soit sa connaissance nourrit leur recueillement. Pour Dom Pateau, le retour au missel de 1962 offre un chemin de l’âme vers Dieu, un cœur à cœur avec l’éternité. Le fait de répéter certaines formules ou certains rites permet de « réveiller » la pesanteur humaine, la place du corps (agenouillements, signes de croix), dont on parle tant de nos jours, n’est pas oubliée.

Martin Mosebach, célèbre romancier et essayiste allemand, dut conclure les travaux de cette matinée. Il le fit avec brio, nourrissant son propos d’exemples précis (répétitions des invocations du Kyrie, de l’Agnus Dei), ayant à traiter le thème de « La sainte routine ou le mystère de la répétition ». Il montra que les formes du rite ancien n’étaient pas choisies au hasard, mais que ses éléments répondaient à des principes stylistiques précis. « Expérimenter dans l’habitude la joie de se sentir chez soi » : voilà ce que l’homme peut gagner s’il s’abandonne au rite.
Rien de trop beau
Le cardinal Sarah offrit une réflexion profonde et émouvante sur la liturgie et le silence, un de ses sujets de prédilection. Pourquoi la vitalité missionnaire de l’Eglise diminue-t-elle, pourquoi le témoignage des chrétiens s’affaiblit-il ? « Peut-être parce que nous n’approchons pas comme il le faudrait de cette source d’eau vive que constitue la liturgie », pour laquelle rien n’est assez beau, musique, ornements, tout devant concourir à élever les esprits vers Dieu. Le cardinal assura les fidèles de l’usus antiquus qu’ils étaient bien catholiques et pas des « fidèles de seconde classe », mais qu’ils perpétuaient un culte et des pratiques qui avaient été celles d’innombrables saints.

Le défi, pour les deux derniers intervenants, était d’empêcher les auditeurs de sommeiller dans la chaleur devenue étouffante de la salle. Ils le relevèrent fort bien. Mgr Graulich donna avec pertinence et humour une lecture canonique du motu proprio, remarquant que cette loi était celle qui avait suscité le plus de commentaires dans toute l’histoire de l’Eglise. La possibilité de célébrer dans les deux rites enfin reconnue devenait donc loi universelle de l’Eglise. Il analysa ses termes (« groupe stable », le curé « accueillera »), et demanda que cette messe joue son rôle dans les séminaires et même dans la formation des évêques.

Le professeur Tedeschi, quant à lui, représentait pour finir « l’usager ». Il démontra que la misère morale, contrairement à l’idée reçue, est bien à l’origine de la misère matérielle et non sa conséquence, et que la première cause en est… l’état de la liturgie. Comment donner un sens à l’économie ? Comment nourrir l’homme ? Par les sacrements. Quel est donc le premier des sacrements ? La sainte messe, qui nous transforme. La meilleure façon de le constater est d’expérimenter des célébrations dont on sort plus riches et plus forts… et les autres. Si la liturgie est corrompue, elle ne nourrit plus les hommes et les rend indifférents.

Tous les intervenants, à un moment ou à un autre de leur propos, saluèrent l’acte clairvoyant et prophétique accompli par Benoît XVI par ce motu proprio, apportant une nouvelle jeunesse à l’Eglise car animé par celui qui est ressuscité et reste avec nous jusqu’à la fin des temps.

Anne Le Pape

28 septembre 2017

[Paix Liturgique] Il y a 50 ans naissait le MJCF

SOURCE - Paix Liturgique - Lettre n°614 - 28 septembre 2017

Il y a 50 ans, le 29 septembre 1967, en la fête de saint Michel Archange, naissait le Mouvement de la Jeunesse Catholique de France, le MJCF. Louis Renaudin a demandé à Christian Marquant, fondateur du mouvement et par la suite fondateur d’Oremus-Paix Liturgique, d’évoquer pour nous cette origine.
Louis Renaudin – C’est donc le 29 septembre 1967 qu’est né le MJCF ?
Christian Marquant – Oui, à cette date précise : ce jour-là, les jeunes que nous étions se sont retrouvés humainement seuls, totalement seuls, sans plus aucune aide sacerdotale et ecclésiale, et ils ont décidé de lancer un premier camp d’hiver à Flumet, en Savoie. Ils n’en étaient pas conscients alors, mais ils ont ce jour-là franchi leur Rubicon : le MJCF était né.
LR – Mais j’ai lu ailleurs que le mouvement avait été créé en 1970 ?
CM – Il est exact que l’association MJCF a été créée le 7 juin 1970… le jour ou le plus âgé d’entre atteignit ses 21 ans, c’est-à-dire l’âge légal à l'époque pour créer une association loi 1901, ouvrir un compte bancaire et louer un local, etc. Mais le mouvement existait déjà : ce ne fut qu’une régularisation.
LR – Mais que s’était-il produit ce 29 septembre 1967 pour que vous vous retrouviez « humainement seuls » ?
CM – Sans trop entrer dans les détails, nous avions été jusqu’alors rattachés de près ou de loin aux Scouts de France, où nous avions, pour la plupart d’entre nous, fait nos premières armes de jeunes catholiques. Or, les Scouts et les Guides de France, dans les années de l’après-Concile, étaient en plein aggiornamento, c’est-à-dire en pleine révolution. C’est dans ce contexte que plusieurs d’entre nous avaient quitté leur troupe scoute, devenue un groupe de Pionniers en chemises rouges et aux idéaux à l’avenant, bien étrangers à ceux auxquels nous avions adhérés et pour lesquels nous nous étions engagés, pour rejoindre ce qui était encore, du moins officiellement, le groupe des Routiers du XIVème arrondissement de Paris (la Route est un prolongement du scoutisme pour les grands adolescents). 
    
Ce groupe de Routiers avait pour nom « Nouvelle Frontière » et était lui aussi en pleine ébullition. De 1965 à 1967, nous nous y sommes formés « sur le tas », jusqu’à ce que, durant l’été 1967, « Nouvelle frontière » ne décide de se séculariser en abandonnant à la fois les Scouts de France et leur estampille catholique. Nous avions alors le choix entre la disparition ou la poursuite solitaire et autonome de nos activités. Nous avons opté pour la deuxième branche de l’alternative, et nous avons concrétisé notre décision, le 29 septembre, en lançant le premier camp de Flumet, ce dont Paul, Claude, Jean-François, Michelle et quelques autres se souviennent certainement encore.
LR – Parlez-nous du commencement de votre aventure.
CM – Nous avions expérimenté empiriquement au cours des deux années de Route 1965/1967 un type de rayonnement chrétien nouveau pour nous, celui d’aller au-devant des jeunes, d’abord ceux de notre « terroir », le XIVème arrondissement de Paris, puis peu à peu des jeunes de l’ensemble de la région parisienne. Nous avions alors pu constater que ces contacts produisaient de beaux fruits auprès de jeunes un peu perdus dans un monde déjà sans repères. Pour nous, cela se faisait clairement dans un cadre catholique : nous avions des aumôniers, nous bénéficiions d’un peu de vie spirituelle et doctrinale. 
    
Mais cette action était aussi stimulante pour nos jeunes âmes brutes que difficile à mener en raison des terribles turbulences du temps – turbulences qui dans l’Église, il faut le souligner, ont suivi le Concile et précédé mai 68 – et qui faisaient que ceux qui devaient être nos guides n’étaient désormais plus sûr de rien ni surtout d’eux-mêmes. Je me souviens, par exemple, de mon ancien aumônier scout, jusqu’alors exemplairement catholique, qui, devenu comme fou, abandonna en moins de deux ans tout ce qu’il nous avait enseigné depuis notre adolescence. Le malheureux termina sa vie comme clochard ! Mais du mal peut naître un plus grand bien : ces abandons sacerdotaux nous déterminèrent à approfondir nos convictions et à résister à l’idéologie nouvelle devenue dominante.
LR – Quelle fut votre spécificité au cours de ces premières années ?
CM – Si j’osais, je dirais qu’elle était que nous étions les premiers, à une époque où il n’y avait aucun des mouvements, œuvres, organisations que nous connaissons aujourd’hui, à agir dans le domaine spécifiquement religieux. Bien que nous ayons quitté un mouvement officiellement catholique, notre démarche se déclara d’emblée tout à fait catholique et résolument missionnaire. 
    
Nous avions le désir d’entraîner les jeunes qui nous entouraient dans l’univers du Christ, selon les croyances et les pratiques que nous avions toujours connues et respectées. Dès cette époque, notre enthousiasme missionnaire ne pouvait être séparé de notre action de résistance à l’apostasie et à la révolution ambiante. Par exemple, c’est en 1968 que l’ignoble film de Pasolini, Théorème, reçut le grand prix de l’Office catholique international du cinéma : cela eut pour effet notre rupture définitive avec nos aumôniers franciscains du XIVème arrondissement, grands défenseurs de ce film où la « mystique » se fait charnelle. Ce qui nous entraîna naturellement à réagir contre les nombreux les scandales qui abondaient dans la presse, la culture, le catéchisme ou la liturgie : c’était l’époque du catéchisme hollandais, en France du « Fonds obligatoire » remplaçant les catéchismes de jadis, de l’aggiornamento des couvents et des séminaires, des expériences liturgiques qui ont précédé la nouvelle messe. De cette obligation morale de réagir face à l’erreur, au mensonge et au scandale, lorsque bien peu (je pense à la vaillante Alliance Saint-Michel !) le faisaient, il nous est resté un habitus pour la suite, que nous faisons en sorte aujourd’hui de transmettre à nos enfants.
LR – Mais cela allait-il de soi ?
CM – Pas du tout car, je le répète, nous nous étions retrouvés tout à fait seuls dans une époque d’immense bouleversement. Pendant quelques temps nous continuâmes à solliciter certains des prêtres qui nous entouraient : soit des prêtres-étudiants étrangers, soit quelques franciscains de la rue Marie Rose, mais très vite il apparut que ces prêtres, gagnés de plus en plus aux idées nouvelles, ne répondaient pas à notre attente. Peu à peu, la Divine Providence nous fit rencontrer quelques prêtres qui partageaient notre enthousiasme et qui nous apportèrent leur aide. 
   
Je dois citer ici en premier lieu l’abbé Gilles Dubosq , que nous avions rencontré dans le cadre de sa résistance au catéchisme moderne et qui nous a conservé son amitié jusqu’à aujourd’hui, mais aussi le chanoine Guérineau et le chanoine Catta qui, à travers l’Opus Sacerdotale, nous permit de rencontrer de nombreux prêtres fidèles mis à l’écart et souvent persécutés. Je me souviens aussi avoir rencontré l’abbé Coache en 1967, qui nous fit une grande impression. Puis, ce fut notre rencontre avec l’abbé Jean-François Guérin, qui nous fit découvrir la liturgie de l’Église et qui, au travers des attaques et des persécutions dont il fut l’objet, nous convainquit, en 1969, de la nécessité de rester fidèles à la liturgie traditionnelle et de considérer que le cadre de notre action se trouvait dans l’Église. C'est cette situation incroyable aujourd'hui qui nous fit comprendre que notre action devait-être d’abord religieuse et que notre combat était le combat de la foi, même si la vie de la Cité, seconde par rapport à notre action dans l’Église, nous tenait beaucoup à cœur car, comme l’affirme la devise du MJCF : Christus semper et ubique universae imperat, « Le Christ dirige toujours et partout».
LR – Quel regard portez-vous sur cette aventure ?
CM – Elle tient absolument du miracle et de l’action toujours vivante de la Providence divine. En quelque sorte un triple miracle :
- nous n’étions RIEN, ni formés, ni brillants, ni très pieux, ni très saints, mais le Seigneur a voulu certainement, en nous laissant mettre en œuvre ce que fut le MJCF, que cette œuvre soit exclusivement et complètement la sienne, en RIEN la nôtre. Nous n’étions que ses très modestes instruments, et nous en avons eu rapidement eu pleinement conscience
- le deuxième miracle concerne l’espérance. En 1967, le monde catholique français était dans la tempête, et tout ce que nous considérions comme bon, juste et normal est soudain apparu comme obsolète et en passe d’être interdit. Jésus décida, en permettant l’éclosion et le grand développement de cette œuvre, de montrer à ceux qu’il appelait à y participer qu’ils ne devaient jamais désespérer mais qu’ils avaient à suivre sans hésiter les chemins indiqués par la Divine Providence. Cela devrait faire réfléchir bien des fidèles d’aujourd’hui, souvent démoralisés dans un monde finalement bien moins déboussolé et sans assise que celui d’il y a 50 ans... Bien des œuvres en effet se sont levées depuis pour structurer et fortifier les bonnes volontés (chapelles, écoles, mouvements). À l’époque, rien n’existait à par l'action de quelques héros isolés,
- le troisième miracle appartient au domaine de la foi. Il faut se souvenir que le discours d’alors, dans les diocèses, dans les paroisses, mais aussi dans bien des familles, allait non seulement jusqu'à l’apostasie mais aussi à la certitude démissionnaire que les jeunes « de ce temps » ne pouvaient plus être séduits ni conquis par la vérité catholique, ni par un idéal totalement chrétien. Je me souviens que nombre de prêtres et d’évêques que nous avons rencontrés au cours de ces premières années nous prenaient pour des extraterrestres. Extraterrestres qui firent poser à certains, je le sais, des questions sur la pertinence des pastorales du moment. 50 ans après ces épisodes, les merveilleux fruits que la Providence a fait éclore nous donnent, aujourd’hui comme hier, la certitude que si les hommes bataillent pour le bien et l’Église, Dieu leur donne non pas la victoire, mais Sa Victoire, et que la désespérance n’est pas catholique.
LR- Le MJCF était donc né ?
CM – Oui le MJCF, né empiriquement autour d'un solide réseau d'amitié, de l'étude qui s'imposa à nous pour répondre et pour agir, et bien sûr de la prière qui apparut immédiatement comme la colonne vertébrale de tout ce que nous étions et de ce que nous faisions, se développa et joua son rôle missionnaire et formateur pour plusieurs générations de jeunes. Il joua ce rôle de manière motrice jusqu’au moment où des séminaires, des monastères, des écoles et des mouvements, plus polissés que le fougueux MJCF, surent retisser pour la plus grande gloire de Dieu et de son Église un début de maillage catholique dans notre pauvre pays 
LR – Quel bilan tirez-vous du MJCF, 50 ans après sa fondation ?
CM – J’y vois d’abord l’éclosion de nombreuses vocations. Notamment celles de toutes ces jeunes filles du Mouvement qui sont devenues religieuses : dominicaines, bénédictines, franciscaines, etc. Elles ont constitué un merveilleux paratonnerre, elles qui depuis un demi-siècle nous protègent en priant Dieu chaque jour pour le salut de nos âmes, pour nous aider à voir clair et marcher droit en soutenant l’humaine folie de nos entreprises.
   
Je pense aussi à ces centaines de prêtres et religieux issus du MJCF, aussi divers que Frère Grégoire, du Barroux, Mgr Dominique Lebrun, désormais archevêque de Rouen, le Père Innocent-Marie, d’Avrillé, le Père Hubert Blin, curé du Pradet, le Père de Saint-Laumer, de Chéméré, le Père Emmanuel-Marie, de l’abbaye de Lagrasse...
   
Le MJCF a aussi produit de nombreuses familles et bien des vocations militantes laïques : quand je considère les merveilleux résultats du groupe scolaire Saint-Dominique du Pecq, qui bientôt accueillera plus de 1000 élèves, je ne puis oublier que son animateur, Michel Valadier, fut président du MJCF ; je n'oublie pas non plus que Jean-Pierre Maugendre, qui anime contre vents et marée Renaissance Catholique, et maintenant « Terres de Missions » sur TV libertés, est lui aussi un ancien président du MJCF qui a conservé toute la fougue du Mouvement...
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Tous ces exemples, et la foule de tous ceux qui, à leur suite, n’ont rien lâché de leurs engagements, ne montrent-il pas que le sang du MJCF coule toujours et qu’il irrigue largement des aires très diverses dans l’Église qu’il concourt ainsi à faire vivre et refleurir ?

[FSSXP Actualités] Correction filiale: premières réactions romaines

SOURCE - FSSXP Actualités - 28 septembre 2017

Prise de distance du cardinal Müller ; ironie du directeur de la Salle de presse du Saint-Siège ; précisions du cardinal Burke : FSSPX.Actualités recense les premières réactions à la Correctio filialis, rendue publique le 24 septembre 2017.

« D’un côté, le successeur de Pierre mérite le respect, autant dans sa personne qu’en raison du mandat divin qui lui a été confié ; d’un autre côté, les critiques, lorsqu’elles sont formulées avec honnêteté, exigent une réponse adéquate ». C’est en ces termes, confiés au journal The Register, que le préfet émérite de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a réagi, sans faire allusion directement, à la Correction filiale adressée au Saint-Père le 11 août 2017, et rendue publique le 24 septembre.

Pour le cardinal Müller, c’est de « plus de confiance et de dialogue réciproque » que l’Eglise a besoin, et non pas de « cristallisation et de polémique » : une solution pour résoudre la controverse serait ainsi, selon le prélat, que le pape désigne un groupe de cardinaux ayant pour mission de mener à bien une « dispute théologique » avec les tenants des objections les plus sérieuses à Amoris lætitia.

L’urgence pour le préfet émérite est « d’éviter un nouveau schisme au sein d’une Eglise, dont le fondement de l’unité et de la communion en Jésus-Christ est incarné par le pape François et les évêques en pleine communion avec lui ». - Est-il permis de regretter le fait que le cardinal ait omis de rappeler ici que le mandat confié par le Christ au successeur de Pierre est indissociablement lié au fait de transmettre, dans son intégralité et sa pureté doctrinale, l’Evangile du divin Fondateur ?

The Register croit savoir que le Saint-Siège ne répondra pas à la Correction filiale au moins pour deux raisons : d’abord parce que le nombre et la qualité des signataires serait « quantité négligeable » ; d’autre part parce que l’un des signataires est « Mgr Bernard Fellay, un évêque rebelle qui dirige une Fraternité Sacerdotale en rupture de communion avec Rome ».

Pourtant le Supérieur général de la Fraternité Saint-Pie X a bien pris soin de préciser dans l’entretien qu’il a accordé à FSSPX.Actualités, le 26 septembre, que « ce sont moins les noms des signataires de la Correctio filialis que la valeur objective des arguments exposés qui doit être prise en compte ».

Mais la Correction filiale a tout de même été entendue au Vatican : Greg Burke, directeur de la Salle de presse du Saint-Siège y a fait allusion lorsque le bruit a couru, dans la journée du lundi 25 septembre, que le Vatican aurait bloqué sur son territoire l’accès à la page Internet de la Correction filiale : « Vous pensez que ça vaut vraiment le coup de bloquer une page web pour une lettre qui contient une soixantaine de noms ? », a-t-il ironisé dans les colonnes du quotidien Il Giornale. - Est-il exagéré d’y voir l'indice que le texte a tout de même bien atteint sa cible ?

« La Correction filiale est une initiative indépendante de celle que les regrettés cardinaux Caffara et Meisner, et que le cardinal Brandmüller et moi-même avons prise avec les Dubia », a réagi pour sa part le cardinal Burke dans les colonnes du Register.

Le professeur Joseph Shaw, qui est le porte-parole de la Correction filiale, a expliqué au même journal que c’était délibérément que les auteurs des Dubia n’avaient pas été impliqués dans l’adresse faite au pape, afin de conserver à cette initiative son caractère indépendant.

Robert Royal, Président de l’Institut Raison et Foi, résume à sa manière la situation : « je n’ai aucun conseil à donner au Vatican », précise-t-il, « mais le fait de manifester respect et écoute envers ceux qui ont adhéré pendant tant d’années à l’enseignement de l’Eglise serait un bon signe pour rétablir ce fameux dialogue dont on entend parler partout ailleurs ».

(Sources : Il Giornale/The Register/cath.ch - FSSPX.Actualités - 28/09/17)

27 septembre 2017

[FSSXP Actualités] Etats-Unis : un nouvel évêque signe la Correction filiale


SOURCE - FSSXP Actualités - 27 septembre 2017

Un évêque, vétéran de la Seconde Guerre, vient de signer l’adresse par laquelle de nombreux clercs et laïcs implorent le Saint-Père de faire la clarté sur les points les plus controversés de l’exhortation apostolique Amoris lætitia.

Mgr René Henry Gracida est âgé de 94 ans. Il a exercé les charges d’évêque auxiliaire dans l’archidiocèse de Miami, puis d’évêque de Pensacola-Tallahasee, avant de devenir évêque de Corpus Christi, charge pastorale qu’il exerça jusqu’à sa démission, en 1997.

Avant son ordination sacerdotale, Mgr Gracida a servi dans l’armée de l’air, pendant la Seconde Guerre mondiale dont il est un vétéran : à son actif, pas moins de 32 missions dans le ciel européen à combattre la Luftwaffe allemande.

Cette nouvelle signature a pour effet de rendre caduque la recension de la « Correction filiale » que Nicolas Senèze a effectuée le 24 septembre dernier dans les colonnes du journal La Croix, écrivant un peu vite que le nombre des signataires de la « pétition » était « très limité et marginal », avec « un seul évêque mais sans charge dans l’Eglise, Mgr Fellay », ajoutant que les signataires se limitaient « à la sphère des traditionalistes » et des « bloggers anti-François ».

De fait, grand ami de Jean-Paul II et de Mère Angelica qu’il a encouragée à fonder la chaîne EWTN, Mgr Gracida ne rentre pas dans le costume étriqué que le chroniqueur de La Croix voudrait faire endosser aux signataires de cette adresse filiale - et non « pétition » - au Saint-Père.

Sur son blog - car notre évêque est très au fait des nouvelles technologies, malgré son âge avancé -, le prélat affirme qu’il a écrit aux organisateurs de la Correction filiale, les « félicitant » et les assurant de sa « gratitude ».

Il a de plus déclaré au Catholic Herald qu’il espérait que « d’autres évêques soutiendraient cette initiative due à des laïcs, afin de lui donner plus de poids dans l’esprit du pape François et lui permettre de parler et d’agir rapidement, en réponse ».

Mgr Gracida a enfin fait référence au bienheureux Henry Newman qui décrivait dans son ouvrage relatif à la crise arienne, que « c’est grâce à l’esprit de résistance des laïcs, que la majorité des évêques alors encore ariens ou semi-ariens se sont mis à suivre saint Athanase ».

Et l’évêque émérite de conclure : « l’Eglise vit un moment si critique de son histoire que je ne vois pas comment il est possible pour quelqu’un bien informé des controverses entourant l’actuel pontificat, de demeurer silencieux ».

(Sources : abyssus.org/LifeSiteNews/CatholicHerald - FSSPX.Actualités - 27/09/17)

[Correspondance Européenne] Église catholique: l’impact mondial et la signification de la Correctio filialis

SOURCE - Correspondance Européenne - 27 septembre 2017

La “correction filiale” que plus de 60 universitaires catholiques et pasteurs de l’Eglise ont adressé au pape François a eu un impact extraordinaire dans le monde entier. Bien sûr, certains ont cherché à minimiser l’initiative en affirmant que le nombre des signataires était «limité et marginal». Mais si l’initiative n’est pas significative, pourquoi a-t-elle eu de telles répercussions dans tous les médias des cinq continents, et même jusqu’en Russie et en Chine ?

Une recherche sur Google News, remarque Steve Skojec sur Onepeterfive, a fait ressortir un résultat de plus de 5 000 nouvelles, tandis que le site ww.correctiofilialis.org a dépassé les 100 000 visites en 48h. L’adhésion en ligne sur ce site est encore ouverte, même si ne seront visibles que quelques signatures. Il faut admettre qu’il n’y a qu’une seule raison à un tel écho mondial : on peut ignorer ou réprimer la vérité, mais lorsqu’elle se manifeste avec clarté, elle possède une force intrinsèque et est destinée à se diffuser. L’ennemi principal de la vérité n’est pas l’erreur, mais l’ambiguïté. Si des erreurs et hérésies se répandent dans l’Eglise, ce n’est pas de leurs propres forces, mais bien par le silence coupable de qui devrait défendre ouvertement la vérité de l’Evangile.

La vérité, qu’affirme la “correction filiale”, c’est que le pape François, par une longue série de paroles, d’actes et d’ommissions, « a soutenu, de manière directe ou indirecte (avec quelle connaissance de cause, nous ne le savons pas et nous ne voulons pas en juger) »au moins « sept propositions fausses et hérétiques, propagées dans l’Eglise aussi bien de façon officielle que par acte privé». Les signataires insistent respectueusement afin que le pape «rejette publiquement ces propositions, accomplissant ainsi le mandat que Notre Seigneur Jésus- Christ a donné à saint Pierre et à travers lui à tous ses successeurs jusqu’à la fin du monde : “J’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas ; et toi, quand tu seras converti, affermis tes frères”(Luc, 22, 32) ».

Pour le moment, aucune réponse quant à la correction n’est encore parvenue, mais uniquement quelques tentatives maladroites de disqualifier ou diviser les signataires, en se concentrant sur certains plus connus, comme l’ex-président du IOR (NdT : Institut pour les oeuvres de religion, “banque vaticane”), Ettore Gotti Tedeschi. En réalité, comme l’a déclaré Gotti Tedeschi lui-même dans une interview à Marco Tosatti le 24 septembre, les auteurs de la Correctio ont agi par amour de l’Eglise et de la papauté. Gotti Tedeschi et un autre célèbre signataire, l’écrivain allemand Martin Mosebach, ont été tous deux applaudis le 14 septembre dernier à l’université de l’Angelicum par un public de plus de 400 prêtres et laïcs, 3 cardinaux et plusieurs évêques, à l’occasion du Congrès des dix ans du motu proprio Summorum Pontificum.

Deux autres signataires, les professeurs Claudio Pierantoni et Anna Silva, ont exprimé ces mêmes idées contenues dans la Correctiolors du congrès intitulé “Faire la clarté”, organisé le 23 avril par la Nuova Bussola Quotidiana, avec le soutien d’autres prélats, parmi lesquels le défunt cardinal Carlo Caffarra. Bien d’autres signataires du document occupent, ou ont occupé, des postes importants dans les institutions ecclésiastiques. D’autres encore sont d’éminents universitaires. Si, dans le monde catholique, les auteurs de la Correctioétaient des personnes isolées, leur document n’aurait pas eu un tel retentissement.

La Correctio filialis n’est que la pointe d’un vaste iceberg de mécontentement quant à la confusion qui règne aujourd’hui dans l’Eglise. Une Supplique filiale au pape François fut souscrite en 2015 par plus de 900 000 signataires du monde entier, et une Déclaration de fidélité à l’enseignement immuable de l’Eglise sur le mariage, présentée en 2016 par 80 personnalités catholiques, a reccueilli 35 000 signatures. Il y a un an, quatre cardinaux ont formulé leur dubia sur l’exhortation Amoris laetitia. Pendant ce temps, des scandales d’ordre économique et moral ébranlent le pontificat du pape François. Le vaticaniste américain John Allen, qui n’est certes pas d’orientation traditionnelle, a avoué dans la Crux du 25 septembre, combien sa position était aujourd’hui devenue difficile.

Parmi les accusations les plus ridicules portées sur les souscripteurs du document, il y a celle de “lefebvristes”, du fait de la signature de l’évêque Mgr Bernard Fellay, Supérieur de la Fraternité Saint Pie X. L’adhésion de Mgr Fellay à un tel document est un acte historique qui clarifie sans l’ombre d’une équivoque la position de la Fraternité par rapport au nouveau pontificat. Mais le “lefebvrisme” est une locution verbale qui a, pour les progressistes, une fonction équivalente à celle du mot “fascisme” pour les communistes dans les années soixante-dix : discréditer l’adversaire, sans prendre la peine d’analyser ses arguments. La présence de Mgr Fellay est en outre rassurante pour les signataires de la Correctio. Comment imaginer que le pape n’ait pas à leur égard la compréhension et la bienveillance dont il a fait preuve ces deux dernières années envers la Fraternité Saint Pie X ?

L’achevêque de Chieti, Mgr Bruno Forte, ex-secrétaire spécial du Synode des évêques sur la famille, a déclaré que la Correctioreprésente « une attitude fermée à priori envers l’esprit du Concile Vatican II que le pape François incarne si profondément » (Avvenire, 26 septembre 2017). L’esprit de Vatican II, incarné par le pape François, écrit à son tour Mgr Giuseppe Lorizio, dans ce même quotidien de la Conférence épiscopale italienne, consiste dans le primat de la pastorale sur la théologie, soit la subordination de la loi naturelle à l’expérience de vie car, explique-t-il, « la pastorale comprend et inclut la théologie » et non l’inverse.

Mgr Lorizio enseigne la théologie à la Faculté de l’Université du Latran. Il est à signaler queMgr Brunero Gherardini en fut le doyen, lui qui est décédé le 22 septembre, la veille de laparution de la Correctio, et n’a pu la signer du fait de ses conditions de santé précaires. Ce grand représentant de l’école théologique romaine a montré dans ses derniers livres à quelle destination malheureuse nous mène le primat de la pastorale annoncé par Vatican II et diffusé par ses herméneutes ultraprogressistes, dont Mgr Forte lui-même et le théologien improvisé Massimo Faggioli qui, avec Alberto Melloni, se distinguent actuellement par leurs attaques sans consistance à la Correctio.

Mgr Forte, dans Avvenire, ajoute que ce document ne peut être partagé par « ceux qui sont fidèles au successeur de Pierre en lequel ils reconnaissent le pasteur que le Seigneur a donné à son Eglise comme guide de la communion universelle.On doit toujours la fidélité au Dieu vivant, qui parle aujourd’hui dans l’Eglise à travers le Pape ». On en est donc arrivé au point de qualifier le pape François de “Dieu vivant”, en oubliant que l’Eglise se fonde sur Jésus-Christ, dont le pape est le représentant sur terre, mais non le divin propriétaire. Le pape n’est pas, comme l’a justement relevé Antonio Socci, un « second Jésus » (Libero, 24 septembre 2017), mais le 266èmesuccesseur de Pierre. Son mandat n’est pas de changer ou “améliorer” les paroles de Notre-Seigneur, mais bien de les garder et de les transmettre le plus fidèlement possible. Et si ce n’est pas le cas, les catholiques ont le devoir de le reprendre dans un esprit filial, en suivant l’exemple de saint Paul à l’égard de saint Pierre, prince des Apôtres (Gal. II, 11).

Et on s’étonne enfin de ce que les cardinaux Walter Brandmüller et Raymond Leo Burke n’aient pas signé le document, mais c’est ignorer, comme le souligne Rorate Coeli, que la Correctio des soixante a un caractère purement théologique, tandis que celle des cardinaux, quand elle arrivera, aura une autorité et une portée bien différente, ne serait-ce que sur le plan canonique. La correction à l’égard du prochain, prévue par l’Evangile et par le Code de Droit Canon en vigueur, à l’article 212 paragraphe 3, peut s’exprimer de diverses manières. « Ce principe de correction fraternelle au sein de l’Eglise – a déclaré Mgr Athanasius Schneider dans une récente interview accordée à Maike Hickson – a toujours été valide, même à l’égard du pape, et devrait donc être valide même à notre époque. Malheureusement, quiconque ose de nos jours parler de vérité – même lorsqu’il le fait avec respect à l’égard des pasteurs de l’Eglise – est présenté comme un ennemi de l’unité, comme ce fut le cas pour saint Paul, quand il déclara : “Suis-je devenu votre ennemi en vous disant la vérité ?” (Gal. 4,16) ». (Roberto de Mattei)

26 septembre 2017

[FSSPX Actualités] Mgr Fellay: pourquoi j’ai signé la Correctio filialis

SOURCE - FSSPX Actualités - 26 septembre 2017

Après la publication, le dimanche 24 septembre 2017, de la Correctio filialis par 62 clercs et universitaires laïcs qui relèvent sept propositions hérétiques dans l’exhortation apostolique Amoris lætitia, FSSPX.Actualités a demandé à Mgr Bernard Fellay, Supérieur général de la Fraternité Saint-Pie X, pour quelle raison il avait signé ce document. 
FSSPX.Actualités : Pourquoi avez-vous apporté votre soutien à la Correctio filialis ?
Mgr Fellay : Cette démarche filiale de la part de clercs et d’universitaires laïcs, troublés par des propositions hétérodoxes d’Amoris lætitia, est importante. L’enseignement du Christ sur le mariage ne peut être subrepticement changé, au prétexte que les temps changent et que la pastorale doit s’y adapter, en donnant des moyens de contourner la doctrine.

Je comprends que les auteurs de la Correctio filialis puissent être bouleversés par toutes les divisions causées par Amoris lætitia, par les explications que le pape a fournies sur ce document dans de récentes déclarations, par ses propos sur la figure de Luther… Désormais dans certains pays les évêques acceptent la communion des divorcés civilement remariés, dans d’autres ils la refusent. Est-ce que la morale catholique est à géométrie variable ? Peut-elle être soumise à des interprétations contradictoires ?

Depuis septembre 2016, quatre cardinaux demandent respectueusement au pape de « faire la clarté » ; cette année ils ont sollicité une audience. En réponse, ils n’ont eu droit qu’au silence, mais le silence n’est pas une réponse. Sur une question aussi grave et face aux divisions présentes, il est nécessaire que le Saint-Père réponde clairement sur le fond.

Dans cette triste situation de confusion, il est très important que le débat sur ces questions majeures s’amplifie, afin que la vérité soit rétablie et l’erreur condamnée.

Voilà pourquoi j’ai apporté mon soutien à cette démarche, mais ce sont moins les noms des signataires de la Correctio filialis que la valeur objective des arguments exposés qui doit être prise en compte.
FSSPX.Actualités : Est-ce que cela remet en cause les rapports de la Fraternité Saint-Pie X avec Rome ?
Mgr Fellay : Notre respect à l’égard du pape est intact, et c’est précisément par respect pour sa fonction que nous lui demandons filialement de « confirmer ses frères », en rejetant publiquement ces propositions ouvertement hétérodoxes qui occasionnent tant de divisions dans l’Eglise. 

J’ai apprécié la réponse d’Ettore Gotti Tedeschi[1], cosignataire lui aussi de la Correctio filialis. Il affirme avec raison que nous ne sommes pas les ennemis du pape. Au contraire, nous agissons ainsi parce que nous aimons l’Eglise.

Cette attitude fut celle de Mgr Lefebvre et de la Fraternité Saint-Pie X depuis le début. Dans sa déclaration du 21 novembre 1974, notre fondateur disait : « Nous adhérons de tout cœur, de toute notre âme à la Rome catholique, gardienne de la foi catholique et des traditions nécessaires au maintien de cette foi, à la Rome éternelle, maîtresse de sagesse et de vérité. Nous refusons par contre et avons toujours refusé de suivre la Rome de tendance néo-moderniste et néo-protestante », - ce sont précisément ce néo-modernisme et ce néo-protestantisme que les auteurs de la Correctio filialis dénoncent à juste titre comme les causes des changements opérés par Amoris laetitia dans la doctrine et la morale du mariage.

De toutes les fibres de notre être nous sommes attachés à Rome, Mater et Magistra. Nous ne serions plus romains si nous renoncions à sa doctrine bimillénaire ; au contraire, nous deviendrions les artisans de sa démolition, avec une morale de circonstance dangereusement appuyée sur une doctrine molle.

Notre fidélité à la Tradition n’est pas un repli sur le passé, mais un gage de pérennité pour l’avenir. C’est à cette seule condition que nous pouvons utilement servir l’Eglise. 
FSSPX.Actualités : Qu’espérez-vous de cette Correctio filialis ?
Mgr Fellay : Il faut souhaiter qu’elle permette une prise de conscience plus nette de la gravité de la situation de l’Eglise de la part des clercs et des fidèles. Oui, comme l’a reconnu Benoît XVI, « la barque de Pierre prend l’eau de toute part ». Ce n’était pas une image poétique, c’est une réalité tragique. Dans la bataille présente, ce sont la foi et la morale qu’il faut défendre !

On peut également espérer que d’autres soutiens se manifestent de la part de ceux qui ont charge d’âmes. Les signataires de la Correctio filialis, en exposant ces propositions objectivement hétérodoxes, n’ont fait que dire tout haut ce que beaucoup savent au fond. N’est-il pas temps pour ces pasteurs de le dire haut et fort ? Mais, là aussi, c’est moins le nombre des signataires que la valeur objective des arguments qui importe. La Vérité révélée par le Christ n’est pas quantifiable, elle est avant tout immuable.

Il faut implorer Dieu pour que le Vicaire du Christ rétablisse une entière clarté en un domaine aussi essentiel : on ne peut modifier la loi divine du mariage sans provoquer de graves dissensions. Si rien n'est fait, la division qui se dessine dans l’Eglise, risque de devenir irréparable. C’est pourquoi nous prions afin que, véritablement, la parole de Notre-Seigneur à saint Pierre puisse s’appliquer au pape François : « Et toi, quand tu seras converti, confirme tes frères. » (Lc 22, 32)
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[1] Ettore Gotti Tedeschi, économiste qui fut président de l’Institut pour les œuvres de religion de 2009 à 2012, a accordé un entretien au site hispanophone Infovaticana (24 septembre 2017), repris par le vaticaniste Marco Tosatti sur son blogue. NDLR.

[Présent] Amoris laetitia: une exhortation… et sept hérésies ?

SOURCE - Présent - 26 septembre 2017

« Très Saint-Père, c’est avec une profonde tristesse, mais poussés par la fidélité envers Notre Seigneur Jésus-Christ, par l’amour pour l’Eglise et pour la papauté et par dévotion filiale envers votre personne, nous sommes contraints d’adresser à Votre Sainteté une correction à cause de la propagation d’hérésies entraînée par l’exhortation apostolique Amoris laetitia et par d’autres paroles, actions et omissions de Votre Sainteté. » C’est ainsi que commence la lettre signée par près de 80 universitaires, laïcs et membres du clergé du monde entier, dont deux évêques, parmi lesquels Mgr Bernard Fellay, supérieur général de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X. Elle a été rendue publique le dimanche 24 septembre sur le site www.correctiofilialis.org où elle reste ouverte aux signatures. Elle avait été adressée au pape le 16 juillet, mais n’avait pas reçu de réponse, pas plus que n’en avaient eu les cinq Dubia envoyées par quatre cardinaux en septembre 2016.

Cette fois, les auteurs de la Correctio filialis de haeresibus propagatis (correction filiale concernant la propagation d’hérésies) demandent au pape François de revenir sur sept hérésies qu’ils estiment contenues dans l’exhortation apostolique Amoris laetitia ou propagées par ses paroles, actions et omissions en relation avec son exhortation dans le domaine du mariage, de la vie morale et de la réception des sacrements.

Les auteurs de cette lettre écrite en latin soulignent que le dogme de l’infaillibilité pontificale n’est pas remis en cause par leur action, puisque le pape François n’a pas rempli les critères pour que ses paroles soient considérées comme infaillibles : ses positions ne sont pas présentées comme des enseignements définitifs de l’Eglise et aucun pape ne peut soutenir que Dieu lui a révélé de nouvelles vérités. Les auteurs de la correction filiale s’en réfèrent encore à la réprimande en public de l’apôtre Pierre par l’apôtre Paul, ainsi qu’aux écrits de saint Thomas d’Aquin, pour justifier cette correction filiale qui est la première correction d’hérésies ainsi adressée à un successeur de saint Pierre depuis 1333.

Dans la conclusion de leur lettre, après avoir exposé les sept hérésies que contiendrait Amoris laetitia, les signataires expliquent les causes de la crise actuelle de l’Eglise, au sein de laquelle « un chemin s’est ouvert à l’hérésie et au schisme » : le « modernisme », qui veut que les vérités transmises par Dieu à l’Eglise ne soient pas définitives et doivent être réinterprétées à la lumière de notre temps, et « la sympathie sans précédent » du pape François « à l’égard de Martin Luther, et l’affinité entre les idées de Luther sur la loi, la justification et le mariage, et ce qu’enseigne ou favorise [François] dans Amoris laetitia et ailleurs ».

La décision du pape François de remplacer en ce mois de septembre l’Institut Jean-Paul II sur le mariage et la famille, très attaché à la diffusion de la doctrine traditionnelle de l’Eglise sur le mariage, par un Institut pontifical théologique pour les sciences du mariage et de la famille, ne sera pas de nature à rassurer les auteurs de la Correctio filialis.

23 septembre 2017

[FSSPX Actualités] In memoriam Mgr Brunero Gherardini

SOURCE - FSSPX Actualités - 23 septembre 2017

Au petit matin du vendredi 22 septembre 2017, Mgr Brunero Gherardini a remis son âme entre les mains du Seigneur.
   
Théologien unanimement reconnu , il était âgé de 92 ans. Chanoine de la Basilique Saint-Pierre et protonotaire apostolique, il avait contribué à ouvrir, en milieu universitaire, un débat théologique sur plusieurs points contestés du concile Vatican II.
  
Nè en 1925, il fut ordonné prêtre en 1948. Cet élève de Mgr Pietro Parente et du Père Cornelio Fabro avait obtenu - summa cum laude - son doctorat en théologie en 1952 à l’Université du Latran. Sa thèse avait pour titre : « La parole de Dieu dans la théologie de Karl Barth » (Rome, Studium 1955)

Le jeune abbé Gherardini avait commencé à exercer son ministère en paroisse à Prato, puis comme professeur de séminaire dans son diocèse ; il avait également reçu la charge d’assistant diocésain dans le cadre de l’Action Catholique. En 1959, c’est au service du Saint-Siège qu’il est appelé, au sein de la Congrégation des Séminaires et des Études, comme responsable des séminaires diocésains des régions d’Italie.

En 1968, il est professeur d’ecclésiologie et d’œcuménisme à l’Université du Latran dont il deviendra plus tard le doyen. Il a aussi occupé une chaire dans ces matières à l’Institut Ecclesia Mater de l’Université pontificale Saint-Thomas d’Aquin.

C’est lui qui, succédant à Mgr Antonio Piolanti dans la charge de postulateur de la cause de béatification du pape Pie IX, a pu voir ses efforts récompensés et le dossier de béatification parvenir à son terme.

Ce collaborateur habituel de nombreuses revues théologiques de portée internationale - dont Divinitas -, s’était signalé ces dernières années en participant au débat théologique sur l’interprétation du concile Vatican II, devenant ainsi le porte-voix, dans les milieux universitaires romains, de la Tradition catholique. Son ouvrage : « Vatican II un débat à ouvrir » demeure une référence en la matière.

Les funérailles de Mgr Gherardini seront célébrées lundi 25 septembre à 11 h en la Basilique Saint-Pierre ; et le lendemain, mardi 26, il sera inhumé à Prato dans le caveau familial, dans l’attente de la résurrection des corps. Il avait renoncé au privilège l’autorisant à reposer dans le Sacello dei Canonici Vaticani, le caveau des chanoines de la basilique vaticane, au cimetière romain de Campo Verano.

(Sources : Corrispondenza Romana/Servizio Informazione Religiosa/unavox.it - FSSPX.Actualités - 23/09/17)

[Correctio Filialis (site)] Résumé de la «correction filiale»

SOURCE - Correctio Filialis (site) - 23 septembre 2017

Une lettre de 25 pages signée par 40 clercs catholiques et universitaires laïcs a été remise au pape François le 11 août. Puisqu’aucune réponse n’a été reçue du Saint-Père, elle est rendue publique aujourd’hui, le 24 septembre, Fête de Notre-Dame de la Merci et de Notre-Dame de Walsingham. La lettre, ouverte aux nouveaux signataires, a maintenant les noms de 62 clercs et universitaires laïcs de 20 pays, qui représentent également d’autres personnes qui n’ont pas la liberté d’expression nécessaire pour signer. Son titre est en latin : Correctio filialis de haeresibus propagatis (littéralement : « Une correction filiale concernant la propagation d’hérésies »). Elle affirme que le pape, par son Exhortation apostolique Amoris laetitia ainsi que par d’autres paroles, actions et omissions en rapport avec celle-ci, a effectivement soutenu sept propositions hérétiques par rapport au mariage, à la vie morale et à la réception des sacrements, et qu’il a été à l’origine de la diffusion de ces opinions hérétiques au sein de l’Eglise catholique. Ces sept hérésies ont été exprimées par les signataires en latin, langue officielle de l’Eglise.

Cette lettre de correction comporte trois parties principales. Dans la première partie, les signataires expliquent pourquoi, en tant que catholiques croyants et pratiquants, ils ont le droit et le devoir d’adresser une telle correction au souverain pontife. Le droit ecclésiastique lui-même requiert que les personnes compétentes ne restent point silencieuses lorsque les pasteurs de l’Eglise induisent le troupeau en erreur. Cela n’entraîne aucun conflit avec le dogme catholique de l’infaillibilité pontificale, puisque l’Eglise enseigne qu’un pape doit satisfaire à des critères stricts pour que ses paroles puissent être considérées comme infaillibles. Le pape François n’a pas rempli ces critères. Il n’a pas déclaré que ces positions hérétiques sont des enseignements définitifs de l’Eglise, pas plus qu’il n’a déclaré que les catholiques devraient les croire avec l’assentiment de la foi. L’Eglise enseigne qu’aucun pape ne peut soutenir que Dieu lui aurait révélé quelque nouvelle vérité que les catholiques seraient obligés de croire.

La deuxième partie de la lettre est la partie essentielle, puisqu’elle contient la « correction » proprement dite. Elle établit la liste des passages d’Amoris laetitiaoù des positions hérétiques sont insinuées ou encouragées, puis elle énumère les paroles, les actes et les omissions du pape François qui font comprendre, au-delà de tout doute raisonnable, que celui-ci veut voir les catholiques interpréter ces passages d’une manière qui est, de fait, hérétique. En particulier, le pape a directement ou indirectement approuvé les croyances selon lesquelles l’obéissance à la loi de Dieu peut se trouver être impossible ou non souhaitable, et selon lesquelles l’Eglise sait parfois accepter que l’adultère soit considéré comme compatible avec le fait d’être un catholique pratiquant.

La partie finale, sous le titre « Elucidation », aborde les deux causes de cette crise unique. L’une des causes est le « modernisme ». Théologiquement parlant, le modernisme est la croyance que Dieu n’a pas transmis à l’Eglise des vérités définitives qu’elle doit continuer d’enseigner dans un sens exactement identique jusqu’à la fin des temps. Les modernistes tiennent que Dieu ne communique à l’homme que des expériences, sur lesquelles les êtres humains peuvent réfléchir, de manière à affirmer des choses diverses sur Dieu, la vie et la religion ; mais de telles affirmations ne sont que provisoires, et ne sont jamais des dogmes fixes. Le modernisme a été condamné par le pape saint Pie X au début du XXe siècle, mais il a connu un regain au milieu de ce siècle. La confusion importante et persistante qui s’est installée dans l’Eglise catholique à travers le modernisme oblige les signataires à rappeler la vraie définition de la « foi », de l’« hérésie », de la « révélation » et du « magistère ».

Une deuxième cause de la crise est constituée par l’influence apparente des idées de Martin Luther sur le pape François. La lettre montre comment Luther, fondateur du protestantisme, avait sur le mariage, le divorce, le pardon et la loi divine des idées qui correspondent à celles promues par le pape en paroles, en actions et par omission. Elle met également en évidence la louange explicite et sans précédent qu’a faite le pape de l’hérésiarque allemand.

Les signataires ne s’aventurent pas à juger du degré de conscience avec lequel le pape François a propagé les sept hérésies qu’ils énumèrent. Mais ils insistent avec respect pour qu’il condamne ces hérésies, qu’il a directement ou indirectement soutenues.

Les signataires professent leur fidélité à la Sainte Eglise romaine, assurant le pape de leurs prières et implorant sa bénédiction apostolique.
   

[Paix Liturgique] RP de Blignères: le rite rend "sensible" la vérité

Le RP de Blignières et quelques membres
de la 
Fraternité Saint-Vincent Ferrier
durant les vêpres 
d'ouverture du dixième
anniversaire du motu 
proprio Summorum
Pontificum, célébrées par 
Mgr Gänswein,
Préfet de la Maison pontificale.
SOURCE - Paix Liturgique - Lettre n°613 - 23 septembre 2017

Dimanche 17 septembre 2017 c'est dans une église de la Trinité des Pèlerins bondée que le RP de Blignières, fondateur des dominicains de Chéméré (et de nouveau Prieur depuis le 20 septembre 2017), a prononcé le sermon de clôture du pèlerinage romain ayant marqué le dixième anniversaire du motu proprio Summorum Pontificum. Nous sommes heureux, avec sa permission et celle du RP de Saint-Laumer, qui célébrait cette belle messe pontificale selon le rite dominicain, de vous faire partager cette réflexion qui souligne avec force le lien irrépressible entre liturgie et théologie. Car la liturgie, comme le soulignait le cardinal Müller, lors du colloque du 14 septembre à l’Université angélique, est un « lieu théologique ». Et par le fait, un « lieu » artistique. On appréciera en ce sens la conclusion du P. de Blignières, qui évoquant implicitement l’adage platonicien, « le beau est la splendeur du vrai », l’applique aux rites sacrés polis par la tradition : « La vérité qui devient sensible, qu’est-ce que c’est, sinon la beauté ? »

SERMON DU RP DE BLIGNIÈRES (FSVF) POUR LE DIXIÈME ANNIVERSAIRE DU MOTU PROPRIO SUMMORUM PONTIFICUM

Rome, église de la Trinité des Pèlerins, 17 septembre 2017

Le Concile de Trente, pour rendre raison des cérémonies du Saint Sacrifice de la Messe, rappelle que la nature de l’homme a besoin d’aides extérieures et de signes visibles afin de s’élever à la contemplation des choses divines (1). On peut en tirer une définition du rite : « un rite, c’est ce qui rend sensible une vérité ». Le rite du sacrifice de la messe, c’est ce qui met à la portée de la nature humaine la vérité sur Dieu, la vérité sur l’homme, et la vérité sur le Christ. En sa forme latine traditionnelle, il rend tangibles, avec une efficacité insurpassable, ses trois aspects.

La vérité sur Dieu : Dieu est Trinité

Celui qui assiste pour la première fois à la messe dans le rite traditionnel est tout de suite frappé par l’ambiance sacrée qui s’en dégage. L’architecture majestueuse, la disposition de l’espace avec un lieu réservé aux ministres et un autre aux fidèles, l’orientation de la célébration, l’attitude recueillie et hiératique du célébrant, les vêtements particuliers qu’il revêt, la langue inaccoutumée qu’il emploie, les gestes de révérence qu’il fait en direction du tabernacle et des oblats consacrés, notamment les nombreuses génuflexions, enfin le mystérieux silence du canon : tout porte à sortir du monde profane et à se mettre en présence de Quelqu’un qui dépasse le monde.

Mais si cet assistant prend la peine de suivre dans un missel ce que dit le prêtre, il est alors touché par un aspect étonnant de la prière. Certes, on y supplie avec grand respect celui que toutes les traditions de l’humanité appellent « Dieu », mais on le fait avec la certitude confiante d’un enfant s’adressant à son père. L’onction inimitable des très anciennes prières latines nous met en rapport, non avec un grand architecte impassible de l’Univers, mais avec une réalité mystérieuse et fascinante : la Trinité. On s’adresse à elle, étonnamment, comme si on était de la famille ! On lui parle avec une audace inouïe, on se présente à elle dans le voisinage de toute une nuée de saints personnages qui ont un grand crédit auprès d’elle. On ne cesse surtout de parler de son Fils, et chaque fois que l’on évoque son nom, on incline la tête.

Oui, les rites de la tradition latine soulignent fortement que c’est à la Trinité que l’on s’adresse, avec des gestes expressifs, et des paroles où se conjuguent l’adoration et l’amour. Ainsi l’offertoire de la messe dominicaine : « Recevez, sainte Trinité, cette offrande que je vous offre en mémoire de la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et accordez qu’elle monte en votre présence et vous soit agréable, et qu’elle opère mon salut éternel et celui de tous les fidèles ».

La vérité sur l’homme : l’homme est « perdu »

Mais rapidement, une deuxième note se dégage, pour celui qui découvre les rites anciens. Ils rendent sensibles la vérité sur l’homme. Cette vérité, c’est que, laissé à lui-même, l’homme est « perdu ». La recherche d’un sens à une vie qui parait souvent absurde, le scandale du mal et spécialement celui de la souffrance des innocents, le sentiment, au moins confus, d’une culpabilité personnelle : quiconque réfléchit, au lieu de se « divertir », expérimente cela… Que devient cette angoisse existentielle, lorsqu’elle se confronte à un rite rempli de la sagesse des siècles catholiques ? Elle reçoit un nom : le péché. Tant dans les liturgies orientales que dans celles de l’occident, on remarque quelque chose de très émouvant : le prêtre, et avec lui les fidèles qui s’unissent au sacrifice, reconnaissent la vérité de leur misère.

Voyez le célébrant dans les prières préparatoires de la messe romaine : il semble hésiter à monter à l’autel avant d’avoir, de nombreuses manières, reconnu son indignité : par un psaume admirable, par une confession de ses fautes, par des versets qui ressemblent à des oraisons jaculatoires ! Voyez le prêtre au rit dominicain, comme il s’incline profondément durant les Confiteor, le sien et aussi celui des ministres, comme s’il voulait prendre aussi sur lui leurs péchés ! Voyez les prières du canon romain « si pur de toute erreur, qu’il n’est rien en lui qui ne respire grandement la sainteté et la piété » (2), ce canon où le célébrant, à diverses reprises, prosterné, implore humblement, tel un pécheur qui ne peut s’appuyer sur ses mérites (Te igitur, Supplices te rogamus, Nobis quoque peccatoribus) ! Voyez les bouleversantes prières du prêtre avant la communion !

Une des raisons du rayonnement des rites anciens sur les convertis – je parle d’expérience –, c’est qu’ils assument, avec une clairvoyance convaincante, cette part de la vérité de l’homme trop souvent camouflée : il est pécheur et il a besoin de rédemption. Et ces rites ont le secret de mettre avec espérance cette misère au contact de la miséricorde.

La vérité sur le Christ : son sacrifice, offert par l’Église, réconcilie l’homme à Dieu

Par toute la tonalité d’une célébration selon un rite « d’usage vénérable et antique » (3), l’assistant – combien de fois n’en avons-nous pas reçu la confidence ! – sent « qu’il se passe quelque chose ». Au cœur du silence sacré du canon, les gestes qui entourent la double consécration mettent comme sous ses yeux le mystère de la foi. Il remarque, dans son missel, que le célébrant, durant tout le canon, a désigné les oblats par des signes de croix. Il voit les fidèles recevoir l’hostie consacrée à genoux et sur les lèvres et demeurer ensuite en prière silencieuse. S’il interroge le prêtre après la messe, il est préparé à apprendre et à comprendre que l’essence de la messe est un sacrifice. Ce sacrifice de louange à la Trinité est un sacrifice propitiatoire « pour [son] salut éternel et celui de tous les fidèles ».

D’ailleurs il se rend compte, par les mouvements que fait le prêtre et par son orientation, que tout est axé, non sur le prêtre lui-même, mais sur le Christ, en sa présence au tabernacle et dans les oblats consacrés. Il voit comment le célébrant tient les doigts joints après avoir touché le Corps du Christ, et avec quelle amoureuse précaution il recueille sur le corporal toutes les parcelles consacrées. D’une part, le besoin de salut est fortement souligné ; d’autre part, les paroles et les gestes nous mettent sensiblement en contact avec le renouvellement mystique et non sanglant d’un sacrifice salutaire. Ainsi au rite dominicain, le célébrant, après la consécration, écarte largement les bras, comme le Christ sur la Croix. Pour le rite de la paix, il embrasse d’abord le calice contenant le précieux Sang du Christ et sur lequel il tient son Corps immaculé, pour bien signifier que la paix qu’il transmet aux ministres vient du sacrifice du Christ.

Les rites anciens conviennent encore à la nature de l’homme sous l’aspect où ils traduisent la médiation historique de l’Église. Le canon romain en particulier « est fait soit des paroles mêmes du Seigneur, soit des traditions des apôtres et des pieuses instructions des saints pontifes » (4). C’est une consolation de docilité filiale, pour un prêtre de rite latin, de savoir qu’il prie avec le même canon que saint Grégoire le Grand. C’est une grande sûreté doctrinale et une joie immense pour lui de s’effacer devant des rites utilisés au cours des siècles par de si nombreux saints, et de vivre des cérémonies qui ont sanctifiées des générations de fidèles. Il est très émouvant, par exemple, pour un dominicain, de savoir que les gestes et les paroles qu’il emploie en célébrant la sainte messe ont fait pleurer notre Père saint Dominique et le Docteur eucharistique saint Thomas d’Aquin. 

Conclusion

Oui, le rite rend sensible la vérité, le rite latin traditionnel souligne merveilleusement la vérité sur Dieu, sur l’homme et sur le sacrifice du Christ. Mais la vérité qui devient sensible, qu’est-ce que c’est, sinon la beauté ? Rendons grâces à Dieu de pouvoir « prier sur de la beauté ». Et remercions l’Église d’avoir, après une longue période de confusion et d’injustices, rendu « l’honneur qui lui est dû » (5) à ce rite qui a suavement et fortement porté, et qui portera encore, sans doute jusqu’à la Parousie, tant d’hommes, vers le mystère insondable du sacrifice du Christ.
RP Louis-Marie de BlignièresFondateur de la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier
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(1) Concile de Trente, Session XXII (17 septembre 1562), Décret sur le Sacrifice de la Messe : « Le Christ voulut laisser à l’Eglise, son épouse bien-aimée, un sacrifice qui soit visible (comme l’exige la nature humaine). Par-là serait représenté le sacrifice sanglant qui devait s’accomplir une fois pour toutes sur la croix, le souvenir en demeurerait jusqu'à la fin du monde, et sa vertu salutaire serait appliquée à la rémission de ces péchés que nous commettons chaque jour » (DS, n° 1740, cité par le Catéchisme de l’Église catholique, n° 1366). « La nature humaine est telle qu’elle ne peut facilement s’élever à la méditation des choses divines sans les aides extérieures. C’est pourquoi notre pieuse Mère l’Eglise a institué certains rites, pour que l’on prononce à la messe certaines choses à voix basse et d’autres à voix plus haute. Elle a aussi introduit des cérémonies, telles que les bénédictions mystiques, les lumières, les encensements, les vêtements et de nombreuses autres choses de ce genre, reçues de l’autorité et de la tradition des apôtres. Par-là serait soulignée la majesté d’un si grand sacrifice, et les esprits des fidèles seraient stimulés, par le moyen de ces signes visibles de religion et de piété, à la contemplation des choses les plus hautes qui sont cachées dans ce sacrifice » (DS, n° 1743).
(2) Concile de Trente, ibid., DS, n° 1745.
(3) Benoît XVI, Motu proprio Summorum Pontificum, du 7 juillet 2007, article 1.
(4) Concile de Trente, ibid., DS, n° 1745.
(5) Benoît XVI, Motu proprio Summorum Pontificum, du 7 juillet 2007, article 1.

22 septembre 2017

[Anne Le Pape - Présent] Una Voce au pèlerinage Summorum Pontificum

SOURCE - Anne Le Pape - Présent - 22 septembre 2017

Etaient présents à Rome, à l’occasion du pèlerinage Summorum Pontificum évoqué ci-contre, le président de la Fédération internationale Una Voce, Felipe Alanis Suarez, son vice-président et président d’Una Voce France, Patrick Banken, et notre ami Jacques Dhaussy, président d’honneur. En sus bien sûr de nombreux pèlerins.

Mais nous avons eu aussi l’occasion de rencontrer le délégué Una Voce du Japon, Shinsuke Yoshikawa, à la sortie de la messe de clôture de la Sainte-Trinité des Pèlerins. Il a répondu à nos questions dans un français parfait.
— Combien de personnes assistent-elles à la messe traditionnelle que vous organisez à Tokyo, et qui la célèbre ?
— Nous sommes environ cinquante. Cette messe est célébrée par le père Ikeda, de la Société de Saint-Paul. Les prêtres de cette Société ne sont en général pas très favorables au rite traditionnel, mais lui demeure un des rares qui utilisent cette forme liturgique. Seulement, il a 89 ans…
— Comment envisagez-vous l’avenir ?
— Nous nous sommes adressés à l’archevêque de Tokyo et lui avons demandé de nous aider, de nous procurer un prêtre et un endroit plus spacieux. En effet, la chapelle dont nous disposons actuellement s’avère trop petite.

Nous savons que l’Institut du Christ Roi Souverain Prêtre a un prêtre japonais, mais il réside actuellement aux Etats-Unis. Nous aimerions tant qu’il vienne au Japon !

A l’occasion de ma venue à Rome pour ce pèlerinage, j’ai parlé au cardinal Burke et à Mgr Pozzo. Si nous n’avons pas de réponse de l’archevêque de Tokyo, nous nous adresserons directement à la commission Ecclesia Dei.
— Les catholiques japonais se concentrent-ils toujours surtout à Nagasaki ?
— Nagasaki est en effet le centre de l’Eglise catholique au Japon, mais il se trouve aussi quelques sites dans le reste du pays, comme à Osaka.

Propos recueillis par Anne Le Pape

[Anne Le Pape - Présent] La messe traditionnelle : un trésor remis à l’honneur

Mgr Pozzo, le célébrant de
la messe du 16 septembre
à Saint-Pierre
(Photo : Philippe Vilgier)
SOURCE - Anne Le Pape - Présent - 22 septembre 2017

Magnifique édition du pèlerinage Summorum Pontificum, du 14 au 17 septembre dernier, pour les dix ans de la promulgation du motu proprio de Benoît XVI redonnant au rite traditionnel sa place au cœur de l’Eglise. Nombreux étaient les Instituts ecclésiastiques ayant tenu à apporter à apporter leur témoignage de reconnaissance. Nous ne pouvons les citer tous : retenons l’Institut du Bon Pasteur dont le supérieur, l’abbé Laguérie, était présent ; le père abbé du Barroux, Dom Louis-Marie, et celui de Fontgombault, Dom Pateau ; le père Emmanuel-Marie, père abbé de Lagrasse ; des dominicaines du Saint-Esprit (Pontcallec) ; l’abbé Berg, supérieur de la Fraternité Saint-Pierre ; des religieuses missionnaires attachées au diocèse de Toulon ; des moines de la Fraternité Saint-Thomas Becket ; sans oublier l’ordre de Malte.
     
Mais les mieux représentés étaient sans conteste la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier de Chéméré (seuls trois pères avaient dû rester sur place pour assurer la messe), et surtout l’Institut du Christ Roi Souverain Prêtre : avec une trentaine de chanoines et le séminaire au grand complet – à l’exception de quelques séminaristes ayant dû se rendre à la première messe de l’un de leurs jeunes prêtres en Allemagne – l’Institut, très remarqué, était là en force.

Les pèlerins eux-mêmes venaient du monde entier. Citons, dans les groupes les plus remarquables, non par leur importance quantitative mais pour leur courage à effectuer le déplacement, des catholiques de Hong-Kong et un groupe venant de Laponie suédoise.
Expression de notre reconnaissance
C’est avec la cérémonie des vêpres au soir du 14 septembre, à l’issue du colloque consacré au motu proprio du 7 juillet 2007 (colloque sur lequel nous reviendrons) que le pèlerinage lui-même commença, avec une courte présentation de l’abbé Barthe assurant le pape Benoît XVI de la vive affection des participants et soulignant le caractère « irréversible » du mouvement donné par ce motu proprio au nouvel essor de la messe traditionnelle, source de vocations.

Le lendemain, après un chemin de croix assuré par l’Institut du Bon Pasteur à Santa Maria in Campitelli, les pèlerins se rendirent à Santa Maria sopra Minerva pour assister à la messe célébrée par Mgr Wach, supérieur général de l’Institut du Christ Roi. La procession d’entrée, impressionnante, vit défiler l’Institut au grand complet, et la présence de la centaine de séminaristes soulignait leur reconnaissance envers Benoît XVI. La cérémonie, avec chants grégoriens assurés par l’Institut et chants polyphoniques par la capella Ludovicea, chœur romain fixé à La Trinité des Monts, fut une superbe illustration du sermon de Mgr Wach, prononcé avec feu, tout à la louange de la liturgie, « pont dressé vers le ciel », rappelant son origine, sa nature et son rôle magnifique et nécessaire. La liturgie, a rappelé Monseigneur, « est le travail à long terme réalisé par la grâce et excède pour ce motif le champ des sensations. Elle ne peut être considérée séparément de la vie théologale : elle en est le vecteur, l’instrument et la manifestation ».

Le cardinal Burke tint à assurer, par quelques phrases émouvantes, l’oraison funèbre du cardinal Carlo Caffara, décédé quelques jours plus tôt, alors qu’il était prévu qu’il célèbre la messe du lendemain. Il évoqua ce prince de l’Eglise en rappelant qu’il s’était offert tout entier au Christ.
Messe à Saint-Pierre
Le samedi 16, c’est par une adoration eucharistique conduite par les prêtres de la Fraternité Saint-Pierre que la procession solennelle dans les rues de Rome fut précédée. Celle-ci prit naissance à la Chiesa Nuova, paroisse de saint Philippe Néri, sur le corso Vittorio-Emmanuel II, et se déroula jusqu’à Saint-Pierre, en passant par le Pont des Anges. Selon l’un des organisateurs, ce furent plus de 2 000 pèlerins qui y prirent part, sans compter le clergé qui comptait au moins 300 membres, parmi lesquels l’Institut du Christ Roi, là encore, fut le plus présent. On remarquait dans la foule des drapeaux polonais, hongrois, brésilien, une belle banderole allemande qui remerciait Benoît XVI et, bien sûr, un drapeau italien, d’ailleurs frappé du Sacré-Cœur. Les Français, nombreux, ne portaient pas de signes distinctifs.

Un message du pape François adressant ses « pensées cordiales et ses vœux les meilleurs aux pèlerins qui gardent vivante dans l’Eglise l’antique liturgie » fut lu au début de la cérémonie. « Que leur venue jusqu’au siège de Pierre rende fervente leur adhésion au Christ et leur donne un nouvel élan pour la profession de leur foi catholique et le témoignage de leur charité fraternelle », ajoutait le pape.

C’est Mgr Pozzo, secrétaire de la commission pontificale Ecclesia Dei, qui célébrait. Il salua Benoît XVI pour avoir rendu à l’Eglise la forme antique du rite romain. Il n’hésita pas à évoquer la grave crise liturgique que nous traversons. Selon lui, ce n’est pas le manque de vocations ou de messes que nous devons déplorer le plus, mais ce signe d’une crise inédite jusqu’à nos jours : la perte de la foi en l’Eucharistie, en la présence réelle.
Rendre sensible la vérité
Le dimanche 17 septembre, la messe de clôture du pèlerinage avait lieu à La Sainte-Trinité des Pèlerins, non loin du palais Farnèse. L’église était trop petite pour contenir tous les assistants. Le père Dominique-Marie de Saint-Laumer, prieur général de la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier, célébrait dans le rite dominicain – car le rite traditionnel peut lui aussi s’enorgueillir d’une certaine « diversité » – , mais c’est le père de Blignières qui prêcha, s’appuyant sur la phrase : « Le rite rend sensible la vérité. » La vérité sur Dieu : un nouvel assistant au rite traditionnel est frappé par l’ambiance sacrée, la disposition, le lieu réservé aux ministres, l’orientation, le mystère du « Canon » etc. ; il sent la confiance avec laquelle les participants adressent leurs prières à leur Père des cieux. La vérité sur l’homme qui, laissé à lui-même, est perdu et ne trouve pas de sens à la vie ni d’explication au scandale du mal ; parlant d’expérience, le père de Blignières a témoigné combien les convertis étaient touchés par le besoin de rédemption du pécheur. Enfin, la vérité sur le Christ, passage entre l’homme et Dieu, la messe étant véritablement sacrifice propitiatoire pour le salut des hommes. Rappelant que les prières du Canon romain avaient été déclarées « pures de toute erreur » par le concile de Trente, le prédicateur a rappelé que cette messe, qui a fait pleurer saint Dominique et saint Thomas d’Aquin, offrait une grande sûreté doctrinale au prêtre.

Après une période de confusion et d’injustice, a-t-il conclu, rendons grâce à l’Eglise d’avoir redonné place à ce rite qui a conduit et conduira tant d’hommes vers le Christ. Conclusion qui résume bien toute l’âme de ce pèlerinage d’action de grâce.

Anne Le Pape