31 juillet 2009

[Benoit et moi] Apcom interview Mgr Fellay : Pressions sur le Saint-Siège contre nous

SOURCE - 31 juillet 2009 - original italien par Apcom

Menzingen, 31 juillet
Le début des entretiens avec le Vatican en automne, une forte critique contre les juifs (« qu'ils nous laissent en paix »), et l'impression que la communauté juive conditionne lourdement le Saint-Siège. Et aussi : le concile sur le point d'être « surmonté » et l'espoir d'avoir bientôt une « prélature » ; les divisions qui existent aussi au sein de l'Église de Rome et l'annonce que Mgr Richard Williamson ne sera pas expulsé. Sans oublier les attaques contre l'Osservatore Romano, qui ne doit pas s'occuper de thèmes comme Michael Jackson, Calvin ou Harry Potter, à côté d'une impression très positive du Pape Benoît XVI, « personne intègre et attentive au bien de l'Église ».
Une interview sur tous les sujets que Mgr Bernard Fellay, supérieur des lefebvristes, concède à Apcom, dans la maison-mère de la Fraternité Saint-Pie X à Menzingen, dans la province de Zoug (près de Zurich), un des 26 cantons de la Suisse.
Entièrement plongée dans le vert de la campagne suisse, entre les vaches et le son des cloches de l'église, le quartier général des lefebvristes se présente avec le panneau : « Priester Bruderschaft St. Pius X - Generalhaus ». Dans la pièce où reçoit Mgr Fellay, une photo de Marcel Lefebvre et une du Pape. « Bien sûr, il y a aussi la photo du Pape, nous sommes catholiques nous aussi », s'exclame le supérieur devant notre surprise de voir une image du Pontife.

Question: Le Pape se trouve au Val d'Aoste pour passer une période de repos. Vous vous trouvez à deux pas de chez lui. Avez-vous eu quelque contact, ou y a t'il a eu une quelquonque liaison entre son entourage et vous ?

Réponse : Non, absolument non. Il n'y a pas eu de contact. Pendant les vacances, nous devons laisser le Pape en paix. Les choses se poursuivent avec le Vatican, avec les personnes responsables des entretiens. Mais nous n'avons pas dérangé le Pape. Ce sont ses vacances.

Q : Mgr Fellay, est-il prévu que vous vous rendiez à Rome prochainement ? Le début des entretiens a t'il été fixé ? Et avez-vous déjà pensé à la composition de votre commission ? Combien de personnes ?
R : Aucune date n'a encore été fixée pour le dialogue, mais nous pouvons présumer qu'il aura lieu en automne. Je viendrai à Rome à ce moment, mais il n'y a encore rien de précis. La Commission est déjà formée de 3-4 personnes, mais nous ne pouvons pas encore fournir les noms, également pour éviter toute pression.

Q : Considérez-vous qu'au Vatican il y a une sensibilité excessive vis-à-vis des attentes du monde juif, sur « l'affaire Williamson » ainsi que sur la prière du vendredi saint ?
R : Oui, je le pense. Je suis moi-même embarrassé - sans parler de ce qui s'est passé sur l'affaire de Mgr Williamson - lorsque je vois les juifs qui s'occupent des affaires de l'église catholique. Ce n'est pas leur religion. Qu'ils nous laissent en paix. Ce sont des questions qui concernent l'église catholique. Si nous voulons prier pour les juifs, nous prierons pour les juifs, de la manière que nous voulons. Je ne sais pas si ils prient pour nous, mais je dirais que c'est leur problème.

Q : Donc, le Pape et le Vatican subissent des pressions du monde juif ?
R : Certainement. C'est un thème extrêmement délicat, brûlant, et je pense que nous devons sortir de ce climat qui n'est pas bon. Il y a eu un malheureux concours d'évènements qui n'aurait jamais dû arriver. Dans ce contexte, on peut comprendre la colère des juifs, je la comprends et je déplore ce qui s'est passé.

Q : Dans le motu proprio « Unitatem ecclesiam » le Pape considère que « les questions doctrinales, évidemment, demeurent et jusqu'à ce qu'elles soient clarifiéess, la Fraternité n'a pas de statut canonique dans l'Église et ses ministres ne peuvent exercer de manière légitime aucun ministère ». Qu'en pensez-vous ?
R : Je pense qu'il n'y a pas grande-chose de changé. Ce qui a changé, c'est que cette nouvelle disposition concentrera nos relations sur les questions doctrinales. Mais ce n'est pas un changement, c'est un processus en route, que nous avions déjà demandé en 2000 ; nous avançons. Ce qu'écrit le Pape est dans la ligne du discours habituel de Rome, depuis 76, ce n'est donc pas nouveau. Nous avons une position claire que nous défendons depuis longtemps et que nous maintenons, même si nous sommes en opposition avec cette loi, il y a des raisons sérieuses qui justifient le fait d'exercer légitimement ce ministère. Ce sont les circonstances dans lesquelles se trouve l'église que nous appelons « état de nécessité ».
Par exemple lorsqu'une grande catastrophe frappe un pays, la structure ordinaire est mise hors d'usage, le système se retrouve en crise, et alors tous ceux qui le peuvent apportent leur aide. Et donc ce n'est pas notre volonté personnelle, mais le besoin des fidèles qui nécessite l'aide de tous ceux qui peuvent aider.
Et cet état de nécessité est suffisamment généralisé dans l'Eglise - il y a certainement quelques exceptions - pour pouvoir assurer, consciemment, l'exercice légitime de l'aspostolat

Q : Quel statut juridique souhaitez-vous pour la Fraternité Saint-Pie X ? Une prélature, une société de vie apostolique, autre chose ?
R : Cela dépendra évidemment de Rome, qui est l'autorité qui décide de cette structure. Leur perspective est la volonté de respecter au maximum la réalité concrète que nous représentons. Mon espoir est que nous serons suffisamment protégés dans l'exercice de l'apostolat pour pouvoir faire du bien, sans être empêchés dans l'action par des raisons juridiques. Le souhait est une prélature, même si je n'ai pas de préférence. Sur le timing je ne peux pas m'exprimer, tout dépend de Rome.

Q : Pour Williamson, le Concile Vatican II est un gâteau empoisonné qui doit être jetée à la poubelle, pour Tissier de Mallerais, le Concile doit être annulé, et pour Alfonso de Gallareta il n'y a pas grand chose à sauver du Concile; y a t'il une scission au sein de la Fraternité Saint-Pie X ? Comment pensez-vous la résoudre ? Le Vatican soutient qu'à l'intérieur de la Fraternité, il y a des divisions.
R : Je me permets de dire que je ne vois pas non plus d'union au Vatican. Le problème dans l'Eglise d'aujourd'hui ne vient pas de nous. Nous devenons un problème seulement parce que nous disons qu'il y a un problème. En outre, même si nous pouvons avoir l'impression de déclarations opposées ou même contradictoires, il n'y a pas de fracture interne chez nous. Par exemple sur le Concile, nous pouvons dire que presque tout est à rejeter. Mais d'un autre côté, nous pouvons dire qu'on peut essayer de sauver ce qui peut l'être. Mais nous ne pourrons jamais dire tous la même chose. Le Concile est un mélange: il y a du bon et du mauvais. Le Pape aussi lorsqu'il soutient qu'il faut une herméneutique de la continuité, qu'il ne il faut pas une rupture, refuse le Concile interprété comme rupture.

Q : Mgr Williamson est-il un problème ?
R : Il est un problème totalement marginal. Ce qu'il a dit n'a rien à voir avec la crise de l'église, avec le problème de fond que nous traitons 30 ans après le Concile, c'est une question historique. La question de savoir combien et comment les juifs sont morts n'est une question de foi, même pas une question religieuse, c'est une question historique. Évidemment je suis convaincu qu'il n'a pas traité ce thème comme il aurait dû et je prends mes distances. Mais sur les positions religieuses de la Fraternité par rapport au Concile je ne vois pas pas de problèmes avec Williamson.

Q : Williamson dit que le Concile est un "gâteau empoisonné à jeter à la poubelle". Cela ne vous semble t'il pas une phrase un peu forte ? Etes-vous d'accord ?
R : C'est une phrase polémique, mais je ne la condamne pas. Beaucoup de déclarations aujourd'hui sont faites sur le mode polémique, c'est une provocation pour tenter de faire réfléchir les gens. J'exprimerais le concept différemment, mais je ne sais pas si je ne suis pas d'accord. Si j'exprimais le concept autrement, je dirais que nous devons dépasser le Concile pour revenir à ce que l'Eglise a toujours enseigné et dont l'Eglise ne peut pas se séparer et qu'à un moment donné nous devrons dépasser le Concile qui s'est voulu pastoral et non doctrinal. Qui a voulu s'occuper de la situation contingente de l'église. Mais les choses changent, et beaucoup de points du Concile sont déjà dépassées...

Q : L'évêque Williamson avait promis de rester silencieux et il continue de parler : sera-il sanctionné ? S'il continue à soutenir qu'aucun compromis avec Rome sur le Concile n'est possible, sera t'il expulsé ?
R : Il n'est pas vrai que Williamson parle souvent. C'est très rare… une fois il a dit quelque chose… et ensuite nous ne lui avons pas demandé de se taire sur tout. Le domaine sur lequel nous lui avons demandé le silence était très limité. Il s'est agi de sa part d'une sortie momentanée. Je la minimise au maximum… c'est peu de chose… sur le moment, je ne vois aucune raison d'expulsion. Cela dépend de lui, de la situations dans laquelle il s'est mis. Pour le moment, il y a un processus en cours, qui a sérieusement endommagé sa réputation, je n'imagine à présent rien de plus que la situation dans laquelle il est déjà. Cela dépendra de ce qu'il dira. Il est déjà suffisamment puni, mis à l'écart, sans aucune charge.

Q : Et sur le Concile, accepterez-vous un compromis avec Rome ?
R : Nous ne devons faire aucun compromis sur le Concile. Je n'ai nulle intention de faire un compromis. La vérité ne supporte pas de compromis. Nous ne voulons pas de compromis, nous demandons la clarté sur le Concile.

Q : Les récentes ordinations de prêtres ont été vus comme une provocation: ne valait-il pas mieux les éviter, en cet instant délicat ?
R : Cela n'a pas été une provocation. Plusieurs évêques ont profité de l'occasion pour crier à la provocation. Mais ni pour Rome ni pour nous cela n'a été une provocation. C'est comme enlever la respiration à une personne. Nous sommes une societé sacerdotale dont l'objectif est de former des prêtres. Et donc empêcher l'acte ultime de formation qui est l'ordination est comme empêcher à quelqu'un de respirer. D'autre part, il a été toujours prévu et nous avons toujours su qu'en révoquant l'excommunication, on a créé une situation nouvelle qui est meilleure que la précédent mais pas parfaite. Il est donc normal de poursuivre nos activités, et donc aussi les ordinations.

Q: L'Osservatore Romano a parlé de Calvin, Michael Jackson, Harry Potter, Oscar Wilde. Qu'en pensez-vous?
R: Je me pose la question: est-ce vraiment le rôle de l'Osservatore Romano de s'occuper de ces choses? C'est la première question. Et la seconde est: ce qu'ils disent sur ces gens, est-ce vraiment la chose juste? J'ai un regard plutôt critique sur ces présentations.

Q: Pensez-vous qu'avec ce Pape, on puisse finalement arriver à une conclusion, dans cette vieille question des lefebvristes?
R: Je crois qu'il y a certainement un bon espoir. ... Il y a 40 ans que nous sommes dans cette situation, et pas pour des questions personnelles, mais vraiment pour des choses sérieuses qui touchent la foi et le futur de l'Eglise. Nous voyons certainement chez le Pape une volonté authentique d'aller au fond du problème, et cela, nous l'accueillons avec une grande satisfaction. Nous prions, et nous espérons qu'avec la grâce du Bon Dieu, nous arriverons à quelque chose de bon pour l'Eglise et pour nous..

Q: Que pensez-vous de Benoît XVI?
R: C'est une personne intègre, qui prend très au sérieux la situation et la vie de l'Eglise.

"Une opinion sur l’Action Française" (Berto) et "Pourquoi Pie XI a-t-il condamné l’Action française?" (Chiron/Poulat)

Vient de paraître :


Abbé V.-A. Berto

Une opinion sur l’Action Française

L’abbé Victor Berto (1900-1968), docteur en philosophie et docteur en théologie fut tour à tour vicaire de paroisse, professeur de séminaire, fondateur d’œuvres pour l’enfance (les Foyers Notre-Dame de Joie) et de la fraternité des Dominicaines du Saint-Esprit. Il fut aussi un des fondateurs de La Pensée catholique et le théologien de Mgr Lefebvre au concile Vatican II. En avril 1968, il publia, dans Itinéraires, un important article, « Une opinion sur l’Action française ». Cette analyse catholique, trop peu connue, même des historiens de l’Action française, méritait d’être rééditée.

Éditions BCM, 26 pages, 5 euros
ISBN 978-2-918361-00-8


Yves Chiron – Émile Poulat

Pourquoi Pie XI a-t-il condamné l’Action française ?

La condamnation de l’Action française, en 1926, a provoqué une crise majeure dans l’Église de France. Cette condamnation a été interprétée par Maurras et l’Action française comme une condamnation politique tandis que les libéraux et les démocrates-chrétiens y ont vu une légitimation de leur opposition au mouvement monarchiste. Yves Chiron, par une lecture critique, puis Émile Poulat, par une étude inédite et qui va aux principes, montrent ce qui était en cause : la sécularisation du politique.

Yves Chiron, directeur du Dictionnaire de biographie française, auteur d’une Vie de Maurras (1999) et de diverses études sur le fondateur de l’Action française. Il a publié aussi la biographie de plusieurs papes, notamment Pie XI (Perrin, 2004).

Émile Poulat, directeur d’études à l’École des Hautes Études en Sciences sociales. Il a publié plus d’une trentaine d’ouvrages, notamment Intégrisme et catholicisme intégral (1969), Une Église ébranlée. 1939-1978 (1980), L’Église, c’est un monde (1986), France chrétienne, France laïque avec Danièle Masson (2008).

Éditions BCM, 70 pages, 11 euros
ISBN 978-2-918361-01-5


Pour commander « Une opinion sur l’Action française » (5 euros port compris) ou « Pourquoi Pie XII a-t-il condamné l’Action française ? » (11 euros port compris), adresser un chèque à « Association Anthinéa », 16 rue du Berry – 36250 NIHERNE – France, en précisant ses nom, prénom, adresse.

[Antoine] Oui, ce que dit l'Abbé de T. dans son post bouillant, ou bouillonnant...

31 juillet 2009
Antoine est un lecteur attentif de l'abbé de Tanoüarn. Il commente le texte que celui-ci a récemment publié sur son MetaBlog.
Oui, ce que dit l'Abbé de T. dans son post bouillant, ou bouillonnant, "makes sense" comme disent les anglophones ! C'est cohérent et théologiquement évident, ce me semble ! Je vais me permettre de le reformuler (même si c'est très mal élevé !) avec mon propre prisme ou mes propres obsessions en partant de l'exemple sur les modernistes.

Effectivement, certains modernistes avaient cru pouvoir se passer d'une doctrine prise au pied de la lettre, ou pouvoir se passer de la lettre de la doctrine, pour n'en garder que l'esprit... A contrario, les "intégristes" ont souhaité les contrer en s'en tenant à la stricte doctrine traditionnelle appliquée de façon rigoureuse et au Iota près (Iota unum !)... Qui a raison ? Ce n'est pas moi mais St Paul qui a dit : "la lettre tue mais l'esprit vivifie"... Et il ajoute "c'est l'esprit qui vous rend libres et vous fait enfants de Dieu"... Ainsi, l'Ecriture semble donner raison aux modernistes ! Pourtant, si l'on pouvait se contenter de l'Esprit et se passer de la lettre, ce serait les Protestants qui auraient raison en définitive ! Et on ne voit pas pourquoi le Christ serait venir accomplir la loi en refusant explicitement de l'abolir... La loi textuelle est toujours en vigueur, même si sa lettre prise isolément a un pouvoir destructeur...

C'est bien là la réponse : la lettre ne peut être isolée, ne peut être détachée de l'Esprit... C'est la lettre sans l'Esprit qui tue et l'Esprit vivifie la lettre pour que, une fois qu'elle a pris vie par le souffle de l'Esprit, elle puisse devenir la nourriture du catholique puisque la Parole de Dieu est notre nourriture.

C'est Benoît XVI qui explique très bien cela dans son magnifique discours des Bernardins : "la parole de Dieu n'est jamais présente dans la seule littéralité du texte" ... "l'Ecriture a besoin de l'interprétation"... "car le christianisme n'est pas seulement une religion du livre"... "la lettre tue et l'Esprit vivifie" et "l'Esprit rend libre et nous montre le chemin"... Bref, son développement est clair, aveuglant : il montre l'incapacité de l'homme à appréhender la Parole de Dieu à partir de la seule littéralité, de la seule lettre, de la Bible... C'est bien par une action "pneumatique" (du Saint Esprit qui est souffle, pneuma en grec) exogène que le chrétien peut arriver à se nourrir de cette parole, à la comprendre, à s'y conformer et à se laisser porter par elle... En qq mots, le Pape dit tout du mystère de l'Eglise, de la Grâce et aussi de la Foi.

Du coup, il explique pourquoi : car c'est paradoxalement par la liberté que donne l'Esprit "qu'une limite claire est mise à l'arbitraire et à la subjectivité" mais c'est aussi de cette façon qu'on ne tombe pas dans le "fanatisme fondamentaliste" d'une lecture littérale des textes... Voilà indiqués les chemins que ne doivent pas prendre les modernistes (subjectivité) ni les intégristes (fondamentalisme) ! Le Pape explique que c'est cette attitude, grâce au monachisme, qui est le fondement de la culture européenne : bel exercice de style à plusieurs niveaux puisqu'il fonde la culture européenne dans le "quaerere Deum", la recherche de cet Esprit qui donne vie à la lettre et qui complète donc l'étude des textes (et l'on voit ici toute l'importance de la complémentarité entre l'étude et la prière, l'une ne va pas sans l'autre et inversement : il ne sert à rien d'étudier si l'on ne prie pas mais il ne sert à rien de prier si l'on n'étudie pas -St Pie X a rappelé l'importance pour chaque catholique d'étudier au moins son catéchisme-), il efface toute la logique protestante et anglo-saxonne du libre examen, réfute le fondamentalisme coranique mais nous donne aussi la grille de lecture (c'est le cas de le dire !) nécessaire pour comprendre la place et le rôle de l'Eglise : interpréter l'Ecriture, la lettre, pour lui donner vie, être le signe tangible et concret de l'action pneumatique de Dieu qui est l'action permanente du Saint Esprit... Il coupe ainsi court aux dérives modernistes et traditionalistes : certes il y a les textes ; certes, il y a l'action du Saint Esprit, mais on ne peut s'en tenir seulement aux uns ou à l'autre : c'est le cumul des deux qui fonde la foi, non ? Une connaissance des textes de la Révélation vivifiée, qui prend vie, par le Saint Esprit car une foi sans l'Esprit est une foi morte, pour paraphraser St Jacques ?...

Mais St Paul a sans doute voulu aller au-delà de cette simple complémentarité entre lettre et esprit... La lettre tue car non seulement nous ne sommes pas une religion du Livre mais tout au contraire nous sommes une religion de l'oralité ! Ce que Dieu nous ordonne, en parlant de son Fils, c'est "Ecoutez-Le" et la Ste Vierge Marie à Cana appuie cet ordre de son conseil "Faites tout ce qu'Il vous dira"... Ainsi, c'est l'écoute, et non la lecture qui est essentielle ! Et finalement, pour un catholique, il est indispensable d'écouter Dieu et donc de s'offrir à son activité pneumatique à la fois pour recevoir la parole de Dieu, mais aussi pour bénéficier de la vie que le St Esprit donne à cette parole... L'Esprit a sûrement une double action : il apporte la Parole et il vivifie la lettre... C'est d'ailleurs le propre d'une parole que d'être offerte prioritairement à l'écoute, et non à la lecture ! La lecture n'est qu'une retranscription et l'écrit ne saurait à lui seul constituer et restituer la Parole vraie vivante, le Logos qui est Dieu. Et nous devons recevoir cette Parole avec notre coeur et l'y garder, ce que nous ne pouvons faire avec un écrit... Donc la Parole, ce ne peut être l'écrit tant qu'il n'a pas reçu la vivification de l'Esprit ? (je dérive, emporté par la méditation !)

Mais pour ne pas tomber dans le subjectivisme, il ne suffit pas de se laisser individuellement envahir par le souffle de l'Esprit pour parvenir à une compréhension satisfaisante de la lettre de l'Ecriture et de la loi. C'est nécessaire de se laisser remplir du Saint Esprit et du feu de son amour avant d'étudier mais insuffisant... Sinon, on ne répond pas à la problématique de la subjectivité et de l'interprétation personnelle. Certains estiment qu'il y a un sens obvie, évident, des textes. Depuis le temps ça se saurait ! Chacun a sa propre interprétation, son herméneutique individuelle : et même les tables de la Loi, même le Notre Père, peut-être les deux textes parmi les plus simples de l'Ecriture, ont donné lieu à des interprétations diverses dans lesquelles chacun revendique l'action de l'Esprit mais où rares sont les personnes qui peuvent individuellement apporter une garantie divine... Cela vaut aussi pour les textes des Papes d'avant le concile comme pour ceux d'après !

Alors qui, ou que, devons-nous écouter au quotidien pour rester attentif au Christ qui nous parle, dont nous devons faire ce qu'Il nous dit, sans tomber dans l'interprétation personnelle, la révélation privée, dans la subjectivisme et le libre examen ? C'est évidemment l'Eglise et son magistère selon l'ordre du Sauveur au sujet de ses Apôtres : "qui vous écoute, M'écoute". C'est l'Eglise, mère et maîtresse, qui est la bouche du Christ au quotidien, jour après jour, pour parler d'une façon qui soit la même pour tous, intelligible par tous à toutes les époques, de façon à préserver l'unité du Peuple de Dieu, tout au long de la vie de l'Eglise. On ne peut donc avoir la foi si l'on n'accepte pas de se soumettre au magistère de l'Eglise au quotidien... Car si l'on n'accepte que le "magistère passé " (d'avant le concile, pour faire court !) on retombe dans l'interprétation subjective de la lettre, sans avoir la certitude, malgré ce qu'on pense être le sens obvie, que sa compréhension soit effectivement celle de l'Eglise et donc celle que le Christ veut nous donner.

D'ailleurs, les Papes ont toujours rappelé que le Magistère s'exerce "de vive voix" et au quotidien. Encore une fois, l'Eglise catholique transmet toujours la Parole oralement ! Benoît XVI le souligne aujourd'hui, mais ces prédécesseurs ont dit la même chose en commençant par son fondateur NSJC (qui vous écoute, M'écoute) et plus récemment Léon XIII dans Satis Cognitum ou Pie XI dans Mortalium Animos... Par là même occasion, le simple rappel de ces évidences coupe l'herbe sous le pied du sédévacantisme : jusqu'à la fin du monde, il sera possible d'entendre et d'écouter le Christ parlant par la vive voix de son Eglise, et pas un magistère ténu et éparpillé ou mort, car le magistère de l'Eglise, c'est un magistère vivant, s'exprimant avant tout par le Pape, puis à travers les évêques qui sont en communion avec lui. On ne peut remettre en cause l'indéfectibilité de l'Eglise qui est avant tout une indéfectibilité de son magistère... Cela coupe aussi l'herbe sous le pied de ceux qui s'imaginent pouvoir interpréter un magistère pré-conciliaire en l'opposant au post-conciliaire : il n'y a qu'une herméneutique possible de l'ensemble de ce magistère, c'est celle qui est donné "de vive voix" par le Pape régnant et répétée par les évêques affichant leur communion (pas seulement juridictionnelle !...) avec le pape et les prêtres s'inscrivant dans cette hiérarchie...

Et ce sera comme cela jusqu'à la fin du monde, selon la promesse du Christ "je suis avec vous jusqu'à la fin des temps", selon l'interprétation obvie (!) qui est donné de cette phrase par les deux encycliques pré-citées et selon la réalité des faits, telle qu'elle se déroule sous nos yeux au sein de l'Eglise.

Alors le Magistère de l'Eglise parle et il suffit de l'écouter, de le recevoir dans son coeur, car son expression est la Parole... C'est pour cela qu'il nous est toujours demandé un assentiment religieux de la volonté et de l'intelligence (l'Eglise est une vraie mère : d'abord un assentiment de la volonté, puis de l'intelligence : chacun fait avec ce qu'il a, comme on a pu le constater lors de récents débats !...) pour toute expression du magistère. Ce n'est pas seulement lorsque ce magistère s'exprime selon les formes officielles de l'infaillibilité que le catholique doit le recevoir. Ainsi, la nouvelle encyclique doit bénéficier de ce traitement qui n'est pas un traitement de faveur, mais le comportement instinctif, viscéral (!) que doit adopter un catholique lorsque la magistère de l'Eglise s'exprime, en particulier par la voix du Pape. D'autant plus que le sujet traité touche à l'organisation de la société, donc à ses moeurs... Et qu'en ce domaine, la voix de l'Eglise est plus que parfaitement autorisée...

Pour revenir à un registre polémique dans lequel je suis malheureusement plus à l'aise, je dois avouer que je suis, dès lors, totalement indifférent aux commentaires d'un quelconque Abbé, fût-il directeur d'un institut universitaire... Cet abbé est d'autant moins la voix du magistère qu'il semble confondre le mot et l'idée puisqu'il estime qu'un document qui étudie les moyens de faire régner sur la société universelle la Vérité et l'Amour du Christ ne traiterait pas de la royauté sociale de NSJC ! Il semble aussi prendre pour de l'indifférentisme le fait d'envisager la contribution possible des différentes religions à la paix sociale en imaginant qu'une telle possibilité remettrait en cause le fait que l'Eglise catholique soit la seule arche de salut ! Une telle confusion des concepts et des idées démontre à l'envi que cet abbé ne peut en aucun cas se revendiquer du magistère de l'Eglise. Il n'en est pas une voix et son avis n'engagerait que lui s'il n'engageait aussi sa Société en en démontrant en l'occurrence la grande légèreté intellectuelle et doctrinale...

Il en va de même pour un évêque dont Mgr Lefebvre a lui-même explicitement indiqué lors de son sacre, qu'il n'était pas donné à l'Eglise pour enseigner mais pour transmettre les sacrements. En effet, comment un évêque qui n'est pas en communion parfaite avec le Pape pourrait se revendiquer du magistère de l'Eglise ? C'est chose impossible et la réalité des faits à travers l'analyse des propos tenus par cet évêque nous prouve, ô combien, que ses propos ne peuvent être confondus avec la voix de l'Eglise et qu'à lui ne s'applique malheureusement pas, pour le moment, le "qui l'écoute, M'écoute" de Notre Seigneur...

Quant aux pères-roquets de certain forum qui se contentent d'occuper et de marquer le terrain en psalmodiant les mantras que d'autres leur ont transmis, ils feraient mieux d'étudier et de prier car on ne peut transmettre que lorsqu'on reçoit et l'on ne reçoit que lorsqu'on s'ouvre à la Parole, à Dieu... "Parlez, Seigneur, car votre serviteur écoute"... C'est tout de même plus intelligent et plus constructif que de vociférer pour meubler, pour éviter que les propos de "l'adversaire" ne puissent aider à la réflexion et à la méditation en Dieu... Surtout quand cet "adversaire" a démontré que sa science ne le remplissait pas de certitudes mais l'aidait au contraire à approfondir la Parole pour en faire une nourriture toujours plus riche et plus féconde de nos intelligences, de nos esprits, de nos âmes et sans doute de nos corps car la saine Doctrine a sûrement des effets physiologiques que nous ignorons !...

Et en conclusion, je dirai "vive internet" qui nous permet d'écouter l'Eglise qui nous parle "de vive voix" en ayant accès aux propos mêmes du pape et du magistère de l'Eglise, sans se laisser abuser par un journal en mal de sensations, par un théologien en rupture de ban ou par je ne sais quel évêque allemand n'ayant conservé qu'une communion purement imaginaire avec le successeur du Prince des Apôtres !

PS : ces propos n'engagent que moi et sont émis "salvo melior judicio", bien évidemment !

Antoine

28 juillet 2009

[Jeanne Smits / Présent] Benoît XVI ne propose pas un gouvernement mondial!

SOURCE - mis en ligne sur le Forum Catholique - Présent du mardi 28 juillet 2009

La mondialisation vue par
“Caritas in veritate”

Benoît XVI ne propose pas un gouvernement mondial !

Jean Madiran l’a montré dans ses éditoriaux dans nos numéros de vendredi et samedi : en demandant la mise en place d’une « véritable autorité mondiale » au service du « bien commun mondial », l’encyclique Caritas in veritate n’invente rien. Ne révolutionne rien. C’est une erreur de lecture, et une erreur de perspective, que d’imaginer Benoît XVI en train de donner un blanc-seing à un quelconque « gouvernement mondial », comme ont voulu le croire des critiques trop hâtifs qui ont réagi à des mots, voire à la présentation de ces mots par une presse maniant habilement les coups de ciseaux dans le texte papal. Si bien que les instances internationales qui auraient pu se gausser publiquement d’un concours aussi prestigieux au service de leurs objectifs n’en ont rien fait.

Vu la présentation très partielle et partiale qu’en a faite la grande presse, il importe de revenir au texte de l’encyclique, gardant à l’esprit sa mise en lumière et en perspective proposée par Jean Madiran.

Le point de vue de l’Eglise tel qu’il est présenté par Benoît XVI part d’un constat : la « mondialisation » vue comme l’interdépendance croissante des nations et la facilitation, parfois vertigineuse, de toutes les formes de communication et de circulation. Mondialisation « ni bonne ni mauvaise » en elle-même, puisque sa valeur et ses normes ne viennent pas d’elle-même mais dépendent de la conscience et de la responsabilité humaine. Mais mondialisation source de « dysfonctionnements » spécifiques et révélatrice, dans l’interdépendance nouvelle des nations, de questions qui bien plus qu’autrefois ne peuvent pas relever de l’intérêt propre d’un seul Etat contre un autre.

Bref, loin de voir dans la mondialisation un bien nécessaire qui permettra à l’homme de trouver un bon développement grâce à la gestion commune de la planète, Benoît XVI en souligne certes les aspects potentiellement positifs, mais reste sur un constat d’un réel pessimisme. Voilà le monde réel qui nous entoure, semble-t-il dire : dans cet état de fait, comment pouvons-nous espérer le rendre plus humain, du seul humanisme qui tienne ? « L’humanisme qui exclut Dieu est un humanisme inhumain », conclut-il sans ambages dans le paragraphe de conclusion de l’encyclique.

Contre la primauté de l’économie

Le constat est d’abord celui de la perte de souveraineté des Etats : le Pape l’affirme au § 24 sans s’en réjouir :

« A notre époque, l’État se trouve dans la situation de devoir faire face aux limites que pose à sa souveraineté le nouveau contexte commercial et financier international, marqué par une mobilité croissante des capitaux financiers et des moyens de productions matériels et immatériels. Ce nouveau contexte a modifié le pouvoir politique des États. »

Tout au long de Caritas in veritate, Benoît XVI ne ménage pas ses critiques face à ce pouvoir financier dont le moteur est l’avidité et le carburant l’activité humaine inhumainement exploitée en de nombreux cas, faute de respect du bien des hommes et du bien commun des hommes. Si bien qu’il annonce, toujours au § 24 :

« Aujourd’hui, fort des leçons données par l’actuelle crise économique où les pouvoirs publics de l’État sont directement impliqués dans la correction des erreurs et des dysfonctionnements, une évaluation nouvelle de leur rôle et de leur pouvoir semble plus réaliste; ceux-ci doivent être sagement reconsidérés et repensés pour qu’ils soient en mesure, y compris à travers de nouvelles modalités d’exercice, de faire face aux défis du monde contemporain. »

Bien loin de souhaiter la disparition des Etats ou leur solution dans la grisaille d’un super-Etat mondial, Benoît XVI voit plutôt leur responsabilité et leur rôle s’accroître. Sans excès toutefois. On n’oubliera pas ces quelques lignes savoureuses sur les systèmes étatisés de sécurité sociale qui déresponsabilisent les hommes (au § 60). Le Pape y invite les Etats à réviser « leurs politiques intérieures d’assistance et de solidarité sociale, y appliquant le principe de subsidiarité et créant des systèmes de protection sociale mieux intégrés, qui favorisent une participation active des personnes privées et de la société civile » :

« De cette manière, il est même possible d’améliorer les services sociaux et les organismes d’assistance et, en même temps, d’épargner des ressources en éliminant le gaspillage et les indemnités abusives, qui pourraient être destinées à la solidarité internationale. Un système de solidarité sociale plus largement participatif et mieux organisé, moins bureaucratique sans être pour autant moins coordonné, permettrait de valoriser de nombreuses énergies, actuellement en sommeil, et tournerait à l’avantage de la solidarité entre les peuples. »

Cela répond à la logique de responsabilité qui est celle du texte pontifical : une responsabilité qui doit se déterminer toujours par rapport à la « charité dans la vérité ». Voilà pourquoi, finalement, il n’y est pas question de solutions toutes faites et d’impératifs universels. Le Christ Lui-même ne tonnait pas contre l’esclavage ; c’est sa loi de charité envers le prochain, chaque prochain qui a eu raison de cette appropriation de l’homme par l’homme.

Responsabilité et subsidiarité

Voilà qui permet aussi à Benoît XVI de condamner explicitement toute confiscation des pouvoirs légitimes des Etats au profit d’un super-Etat :

« Pour ne pas engendrer un dangereux pouvoir universel de type monocratique, la « gouvernance » de la mondialisation doit être de nature subsidiaire, articulée à de multiples niveaux et sur divers plans qui collaborent entre eux. La mondialisation réclame certainement une autorité, puisque est en jeu le problème du bien commun qu’il faut poursuivre ensemble ; cependant cette autorité devra être exercée de manière subsidiaire et polyarchique pour, d’une part, ne pas porter atteinte à la liberté et, d’autre part, être concrètement efficace. » (§ 57)

Libre au lecteur de trouver ce texte trop abscons, ou trop dense, voire utopique. Mais en quoi ce souhait de voir réalisé le bien commun international serait-il plus naïf ou « idéaliste » que celui de le voir réalisé au niveau des échanges commerciaux, de la conduite de l’entreprise ou des relations entre les riches et les pauvres d’un pays donné ?

Le bien commun international

En réalité, les suggestions de Benoît XVI sont les réponses à une nouvelle réalité, comme Rerum novarum apportait une solution aux désordres très graves entraînés par la révolution industrielle. Qu’est-ce qui a donc changé pour qu’il soit question d’une « autorité politique mondiale » (§ 67) ? L’apparition de problèmes qui dépassent le niveau des nations :

— Il manque en effet une organisation des institutions économiques qui soit en mesure aussi bien de garantir un accès régulier et adapté du point de vue nutritionnel à la nourriture et à l’eau, que de faire face aux nécessités liées aux besoins primaires et aux urgences des véritables crises alimentaires, provoquées par des causes naturelles ou par l’irresponsabilité politique nationale ou internationale. (§ 27)

— La communauté internationale a le devoir impératif de trouver les voies institutionnelles pour réglementer l’exploitation des ressources non renouvelables, en accord avec les pays pauvres, afin de planifier ensemble l’avenir. (§ 49)

— Il est souhaitable que la communauté internationale et chaque gouvernement sachent contrecarrer efficacement les modalités d’exploitation de l’environnement qui s’avèrent néfastes. (§ 50)

De fait, nul n’ignore que l’accès à l’eau potable risque d’être l’une des grandes sources de conflit au XXIe siècle… Tout comme la question des migrations internationales, dont Benoît XVI montre ailleurs qu’elles ont été souvent provoquées et voulues, et pas pour le bien de tous. Sa réponse est caractéristique de sa pensée : cette question appelle, dit-il, « une politique de coopération internationale forte et perspicace sur le long terme » ; « elle doit s’accompagner de normes internationales adéquates, capables d’harmoniser les divers ordres législatifs, dans le but de sauvegarder les exigences et les droits des personnes et des familles émigrées et, en même temps, ceux des sociétés où arrivent ces mêmes émigrés ». Prendre en compte le bien de chacun, mais ne pas contredire les droits des Etats !

Ces Etats ne se ressemblent pas forcément et cela ne leur est pas demandé : « Il n’est pas nécessaire que l’État ait partout les mêmes caractéristiques : le soutien aux systèmes constitutionnels faibles en vue de leur renforcement peut très bien s’accompagner du développement d’autres sujets politiques, de nature culturelle, sociale, territoriale ou religieuse, à côté de l’État. L’articulation de l’autorité politique au niveau local, national et international est, entre autres, une des voies maîtresses pour parvenir à orienter la mondialisation économique. C’est aussi le moyen pour éviter qu’elle ne mine dans les faits les fondements de la démocratie. » (§ 41)

Dans ce paragraphe, le mot « orienter » est fondamental. L’« autorité politique mondiale » voulue – rêvée ? – par Benoît XVI n’est pas une fin en soi ni un bien en soi.

Il ne suffit pas de faire pour faire bien

A plusieurs reprises, le Pape revient sur le fait qu’il n’y a pas de réponse purement institutionnelle, technique, ou d’organisation qui puisse rendre la vie des sociétés humaines plus conforme à la nature humaine et à sa vocation, à notre « besoin de Dieu ». Pas de progrès en soi non plus…

« Le processus de mondialisation pourrait substituer aux idéologies la technologie, devenue à son tour un pouvoir idéologique qui exposerait l’humanité au risque de se trouver enfermée dans un a priori d’où elle ne pourrait sortir pour rencontrer l’être et la vérité. (…) Cette vision donne aujourd’hui à la mentalité techniciste tant de force qu’elle fait coïncider le vrai avec le faisable. » (§ 70)

Sans volonté de réaliser le bien commun, qui passe par « Que votre volonté soit faite » comme le suggère fortement la conclusion de l’encyclique, sans hommes de bonne volonté en somme, aucune amélioration n’est à espérer pour l’ensemble des hommes par le simple jeu de la mondialisation, idée répétée par les partisans du « laissez-faire » absolu qui de soi est censé apporter un mieux à chacun. Benoît XVI répond, avec un scepticisme narquois :

« Le développement des peuples est souvent considéré comme un problème d’ingénierie financière, d’ouverture des marchés, d’abattement de droits de douane, d’investissements productifs et de réformes institutionnelles : en définitive comme un problème purement technique. Tous ces domaines sont assurément importants, mais on doit se demander pourquoi les choix de nature technique n’ont connu jusqu’ici que des résultats imparfaits. » Observant la mondialisation, le Pape note ainsi que « la situation réelle des populations qui vivent sous ces flux dont elles ignorent presque tout, demeure inchangée et sans possibilité réelle d’émancipation ». (§ 71)

Et de réclamer une réforme de l’ONU, de déplorer le fait que les organismes d’aide internationale finissent à l’occasion par vivre sur le dos des pauvres dont ils ont besoin pour assurer leur propre prospérité, de donner comme probable le fait que les instances officielles d’aide au développement subordonnent l’octroi de fonds, de facilités ou de crédits à la mise en place d’inacceptables politiques de contrôle des populations (ce qui vise implicitement la Banque mondiale ou le Fonds monétaire international). Ce n’est ni de la complicité, ni de la naïveté à l’égard des exemples concrets actuels de pouvoirs supra-nationaux, et ce n’est pas ce genre de pouvoirs que le Pape appelle.

C’est à l’aune de tout cela que l’on doit alors lire le fameux § 67, peut-être le plus cité de l’Encyclique mais pas forcément le mieux compris :

« Face au développement irrésistible de l’interdépendance mondiale, et alors que nous sommes en présence d’une récession également mondiale, l’urgence de la réforme de l’Organisation des Nations Unies comme celle de l’architecture économique et financière internationale en vue de donner une réalité concrète au concept de famille des Nations, trouve un large écho. (…) Pour le gouvernement de l’économie mondiale, pour assainir les économies frappées par la crise, pour prévenir son aggravation et de plus grands déséquilibres, pour procéder à un souhaitable désarmement intégral, pour arriver à la sécurité alimentaire et à la paix, pour assurer la protection de l’environnement et pour réguler les flux migratoires, il est urgent que soit mise en place une véritable Autorité politique mondiale telle qu’elle a déjà été esquissée par mon Prédécesseur, le bienheureux Jean XXIII. Une telle Autorité devra être réglée par le droit, se conformer de manière cohérente aux principes de subsidiarité et de solidarité, être ordonnée à la réalisation du bien commun, s’engager pour la promotion d’un authentique développement humain intégral qui s’inspire des valeurs de l’amour et de la vérité. Cette Autorité devra en outre être reconnue par tous, jouir d’un pouvoir effectif pour assurer à chacun la sécurité, le respect de la justice et des droits. Elle devra évidemment posséder la faculté de faire respecter ses décisions par les différentes parties, ainsi que les mesures coordonnées adoptées par les divers forums internationaux. En l’absence de ces conditions, le droit international, malgré les grands progrès accomplis dans divers domaines, risquerait en fait d’être conditionné par les équilibres de pouvoir entre les plus puissants. Le développement intégral des peuples et la collaboration internationale exigent que soit institué un degré supérieur d’organisation à l’échelle internationale de type subsidiaire pour la gouvernance de la mondialisation et que soit finalement mis en place un ordre social conforme à l’ordre moral et au lien entre les sphères morale et sociale, entre le politique et la sphère économique et civile que prévoyait déjà le Statut des Nations Unies. » (§ 67)

Les « équilibres de pouvoirs entre les plus puissants » sont bien ceux qui gouvernent aujourd’hui le monde : la divergence d’intérêts n’empêche pas la complicité, comme le montre la mise en place concertée d’une économie gouvernée par les seules lois du marché, quelles que soient les conséquences pour les populations. Benoît XVI n’omet d’ailleurs pas de souligner l’extension des situations de pauvreté dans les pays riches et l’exploitation de conditions indignes pour profiter des bas prix des pays émergents.

Faire respecter la loi naturelle au niveau international

Le rôle de l’Autorité politique mondiale imaginée par Benoît XVI est aux antipodes de cette compétition complice, et elle a, si l’on comprend bien l’encyclique, une finalité haute : assurer que la mondialisation des échanges respecte la nature des hommes, qui ont besoin de leurs cultures propres, et se fasse de plus en plus dans une Charité conforme à la Vérité.

Toutes proportions gardées et sans vouloir idéaliser une époque révolue, on peut rappeler que cette Autorité – morale au moins – reconnue et à l’occasion même respectée par des chefs politiques plutôt enclins à la bataille a bel et bien existé. Le Moyen Age chrétien, reposant sur un consensus qui traversait les classes sociales, avait en général la certitude que l’homme était fait pour l’au-delà et que son sort y serait fixé à raison de sa conduite, bonne ou mauvaise, ici-bas. Et c’était l’Eglise, avec son chef, le Pape, qui était généralement reconnue comme possédant les clefs de cet au-delà ; le pouvoir de dire aux hommes le bien que Dieu attendait d’eux. Ce n’était pas parfait ; du moins y avait-il un assentiment bien partagé et une idée précise de la direction dans laquelle il fallait regarder pour s’approcher du vrai, du juste, du bon, du beau.

Bien plus récemment, on a pu voir deux pays chrétiens comme l’Argentine et le Chili confier avec succès le règlement d’un différend territorial qui empoisonnait leurs existences au Saint-Siège dont l’arbitrage avait été accepté d’un commun accord : celui-ci agit en tant qu’autorité morale mais aussi politique, il ne se substitua pas aux deux Etats souverains concernés mais il leur permit d’aboutir à une solution conforme à un bien commun qui, en l’occurrence, dépassait leurs intérêts individuels.

Dans Caritas in veritate, on ne trouve pas de regard nostalgique vers cette Chrétienté d’hier. Mais on y devine que Benoît XVI, en s’adressant, au-delà des évêques, des prêtres, religieux et fidèles, à tous les hommes de bonne volonté, vient dire que l’Autorité morale existe, qu’elle est sûre d’elle-même et de son message, qu’elle est même indispensable aux hommes afin qu’ils ne sombrent pas dans une tyrannie matérialiste qui parachèverait les erreurs de notre temps.

— « L’Eglise a une responsabilité envers la création et doit la faire valoir publiquement aussi. Ce faisant, elle doit préserver non seulement la terre, l’eau et l’air comme dons de la création appartenant à tous, elle doit surtout protéger l’homme de sa propre destruction » (§ 51), écrit le Pape.

— « L’Eglise n’a pas de solutions techniques à offrir et ne prétend “aucunement s’immiscer dans la politique des Etats”. Elle a toutefois une mission de vérité à remplir, en tout temps et en toutes circonstances, en faveur d’une société à la mesure de l’homme, de sa dignité et de sa vocation. » (§ 9)

— « La religion chrétienne et les autres religions ne peuvent apporter leur contribution au développement que si Dieu a aussi sa place dans la sphère publique, et cela concerne les dimensions culturelle, sociale, économique et particulièrement politique. » (§ 56)

On pourrait citer beaucoup d’autres exemples de cette tranquille affirmation que l’Eglise possède cette clef du vrai développement humain. A telle enseigne que Caritas in veritate signe en quelque sorte le retour ou la volonté de retour de l’Eglise dans la sphère politique, non pour la diriger mais pour l’éclairer et rendre visible à tous l’existence d’une nature humaine qui souffre et gémit de voir ses lois bafouées.

Ayant pris soin de rejeter toute fausse égalité entre les religions, Benoît XVI va ainsi jusqu’à écrire : « La religion chrétienne et les autres religions ne peuvent apporter leur contribution au développement que si Dieu a aussi sa place dans la sphère publique, et cela concerne les dimensions culturelle, sociale, économique et particulièrement politique. »

Ce serait assurément par trop solliciter le texte que de prétendre voir Benoît XVI plaider pour la mise en place d’une « Autorité politique mondiale » en la Cité du Vatican. Mais il indique clairement que si notre monde inextricablement lié par les fils de la mondialisation ne renonce pas au matérialisme qui le tue, si ce monde ne découvre pas la Charité dans la Vérité dont le Christ est le témoin véritable, on ne peut espérer que des fruits amers.

JEANNE SMITS
Article extrait du n° 6890 de Présent, du Mardi 28 juillet 2009

[Gerard Leclerc] Rome et les lefebvristes : ce que veut Benoît XVI, ce qu’il peut…

SOURCE - France Catholique - 27 juillet 2009

Chers amis, cela faisait très longtemps que Gérard Leclerc n’avait pas publié de livre. Sur cette question lefebvriste, sa position est réellement originale et utile. Il est même l’un des rares à pouvoir objectivement analyser ce que le Pape pense pouvoir faire… [...]

Introduction du nouveau livre de Gérard Leclerc :

On s’en souviendra de ce début d’année 2009, avec ses rebondissements successifs. C’est comme si l’ensemble des médias s’étaient coalisés contre une cible unique  : le pape Benoît XVI. Tout commence avec la levée des excommunications dont sont l’objet les quatre évêques consacrés illégitimement par Mgr Marcel Lefebvre (en 1988). La nouvelle intervient alors qu’une autre information retentissante est partout diffusée. L’un des quatre évêques en question a nié la Shoah et les chambres à gaz dans une intervention à la télévision suédoise en novembre dernier. Il s’agit de Mgr Richard Nelson Williamson, le plus exalté sans doute, imprévisible, ingérable, selon l’avis de son supérieur, Bernard Fellay. Curieuse conjonction des deux événements. L’hebdomadaire Der Spiegel de Hambourg, a joué un rôle certain dans cette affaire. C’est lui qui a révélé, le premier, le contenu de l’entretien scandaleux. Comme par hasard au moment même où le Vatican rendait publique la levée des excommunications.

Toujours est-il que l’émotion est considérable. L’information première a changé de nature. Ce n’est plus  : le Pape lève l’excommunication de quatre évêques lefebvristes. C’est désormais  : le Pape réintègre dans l’Église un négationniste. On peut relever ce qui, dans cet épisode, relève d’une évidente manipulation. Benoît XVI n’a jamais pensé à une telle provocation. Tout montrera, dans les jours suivants, qu’il a été complètement surpris et même interloqué. C’est d’ailleurs l’ensemble du Vatican qui apparaîtra déstabilisé pendant une quinzaine de jours. On n’a rien vu venir, et l’on ne sait pas très bien comment parer à une telle catastrophe médiatique.

Alors qu’il aurait fallu réagir vigoureusement dès le premier jour, en faisant une mise au point nette et sans bavure, la réponse sera échelonnée en plusieurs étapes, sans que le déchaînement médiatique soit vraiment freiné. Enfin interviendra une déclaration de la Secrétairerie d’État sans ambiguïté  : dans l’état actuel des choses, il n’est pas concevable que Mgr Williamson puisse assumer la moindre tâche dans l’Église. Benoît XVI s’expliquera dans une longue lettre destinée à tous les évêques du monde. Il reconnaîtra la faiblesse de son administration, qui aurait dû, ne serait-ce que par le canal d’Internet, débusquer l’information dont la connaissance aurait évité tout cet emballement de fureur contre l’Église.

Que devenait dans pareil climat le problème posé par la dissidence traditionaliste  ? Alors qu’à Rome, dans l’esprit du Pape et de ses principaux collaborateurs il y avait une mise au point doctrinale à accomplir, à partir des incompréhensions et des désaccords dont le Concile Vatican II avait été l’objet du côté de Mgr Lefebvre et de ses disciples, tout se trouvait perverti, l’interprétation la plus courante voulait que Benoît XVI se soit fourvoyé avec une mouvance d’extrême-droite, liée à un passé douteux, et jamais débarrassé de ses obsessions antisémites.

Était-ce vraiment le cas  ? Les plus vindicatifs n’étaient pas forcément les plus pointus, en ce qui concerne la connaissance précise du milieu lefebvriste. Pour ceux qui se renseignaient à la source, il apparaissait que la tempête soulevée par le scandale Williamson avait profondément déstabilisé la Fraternité Saint-Pie X, c’est-à-dire la communauté fondée par Mgr Lefebvre et dirigée par son successeur, le Suisse Bernard Fellay. Même s’il y avait des liens évidents entre la Fraternité et certains milieux d’extrême-droite, il n’était nullement avéré que les lefebvristes étaient des négationnistes. Dès ses premiers communiqués la direction de la Fraternité se démarquait de Williamson. De jour en jour, il apparut que la prise de conscience opérée obligeait Bernard Fellay et son entourage à prendre en compte le scandale dans toutes ses dimensions. L’auteur de ce livre s’en rendit compte lorsqu’il se rendit avec son collègue Samuel Pruvot au plein cœur de la Suisse pour interroger directement le supérieur de la Fraternité  : «  Le meurtre de l’innocent crie vers le ciel. À plus forte raison, s’il s’agit du meurtre d’un peuple tout entier.  » Il ne pouvait plus y avoir aucune ambiguïté, la Shoah était reconnue pour ce qu’elle était avec son caractère exceptionnel.

Nous eûmes le sentiment, Samuel et moi, que notre interlocuteur avait été décontenancé par cette tempête à laquelle il ne s’attendait absolument pas. Il tentait d’y répondre, en recherchant ce qui dans l’histoire récente de l’Église catholique pouvait servir d’arguments contre l’imputation d’antisémitisme. Ainsi, il allait rechercher la déclaration du Saint-Office parue en 1928, qui condamnait fermement tout antisémitisme de la part des chrétiens. Plus significativement encore, il rappelait les propos tenus peu avant sa mort par le pape Pie XI  : «  Spirituellement, nous sommes des sémites.  » Dans un premier mouvement, Bernard Fellay avait même transformé la phrase du pape d’une manière assez jolie  : «  Nous sommes sémites de cœur.  » Il n’en était pas encore à se réclamer de Nostra Aetate, cette déclaration de Vatican II qui avait transformé la nature même des relations entre chrétiens et juifs. C’est Nostra Aetate qui avait permis à Jean-Paul II de reprendre la formule de son illustre compatriote, le poète Adam Mickiewicz  : «  Les juifs sont nos frères aînés.  » Frères aînés dans la foi, parce qu’héritiers de la première Alliance que la seconde n’a pas effacée, puisque, dit l’apôtre Paul dans l’Épître aux Romains  : «  Les dons de Dieu sont sans repentance.  » Non, Bernard Fellay n’en était pas encore là, mais il était saisi par la question d’Israël avec une intensité ignorée jusqu’alors par le petit monde lefebvriste.

Les journalistes les plus engagés dans la dénonciation du Pape étaient très loin de prendre conscience de la crise vécue par la Fraternité. Il était beaucoup plus facile d’en rester à quelques slogans et à une analyse sommaire à propos d’un intégrisme impénitent, fermé à tout dialogue en vérité. Ce qui permettait de nourrir le réquisitoire contre un Pape dont la détermination à réduire le schisme lefebvriste était incompréhensible, sinon insupportable. Il est vrai qu’en même temps le pape Ratzinger était suspecté de vouloir revenir radicalement en arrière par rapport à l’évolution de l’Église depuis Vatican II.

Durant tout le temps où l’ancien archevêque de Munich avait dirigé la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, les médias n’avaient cessé de le prendre pour cible, jusqu’à l’affubler d’un sobriquet ridicule  : PanzerKardinal. Une légende tenace courait sur le compte d’un théologien qui aurait été progressiste au moment de Vatican II et serait devenu progressivement, surtout après 1968, conservateur voire réactionnaire. Il est possible que ce soit Hans Küng, ancien collègue de Ratzinger à l’université de Tübingen qui ait été à l’origine de cette rumeur. Elle est pourtant sans fondement. Car il faut n’avoir rien compris à l’histoire personnelle de Joseph Ratzinger et à son itinéraire de théologien pour l’affubler de telles catégories. Pour qui a étudié sérieusement son œuvre, depuis sa première thèse sur Bonaventure, il apparaît que sa pensée s’est développée organiquement, même avec des inflexions différentes, dans une direction qui ne s’est jamais démentie.

Ratzinger progressiste à Vatican II  ? Cela est totalement absurde. Il suffit de prendre connaissance des cahiers qu’il rédigea au fur et à mesure des quatre sessions du Concile, pour s’apercevoir de sa fidélité à la tradition catholique, telle qu’un John Henry Newman la définissait au siècle précédent. Il s’agit d’une tradition qui s’identifie au fleuve de toute l’histoire du christianisme depuis les origines, et qui prend sans cesse en compte les interrogations que lui posent les provocations de la culture au long des siècles. Il est vrai que Ratzinger a joué un rôle clé à Vatican II, notamment avec la mise au point de quelques-uns de ses textes essentiels. Au premier rang, Verbum Dei, une mise au point doctrinale très importante, à propos de l’Écriture Sainte et de la Tradition précisément. Cette constitution conciliaire était d’autant plus décisive qu’elle voulait mettre fin à des polémiques engagées avec la Réforme au XVIe siècle. Elles avaient été relancées, il n’y a pas si longtemps avec la crise moderniste et l’exégèse scientifique. Le cardinal de Lubac a pu écrire par la suite que Verbum Dei était le chef-d’œuvre de Vatican II. Que Ratzinger y ait collaboré est un signe intéressant. De même dans son journal du Concile, Yves Congar avait noté que dès qu’il y avait une difficulté à résoudre dans le cadre des commissions du Concile, Ratzinger était toujours là pour y répondre en obtenant l’accord de tous.

Il faut bien comprendre que le pape actuel est le dernier grand acteur survivant de Vatican II, et qu’il a toutes les raisons de veiller au respect d’un Concile dont, mieux que quiconque, il connaît les richesses et le rôle prémonitoire pour conduire l’Église dans l’âge actuel de l’histoire. Sans doute y eut-il des moments de fortes tensions, à Vatican II. On se souvient de l’intervention mémorable du cardinal Frings, archevêque de Cologne, pour dénoncer les méthodes inadmissibles pratiquées par le Saint Office à l’égard de certains théologiens. Il est vrai que Joseph Ratzinger, alors âgé de 35 ans et qui était le secrétaire de Frings avait rédigé cette intervention. Cela suffit-il à justifier cette réputation de progressisme qu’on lui fit sur le moment et par la suite  ? Sûrement pas. Les cahiers rédigés au Concile, dont nous avons parlé, marquent en même temps les réticences du jeune théologien sur certaines orientations que les premiers rédacteurs voulaient impulser à la Constitution Gaudium et Spes, celle qui concernait les rapports de l’Église et du monde moderne. Il s’indigne d’un optimisme historique outré, qu’il apparente avec un certain teilhardisme. Il est d’ailleurs en accord là-dessus avec l’épiscopat allemand qui est alors en opposition avec la tendance dominante de l’épiscopat français.

Nous reviendrons sur la pensée théologique de Joseph Ratzinger. Elle s’inscrit dans la ligne des grandes figures - Henri de Lubac, Hans Urs Von Balthasar, Louis Bouyer… - qui ont profondément renouvelé la théologie catholique au XXe siècle. Elle est donc très éloignée des thèmes de ce qu’on appelle généralement l’intégrisme. C’est faire un mauvais procès à Benoît XVI que de lui reprocher de vouloir revenir avant Vatican II. C’est surtout montrer son ignorance par rapport à son œuvre et même aux grandes lignes de son pontificat. Il n’en est pas moins vrai que le Pape s’est engagé dans un rapprochement avec la mouvance dite traditionaliste, en dépit des risques certains que cela entraîne. Il doit avoir de bonnes raisons pour cela.

Pour le successeur de Pierre, garant de l’unité de l’Église, il n’est pas supportable qu’un «  schisme  » se perpétue. Celui de Mgr Lefebvre est encore récent. L’histoire montre que des différends, qui pouvaient être surmontés, sont devenus irrémissibles, lorsque le temps faisait son œuvre, en instaurant des murs infranchissables. Il faut d’ailleurs noter que les prédécesseurs de Benoît XVI ont voulu arrêter la logique de la rupture. Paul VI et Jean-Paul II avaient reçu Mgr Lefebvre. Jean-Paul II, au moment de la consécration des quatre évêques qui provoqua l’excommunication avait fait un premier geste, en rendant possible la célébration de la messe selon le rite tridentin. Benoît XVI est encore allé plus loin avec son Motu Proprio «  libéralisant  » la messe ancienne et avec sa volonté délibérée de mener à bien une négociation de rapprochement.

Le clash Williamson a pu ralentir, un moment, le processus enclenché entre Rome et les lefebvristes. Il faut s’attendre à une reprise, dans le cadre décidé par le Pape. C’est désormais la Congrégation pour la Doctrine de la foi qui prend la responsabilité du dossier doctrinal. C’est donc sous son égide que va se dérouler désormais une négociation dont il est difficile de prévoir la durée, d’autant que demeurent des obstacles très sérieux sur le chemin qui mène les traditionalistes vers la pleine acceptation de Vatican II. Nous voudrions ici prendre la mesure des désaccords, des possibles rapprochements, sans sous-estimer la difficulté d’un plein accord. Il faut reconnaître à Mgr Bernard Fellay le mérite de l’honnêteté et de la franchise, lorsqu’il déclare que seule une pleine élucidation des désaccords peut conduire à la réconciliation avec Rome. La Fraternité Saint-Pie X ne s’est pas battu, des décennies durant, avec l’énergie que l’on sait, pour abdiquer en rase campagne. Le Pape et ses collaborateurs, d’autre part, ne désirent pas non plus faire l’impasse sur l’enseignement d’un concile œcuménique et sur l’autorité du magistère post-conciliaire.

Notre ambition est de donner quelques clés de compréhension du dossier. Celles-ci sont à la fois d’ordre historique, parfois historico-politique, théologique. Nous n’hésiterons pas à marquer nos différences avec certaines interprétations en cours. Il nous arrivera de prendre parti, parfois avec un préjugé de bienveillance, notre conviction la plus forte étant qu’il faut soutenir la volonté réconciliatrice du Pape, non pas au prix de compromis douteux, mais à la faveur d’une élucidation qui permettra d’avancer le plus loin possible vers la compréhension de la grande Tradition ecclésiale. C’est elle qui devrait tout déterminer.

A suivre dans le livre de Gérard Leclerc à paraître début septembre. Le titre, le nombre de pages et le prix ne sont pas encore fixés à ce jour.

27 juillet 2009

[Benoit et Moi] Lettre du Père Scalese à Mgr Fellay

SOURCE - original italien - 27 juillet 2009

Lettre ouverte à Mgr Fellay

Excellence Révérendissime,

Je ne sais pas si cette « lettre ouverte » arrivera jamais entre Vos mains. Je la confie aux anges, afin qu'ils Vous la remettent personnellement. Une autre fois déjà, j'avais écrit un article en ayant en tête votre Fraternité ; je l'ai publié sur ce blog (ce fut mon premier post), et il arriva miraculeusement à destination : il fut repris par vos sites et défini comme « très intéressant » (ndt: il est traduit en français ici: L'esprit du Concile).

Cette fois, je m'adresse à vous, parce que je sais que les préparatifs des entretiens doctrinaux avec le Saint-Siège sont en cours, depuis longtemps réclamés par vous, et finalement accordés par le Pape Benoît XVI, avec la rémission de l'excommunication. À ce que je crois, Vous êtes déjà allé à Rome pour prendre les premiers contacts avec la Congrégation pour la Doctrine de la Foi.

Personnellement, j'ai toujours été d'avis qui il n'y avait pas besoin d'« entretiens » pour la réadmission dans la communion de l'Église catholique. L'unique chose nécessaire, à mon avis, devrait être la profession de foi prévue par le droit canon. Dès lors que nous partageons la même foi, nous devrions être en pleine communion. Sur le reste, qui n'est pas compris dans cette profession de foi, je considère qu'il est toujours possible de discuter librement, mais en étant à l'intérieur, pas à l'extérieur de l'Église. L'acceptation du Concile, qui s'est lui-même défini « pastoral », ne devrait pas, selon moi, être une condition pour la réadmission dans la communion ecclésiastique. Je suis d'accord qu'une réflexion sur la valeur et l'interprétation de Vatican II est plus que jamais urgente ; mais il ne me semble pas qu'elle doive être objet d'une négociation entre le Saint Siège et la Fraternité Saint-Pie X ; cela me semble plutôt être un problème qui concerne l'Église tout entière. C'est pour cette raison que j'ai proposé à plusieurs reprises dans ce blog que le prochain Synode des Évêques soit consacré à l'interprétation du Concile.

Mais peu importe ce que je pense: à ce qui semble, tant de votre côté que de celui du Siège Apostolique, une clarification sur Vatican II est considérée comme une condition préalable à tout autre type d'accord. D'où la nécessité d'« entretiens doctrinaux ». Eh bien, puisque ces entretiens doctrinaux auront bien lieu, permettez que je vous donne quelques conseils. Non que je prétende en savoir plus que Vous, mais seulement pour vous exprimer, dans un esprit de charité fraternelle, ce que je ressens en cet instant délicat.

Avant tout, lorsque vous viendrez à Rome pour discuter avec la CDF, ne venez pas dans les habits de celui qui conteste ou, pire, qui refuse le Concile. Cela signifierait la faillite immédiate de tout dialogue. Venez plutôt comme quelqu'un qui accepte Vatican II pour ce qu'il a voulu être, et a effectivement été, c'est-à-dire un concile pastoral. Dites aussi au Cardinal Levada que l'unique chose que vous refusez - et sur ce point nous sommes tous d'accord - c'est l'absolutisation et l'idéologisation du Concile, et pas le Concile en tant que tel. Dites-lui aussi que vous trouvez dans les documents de Vatican II quelques textes ambigus. Là aussi, le Cardinal Levada devrait en convenir avec Vous. Paul VI lui-même trouva ambigu le traitement de la collégialité épiscopale selon Lumen gentium, au point qu'ii éprouva le besoin d'annexer à cette constitution une « Nota praevia ». Ajoutez que, puisqu'il y a des ambiguïtés dans les textes conciliaires, une œuvre d'interprétation est rendue nécessaire. Mais, je vous en prie, ne vous présentez pas avec la prétention d'être, Vous ou Votre Fraternité, parmi les interprètes du Concile, ceux qui font autorité. Demandez plutôt que ce soit le Siège Apostolique qui donne une interprétation authentique des passages les plus obscurs. Cela a déjà été fait (la « Nota praevia » ; l'explication de sens de l'expression « subsistit in »), mais beaucoup reste encore à faire. Le critère général de cette interprétation a été déjà indiqué par Benoît XVI dans le discours à la Curie Romaine du 22 décembre 2005 : l'herméneutique de la réforme en opposition à l'herméneutique de la discontinuité et de la rupture. Et dites-lui que, sur ce point, non seulement vous êtes pleinement d'accord avec le Saint-Père, mais vous voulez vous mettre à sa complète disposition pour l'aider dans cette œuvre de relecture du Concile dans le sillage de la tradition ininterrompue de l'Église.

Excellence Révérendissime, je suis sûr que sur ce que j'ai écrit jusque là, nous sommes dans une large mesure d'accord. Il me semble le percevoir par le ton de Vos dernières interventions, beaucoup plus conciliant et ouvert qu'avant. Mais je sais aussi que vous devez tenir compte, à l'intérieur de la Fraternité, de positions plus maximalistes, qui vous mettent en garde d'être trop conciliant vis-à-vis du Saint-Siège. À mon modeste avis, vous devriez faire comprendre à Vos confrères qu'ils n'ont rien à gagner, en ce moment, à se raidir sur des positions intransigeantes. Le Saint-Père a déjà fait beaucoup de pas vers vous ; maintenant c'est à vous de faire quelques pas vers lui.

Cela ne signifie pas céder sur vos principes ; parce que, si vraiment vous avez à cœur le sort de l'Église, il n'y a pas d'endroit meilleur, pour faire valoir ces principes, que l'Église elle-même. En restant dehors, vous laisserez l'Église à la merci de ces forces destructives qui l'amènent peu à peu à la ruine. Tant que vous continuerez à refuser le Concile, ces forces auront beau jeu de dire: « Vous voyez? Ils sont hors de l'Église, parce qu'ils refusent le Concile ; nous sommes la vraie Église, parce que nous acceptons, défendons et réalisons le Concile ». Si vous aussi acceptez le Concile, ils en resteront déconcertés ; et là, on verra bien qui est vraiment catholique et qui ne l'est pas ; celui qui interprète le Concile à la lumière de la tradition et celui qui l'interprète idéologiquement, en appelant à son prétendu « esprit ».

Cela ne signifie pas non plus trahir l'héritage de Mgr Lefebvre. Vous savez mieux de moi que votre Fondateur participa au Concile, en donnant une contribution considérable aux discussions et à l'élaboration de ses documents, qu'il approuva et signa dans leur totalité. Comment cela peut-il être? Ne se rendait-il pas compte des ambiguïtés qu'ils contenaient ? Évidemment, il espérait qu'on pouvait en donner une interprétation orthodoxe. Ce fut seulement lorsqu'il vit que l'interprétation et l'application du Concile était devenues le monopole des modernistes qu'il raidit ses positions. Je suis convaincu que, s'il avait vu qu'il y avait de la place dans l'Église pour continuer ses luttes de l'intérieur, il ne serait jamais arrivé à une rupture avec le Siège Apostolique. Maintenant que cet espace existe, et que c'est le Souverain Pontife lui-même qui vous l'offre, il me semblerait choquant de ne pas exploiter cette occasion unique. Il s'agit de choisir de rester dans le sein de l'Église et de là, y accomplir un rôle, certes difficile, mais précieux pour la sauvegarde de la tradition et de la revitalisation de l'Église même; ou bien préférer rester en marge, ou même hors de l'Église, avec le risque de se transformer en sarment séparé de la vigne, destiné à se dessécher.

Excellence, pardonnez-moi si je me suis permis d'intervenir sur des questions si délicates. Je peux vous assurer que, de mon côté, il n'y a ni prétention ni intérêt d'aucune sorte, il y a seulement le désir de voir le rétablissement de la pleine communion dans l'Église. L'Église a besoin de vous et vous avez besoin de l'Église.

Je saisis l'occasion pour me réaffirmer, de Votre Excellence Révérendissime, le très dévoué

Giovanni Scalese, CRSP (*)

(*) Clerc Régulier de Saint-Paul

26 juillet 2009

[Max Barret / Courrier de Tychique n°296] Flagrant délit

SOURCE - Max Barret - 26 juillet 2009


Dimanche 26 juillet 2009

VIIIième Dimanche après la Pentecôte

Flagrant délit.

Benoît XVI a adressé son bristol d’invitation à la FSSP X, sous la forme d’une « Lettre Apostolique Ecclesiae Unitatem » valant « Motu proprio » le 2 juillet dernier. Tout se met donc en place. Les théologiens choisis par la Fraternité vont pouvoir y répondre et s’asseoir à la table des négociations.

Car il faut être bien naïf pour imaginer que les rencontres programmées ne soient que de simples et aimables « discussions » ne débouchant pas sur des « négociations » ! Quel serait, en effet, l’intérêt de ces « discussions » si elles n’avaient pour seul but que de se rencontrer, confronter des opinions et s’en tenir benoîtement à ces échanges aimables ? Il est inévitable qu’un « accord » soit recherché tôt ou tard. Et qui dit « accord » – quand les positions sont si éloignées les unes des autres – dit fatalement « concessions ». Or la Vérité se proclame. Elle ne se discute pas. Benoît XVI, quant à lui, ne concédera rien ! Il suffit de lire ce dernier « document » pour en être persuadé. Car l’affaire se présente plutôt mal !

Je lis, en effet, dans cette courtoise invitation, ce passage signé de Benoît XVI (qui en est l’auteur) : « Jean Paul II, de vénérable mémoire, institua le 2 juillet (1988) la Commission pontificale « Ecclesia Dei », dont la tâche est de collaborer avec les évêques, les départements de la Curie Romaine et les milieux concernés, afin de faciliter la pleine communion ecclésiale des prêtres, séminaristes, communautés religieuses ou religieux et religieuses individuels, jusqu’alors liés à la Fraternité fondée par Mgr Lefebvre, et désireux de rester unis au Successeur de Pierre dans l’Eglise catholique, tout en conservant leurs traditions spirituelles et liturgiques à la lumière de l’accord signé le 5 mai 1988 par le Cardinal Ratzinger et Mgr Lefebvre. »

C’est peut-être une déclaration habile, pour appâter les plus réticents ou les moins attachés à la Vérité ! Mais c’est faux ! C’est un mensonge et un très vilain mensonge. Benoît XVI est pris ici en flagrant délit de mensonge! Et il en est d’autant plus coupable que le 5 Mai 1988, le Cardinal Ratzinger… c’était lui ! Certes, l’accord du 5 mai 1988 avait bien été signé par Mgr Lefebvre et lui-même. Mais ce qu’« oublie » de dire Ratzinger – devenu Benoît XVI – c’est que le lendemain matin, après avoir passé « une nuit épouvantable », ainsi qu’il me l’a dit lui-même, Mgr Lefebvre a rétracté sa signature. Le fait est avéré, public, incontestable ! Mgr Lefebvre n’a donc rien signé du tout ! Et Benoit XVI (Ratzinger) ne peut l’ignorer ! Telle est la vérité.

Comment qualifier cette déclaration : malhonnêteté, fourberie, manipulation ? Et c’est celui qui occupe le Siège de Pierre qui en est l’auteur ! Dans de telles circonstances comment peut-on accorder sa confiance à un tel nautonier ? Le naufrage est inévitable ! Et il n’y aura nul besoin d’inspecter le fond des océans pour rechercher les « boîtes noires » : elles sont déjà entre nos mains !

La nouvelle commission « Ecclesia Dei »

Sa composition est évidemment taillée sur mesure ! Son président en est le Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, c’est-à-dire le Cardinal Levada. Il est particulièrement bien choisi. « Il s’est illustré à la tête du diocèse de Portland – Orégon (USA) qu’il laissa dans un tel état, que ce diocèse jouit du triste privilège d’avoir été le premier à s’être déclaré en faillite afin d’échapper aux poursuites judiciaires intentées par les victimes de viols par des prêtres homosexuels. Il a alors été nommé Archevêque de San Francisco où il a défendu le droit des homosexuels à vivre en couple. » (Jacques Delacroix – « La fausse restauration de Benoît XVI ou la paix de Fatima » - p. 134 – cf. « Le Courrier de Tychique » n° 292 du 14 juin 2009).

C’est donc ce vénérable prélat qui dirigera les débats car, il est précisé dans ce nouveau document : « Il appartient au Président, assisté par le Secrétaire, de soumettre les cas et sujets de nature doctrinale à l’étude et aux délibérations des instances ordinaires de la Congrégation et d’en soumettre les résultats au jugement suprême du Souverain Pontife. » Ainsi, c’est le Cardinal Levada qui décidera lui-même des cas et sujets qui seront examinés ! Pas question, de s’en écarter ! D’autant que le but avoué par Benoît XVI dans ce document est le « retour (de la FSSP X) à la pleine communion avec l’Eglise » : « Par cette mesure, Nous désirons, en particulier, montrer Notre paternelle sollicitude envers la Fraternité Saint Pie X, dans la perspective de son retour à la pleine communion avec l’Eglise. » Pas question d’envisager une conversion de Rome, comme on l’entend dire parfois, et son retour à l’authentique Doctrine Catholique ! Cela ne sera même pas envisagé ! Le but, le seul but, est bien le retour à « la pleine communion » de la FSSP X avec l’Eglise (conciliaire) et son adhésion à toutes ses hérésies ! La « pleine communion » c’est ça !

La réalité, telle qu’elle n’est pas souvent envisagée.-

La réalité, c’est que le « mondialisme » a besoin d’une puissance spirituelle, sans laquelle il ne pourra jamais atteindre son objectif. Car le « mondialisme » est une doctrine. La « mondialisation » est un fait dont on peut penser ce que l’on veut, mais ce n’est qu’un fait. Les moyens modernes de communication, les relations intercontinentales ont généré cet élargissement de nos horizons habituels et c’est tant mieux. La mondialisation n’a rien de nocif en soi. Mais le « mondialisme » a une tout autre dimension ! Il veut soumettre le monde à son Prince… et chacun sait qui est le « Prince de ce monde ».

Or tout homme aspire, que ce soit consciemment ou non, à une dimension spirituelle de sa vie. L’agnostique Antoine de Saint-Exupéry en était déjà convaincu ! Dans sa lettre fameuse au général « X » (Tunis – Juillet 1943) il écrivait : « Je hais mon époque de toutes mes forces. L’homme y meurt de soif. Ah !... Général, il n’y a qu’un problème, un seul de par le monde : rendre aux hommes une signification spirituelle, des inquiétudes spirituelles. Faire pleuvoir sur eux quelque chose qui ressemble à un chant grégorien. Si j’avais la foi, il est bien certain que, passée cette époque de « job nécessaire et ingrat » je ne supporterais plus que Solesmes. On ne peut plus vivre de frigidaires, de politique, de bilans et de mots croisés, voyez vous… On ne peut plus. (…) Il n’y a qu’un problème, le seul : redécouvrir qu’il est une vie de l’esprit, plus haute encore que la vie de l’intelligence, la seule qui satisfasse l’homme… Et la vie de l’esprit commence là où un être « un » est conçu au-dessus des matériaux qui la composent. (…) L’homme n’a plus de sens ! Il faut absolument parler aux hommes. A quoi servira de gagner la guerre si nous en avons pour cent ans d’épilepsie révolutionnaire ?... (…) Nous sommes étonnamment bien châtrés. Ainsi sommes-nous, enfin ( ! ) libres. On nous coupé les bras et les jambes puis on nous a laissés libres de marcher. Mais je hais cette époque où l’homme devient sous un totalitarisme universel, bétail doux, poli et tranquille. » Et, s’attardant sur la vue de deux de ses camarades de combat qui dorment à côté de lui, il ajoute : « Ces deux camarades dans leur genre sont merveilleux. C’est droit, c’est noble, c’est propre, c’est fidèle. Et – je ne sais pourquoi – j’éprouve, à les regarder dormir ainsi, une sorte de pitié impuissante. Car s’ils ignorent leur propre inquiétude, je la sens bien. Droits, nobles, propres, fidèles, oui ! Mais aussi terriblement pauvres. Ils auraient tant besoin d’un Dieu ! » (« P.Q.R. » – Jean Ousset – Edition de 1959 – p 449 et suivantes).

« Ils auraient tant besoin d’un Dieu » !

« Il n’y a qu’un problème, un seul ! » écrivait Saint Exupéry ! Les mondialistes le perçoivent ! Mieux ils en sont persuadés ! L’éclosion et la prolifération des sectes leur en fournissent la preuve. Il y manque un « fédérateur ». Ce fédérateur ils l’ont, du moins le pensent-ils : c’est le Dieu des Chrétiens ! Il a fait ses preuves ! Et si ce Dieu est matériellement inaccessible il a son « mandataire » sur cette terre : celui qui occupe actuellement le Siège de Pierre ! D’où l’acharnement de ce dernier qui s’est publiquement déclaré favorable à la doctrine mondialiste (in l’Encyclique « Caritatis in Veritate »), de répondre à leur attente ! Oui, disons-le, osons le dire : Benoît XVI est leur complice ! On ne peut plus le nier ! Fassent Dieu, et Notre-Dame de Fatima, que nos Evêques refusent fermement de s’empêtrer dans les rets d’un tel piège !

Un « pèlerinage » à N.D. de la Salette.

Mon épouse et moi-même en revenons. La Vierge Marie avait bien choisi ce site pour y verser ses larmes. Le site est austère, presque désolé. Il est vrai que le message qu’elle avait à « faire passer à tout son peuple » était d’une telle gravité qu’il n’aurait peut-être pas supporté un autre paysage : « Rome perdra la foi et deviendra le siège de l’antéchrist ». Mais ce message est désormais totalement occulté ! On ne le trouve mentionné nulle part ! Et il ne faut surtout pas l’évoquer, là où précisément elle a demandé de le « faire passer à tout son peuple ». Si vous le faites vous vous ferez chasser, ce qui est arrivé à un prêtre de la FSSPX !... Les autorités ecclésiastiques, qui règnent sur le domaine, publient une plaquette où tous les poncifs conciliaires sont exaltés : amour, charité, frères et soeurs en humanité … Elles osent même aller jusqu’à contredire « la grande nouvelle » : « Tel est le sens de la pastorale du Pèlerinage en communion avec l’Eglise aujourd’hui ! » Bref : la Salette est devenue la vitrine de l’Eglise « d’aujourd’hui » !... Ça n’est jamais qu’une trahison de plus ! Notre Dame de la Salette : priez pour nous !

[Abbé de Tanoüarn / FC] La fête au chenil

SOURCE - FC - 26 juillet 2009

Voici le texte de Mgr Tissier de Mallerais, dont vous découvrez ou faites semblant de découvrir qu'il aurait la "même thèse" que l'abbé de T. dans Vatican II et l'Evangile. Je l'analyserais ligne à ligne et point par point. Le moins que l'on puisse dire c'est qu'à vouloir trop prouver il est faible et confus.

"Il faut commencer par la liturgie ; ce serait le plus simple, car l’on pourra montrer la déficience du nouveau rite des ordinations sacerdotales, par exemple. Déficience qui, en revanche, lorsqu’on parle de la nouvelle messe, tient plutôt de la contradiction pure et simple ; car c'est une nouvelle théologie qui s'y exprime, donc une autre religion. Ensuite doivent venir l’œcuménisme et de la liberté religieuse ; des thèmes qui sont beaucoup plus graves, parce qu’ils engagent la foi. La question de la collégialité des évêques ne peut venir qu’à la fin car c’est la plus difficile".

Cher Ennemond, vous avez lu et relu ce texte de Mgr Tissier dans La Vie et vous l'avez trouvé bon. De toute façon, sur ce Forum, par la vigilance des chiens de garde (auquel est venu s'adjoindre Noël aujourd'hui : c'est la fête au chenil), il est interdit d'émettre un doute quant aux augures de la sainte Fraternité. Votre combat se résume à cela. Et c'est évidemment pourquoi ceux qui nous regardent discuter ont l'impression que l'on fait du sur-place.

Mais prenons le texte.

- Rite de l'ordination, pas grave, simple déficience.

- Rite de la messe, déficience qui tient plutôt de la contradiction pure et simple.
Qu'est-ce que la contradiction pure et simple ? En logique c'est l'incompatibilité. Les deux rites s'excluraient mutuellement et ne pourraient même pas se rencontrer dans ce "genre commun" qui serait par hypothèse le genre "messe".
A demis mots ou plutôt à mots couverts, Mgr Tissier insinue là que la nouvelle messe n'est pas catholique ou n'est pas une messe, puisqu'il y a "contradiction pure et simple".

- Le motif que donne Mgr : "Car c'est une nouvelle théologie qui s'y exprime" est particulièrement inepte. Des théologies de la messe, il y en a plusieurs par siècles et certaines sont orthodoxes (ex : la théologie du sacrifice céleste du Père de La Taille, dont les petits neveux vont à Saint Nic). Mgr aurait dû dire : nouvelle doctrine ou nouvelle conception, mais pas nouvelle théologie.

- "donc une autre religion" : j'avoue que le "donc" n'est pas particulièrement clair. Si chaque nouveau théologien fondait sa religion le bon Dieu lui même ne saurait plus où donner de la tête.

- Quant au terme de religion, il est ambigu, ce qui nuit à la démonstration. Ce mot peut désigner soit une religion au sens objectif de ce terme, un nouvel ensemble de moyens et de fins religieuses soit une religion au sens purement subjectif, une nouvelle façon subjective de vivre les mêmes moyens et les mêmes fins ordonnés autrement. Quant à moi, j'ai employé le terme "religion nouvelle" au sens subjectif et je l'ai précisé. Ce texte (la préface à mon livre Vatican II et l'Evangile) est toujours disponible sur mon site et vous le savez très bien. j'assume absolument ce sens. Je reproche à Mgr T2M de ne pas avoir précisé ce sens dans son entretien, en jouant sur l'ambiguïté pour faire peur à son lecteur potentiel. Si vous prenez en revanche les discours de Mgr Lefebvre où il est question de religion nouvelle, on voit dans le contexte qu'il s'agit de la religion démocratique par ex.et du nouveau christianisme culturel. C'est ainsi en tout cas à l'époque que j'avais interprété ces citations dans V.II et l'Evangile.

- L'oecuménisme et la liberté religieuses, "des thèmes beaucoup plus graves parce qu'ils engagent la foi" : là c'est le brouillard intégral. Vous avez raison Mgr Tissier ferait manifestement un piètre inquisiteur (le mot dans ma bouche n'était pas péjoratif : il désignait simplement le fonctionnaire du Saint Office, à la place duquel Mgr T2M aspirait à se mettre, pour les mettre eux à sa place de justiciable). il ferait un piètre inquisiteur car il possède mal ses "notes théologiques" (voir le livre de Bruno Neveu L'erreur et son juge). Jusque là à l'entendre on parle de "théologies nouvelles" mais, toujours d'après lui, ces "théologies nouvelles" n'engageraient donc pas la foi. J'avoue que la démonstration est assez piteuse. Comment imaginer que des théologies nouvelles d'une façon ou d'une autre n'engagent pas la foi, puisque la théologie c'est toujours (même lorsqu'elle est erronée) une cogitatio fidei ?

- Ces deux thèmes sont mal choisis car ils renvoient à des pratiques et non pas directement à un objet de foi, comme semble pourtant l'indiquer T2M dans sa gradation. L'œcuménisme est une attitude, encouragé par Pie XII et le cardinal Ottaviani (voir le livre d'Yves Chiron sur le Frère Roger) qui peut tomber dans l'hérésie de l'indifférentisme. La liberté religieuse est le résultat d'une négociation entre l'Eglise et l'Etat ou les Etats, qui ne doit pas tomber dans l'hérésie de la liberté de conscience telle qu'elle a été condamnée par Grégoire XVI (en passant : rien à voir entre cette liberté de conscience condamnée et la liberté des consciences, qui est nécessaire à l'acte de foi).

Le dernier thème choisi est la collégialité : le thème le plus difficile, note avec raison Mgr Tissier. L'air de dire de toutes façons : quand il n'y en a plus il y en a encore. Depuis le concile de Bâle (1411), plus qu'ambigu sur le sujet, s'il y a un thème sur lequel l'Eglise n'a jamais été à l'aise, c'est bien celui-là. Mais il faudrait le résoudre "subito"... pour qu'un accord pratique puisse être signé avec la FSSPX.

Juste un mot aux chiens de garde trop zélés : si les petits malins pouvaient s'abstenir de ces attaques personnelles à répétition, qui trahissent trop crûment à la fois leur absence totale de réflexion et leur volonté de prendre ce forum en otage, je pense que cela ferait du bien au niveau spirituel (sans parler du niveau intellectuel) du débat.

[Paix Liturgique] Quand Mgr Eric Aumonier, évêque de Versailles, "fait sa com"

SOURCE - Lettre 188 de Paix Liturgique - 26 juillet 2009

Nous publions aujourd’hui une lettre que nous a adressée une paroissienne de Versailles qui a entrepris depuis plus de 18 mois des démarches actives demeurées vaines en vue de voir appliqué le Motu Proprio dans sa paroisse. Nous reproduisons son témoignage tel quel. Il est loisible de noter que cette personne qui n’a jamais manqué d’émettre ses réserves et ses critiques à propos de Paix Liturgique écrit à … Paix Liturgique lorsqu’elle se rend compte que ce que Paix Liturgique affirme depuis des années (et qui lui valait tant de critiques) est fondé…

Quand Monseigneur Eric Aumonier, évêque de Versailles, fait sa com’

A l’approche du deuxième anniversaire de l’entrée en vigueur du Motu Proprio le 14 septembre 2007, on ressent dans le diocèse de Versailles comme une ambiance de fébrilité autour de la forme extraordinaire du rite.

Monseigneur Eric Aumonier n’a-t-il pas célébré la messe des confirmations sous la forme extraordinaire du rite à la Cathédrale Saint Louis, en l’église de Port Marly (communauté traditionnelle sous la responsabilité de l’Institut du Christ Roi), assisté à la messe de confirmation de l’église Saint-Germain du Chesnay (communauté traditionnelle sous la responsabilité de prêtres incardinés dans le diocèse), organisé des dîners auprès de « traditionalistes respectables » et surtout annoncé l’organisation dans son diocèse d’un synode sur…« l’unité » des catholiques.

Mais que se passe–t-il dans le diocèse de Versailles ?

Diocésaine des Yvelines, plutôt hostile à la démarche de votre association « Paix Liturgique », participant à l’une des quinze demandes d’application du Motu Proprio dans le diocèse, je ne résiste plus à prendre ma plume afin d’exprimer mon écoeurement et mon exaspération à l’égard de Monseigneur Eric Aumonier.

Car même si j’avais plutôt de la sympathie pour cet évêque qui avait la réputation d’être un ami des traditionalistes, il faut l’avouer dans les faits, il s’agit du pire opposant à l’application du Motu Proprio dans son diocèse et de la volonté du Saint Père en France.

Il est vrai que Monseigneur Eric Aumonier a bonne presse dans le monde « Tradi », sa famille, ses frères prêtres, et sa soutane font qu’il est plutôt considéré comme un ami de la tradition.

En réalité et dans les faits, nous sommes confrontés dans le diocèse probablement au pire opposant à la messe traditionnelle.

Pourquoi ? Car il y a chez Monseigneur Eric Aumonier une duplicité, une double personnalité qu’il convient de mettre en exergue.

D’un côté Monseigneur Eric Aumonier fait sa com’

Monseigneur Eric Aumonier le clame partout haut et fort, en France, aux médias, à Rome il avait, pour ainsi dire anticipé le Motu Proprio. Ainsi, il a offert dans son diocèse de nombreux lieux de cultes où l’on célèbre la messe d’avant Vatican II (Notre Dame des Armées, Saint Germain du Chesnay, Port Marly, Saint Martin de Brétancourt,…). Lieux systématiquement bondés dont les conditions de sécurité laissent à désirer… et surtout ! qui ont été accordés il y a des années par son prédécesseur…

Monseigneur Eric Aumonier a donné la chapelle de l'Immaculée Conception à la Fraternité Saint Pierre après dix ans de négociation car il fallait bien désengorger Notre Dame des Armées et surtout répondre aux quinze demandes du diocèse d’application du Motu Proprio. La chapelle, limitée à 250 places, se voit interdite de plus de deux messes le dimanche.

Monseigneur Eric Aumonier, toujours sensible aux mondanités, accueille sans difficulté l’ordre du Saint Sépulcre dans sa cathédrale, en présence de nombreux cardinaux latins et de femmes en mantilles afin de respecter la tradition de cet organisme du reste très respectable.

Enfin, Monseigneur Eric Aumonier, comme nous l’avons vu à plusieurs reprises récemment, multiplie les opérations de com’ en apparaissant comme le grand ami de la forme extraordinaire.

De l’autre côté, Monseigneur Eric Aumonier bloque le Motu Proprio

Depuis le 7 juillet 2007, l’évêque n’a pas accepté une seule des demandes dans les paroisses ordinaires. Sur les quinze demandes pour lesquelles il a été sollicité et ceci conformément à l’article 7 du Motu Proprio, aucune n’a été acceptée à ce jour.

Et pourtant, il y a de quoi être surpris :

A Saint Germain en Laye, c’est près de 80 familles soit 450 paroissiens qui demandent depuis deux ans une messe dans leur paroisse. Des églises vides sont disponibles, le prêtre n’y est pas opposé mais l’évêque bloque.

A Rambouillet, le prêtre de la paroisse a accepté à la demande de paroissiens et de son propre chef une messe par mois. Tout se passe bien, la communauté est heureuse. Une messe par semaine est demandée mais l’évêque bloque.

A Versailles, c’est près de 125 familles soit 600 paroissiens dans le ressort territorial de Notre Dame qui demandent une messe dans leur paroisse. Certains ont été élus au conseil paroissial d’après mes informations, s’investissent dans leur paroisse mais l’évêque bloque.

C’est ainsi plus de 15 demandes qui ont été formulées par des paroissiens du diocèse de Versailles et à chaque fois la réponse est claire, nette et précise : c’est un NIET de l’évêque.

L’argument de l’évêque est simple : il a déjà tellement donné…. !

A savoir depuis le Motu Proprio « La chapelle de l’immaculée » lieu très discret, voire placard à balais, lieux bien pratique pour cacher ceux que l’on ne peut pas accepter dans les paroisses ordinaires.
Il faut dire que la vision des personnes attachées à la forme extraordinaire de Monseigneur Eric Aumonier est assez simple voir simpliste :

  • Lorsqu’un « tradi » distribue des tracts, demande avec foi une messe, il s’agit d'un terroriste voire d’un « ayatollah ».
  • Lorsqu’un demandeur d’application du Motu Proprio le sollicite avec diplomatie dans le cadre du texte, il s’agit d’une personne agissant avec agressivité.
  • Lorsqu’une personne l’invite à dîner pour discuter de cette question sans demande, il s’agit d’une personne gentille et respectueuse à qui on promet d’en réfléchir dans une dizaine d’années.

Il faut dire que dans le diocèse des Yvelines, l’évêché par l’intermédiaire du vicaire a une méthode simple avec les « tradis », c’est la méthode dite de l’élastique. Le Père Leborgne, je crois, se répand régulièrement et suffisamment à qui veut l’entendre sur sa méthode. Avec les « tradis » il tire sur l’élastique jusqu’à la limite de la rupture et relâche un peu lorsqu’il sent que les négociations peuvent être définitivement rompues.

Bref, Monseigneur Eric Aumonier et son vicaire créent les conditions pour un agacement généralisé des personnes sincères et de bonne foi qui viennent les voir. Une fois bien énervés ils utilisent leur énervement pour dire : « Nous ne pouvons pas accepter d’accorder des messes à des personnes agressives ».
Car il faut l’avouer, Monseigneur Eric Aumonier est assez orgueilleux et fier et n’accepte pas de devoir accorder à de simples « fidèles » de base des messes alors qu’il est prié instamment de les exaucer à la demande du Saint Père.

Je suis triste de vous écrire ainsi au sujet de notre évêque, mais je crois qu’il a poussé le bouchon trop loin. Il nie depuis deux ans une réalité de terrain et préfère éviter toutes négociations et dialoguer avec des personnes qui ne lui demandent rien.

Alors pourquoi, cette agitation dans les Yvelines, des confirmations en la forme extraordinaire, un synode sur l’unité etc…C’est qu’il faudra bien des cartouches à Monseigneur Aumonier l’année prochaine pour les trois ans du Motu Proprio lorsqu’il sera l'heure des visites ad limina et qu’il devra dire à Sa Sainteté le pape Benoît XVI ce qu’il fait dans son diocèse.

Beaucoup de com’ c’est certain, pas grand-chose pour ces brebis.

Je prie à son intention, car au final, il doit être bien triste et malheureux d’exclure de son troupeau des personnes qui bien que parfaitement intentionnées à son égard deviennent malheureuses devant le peu de considération de leur berger.

Une paroissienne du diocèse des Yvelines

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LES COMMENTAIRES DE PAIX LITURGIQUE

1/ Ce cri du cœur de cette paroissienne est bien désolant. Nous ne pouvons que regretter amèrement sa déception et les causes de son désarroi.

Nous comprenons cette paroissienne mais nous prenons nos distances avec le ton et la sévérité de cette lettre. En effet, nous ne sommes ni des gogos ni des guerriers.

Il est curieux de constater que ce sont souvent les mêmes qui, après avoir critiqué Paix Liturgique comme trop agressive ou trop frontale, ont des mots d’une sévérité et parfois d’une violence que nous n’avons jamais eu… et ne voulons pas avoir dans l'avenir.

Depuis plus de vingt ans, nous demandons ouvertement à nos évêques d’être bons et généreux. Pourquoi trouver cela agressif ou dur ?

Nous ne faisons que mettre en lumière des situations d’exclusion, des applications concrètes de la politique d’apartheid liturgique qui sévit non seulement à Versailles mais aussi dans la plupart des diocèses de France.

Certains jugent que ce n’est pas la bonne méthode… puis après avoir subi de multiples humiliations et réalisé qu’ils s’étaient fait roulés… deviennent d’autant plus durs.

Souhaitons que ce type de témoignage ouvre les yeux aux personnes qui ne comprennent pas le combat de notre Association.

2/ Comment comprendre que nos évêques qui sont nos pères soient si durs et manquent tant de cœur vis-à-vis de leurs enfants ?

Comment comprendre que nos évêques qui sont nos pères soient hostiles à la paix et à la réconciliation ?

C’est un grand mystère que seule la Foi nous permet de porter.

Comment ne pas être terrifié par tant de désespérance de la part de ceux et celles qui, après avoir été si désireux de paix et de dialogue, se renferment et se durcissent tant leur écoeurement est grand…

Comment comprendre que la conduite sans amour et si peu respectueuse d’un évêque puisse plonger des fidèles dans une telle tristesse ?

3/ Sur le fond, la situation d’apartheid dans le diocèse de Versailles n’est pas un scoop. Paix Liturgique s’est fait régulièrement l’écho de la duplicité de Monseigneur Aumonier et du rôle majeur qu’il joue dans l’opposition française au motu Proprio de Benoît XVI (voir notamment lettres 83, 111, 112, 154, 165, 177, 178, 179).

Nous ne pouvons qu’inviter les groupes de demandeurs à ne pas se décourager, à ne pas se laisser manipuler et à faire en sorte que Monseigneur Aumonier, et certains de ces confrères, ne puissent pas affirmer « il n’y a pas de problème liturgique dans mon diocèse, j’ai anticipé le Motu proprio, je soutiens le Pape Benoît XVI dans sa politique de réconciliation » sans être confondu…

4 – Demain, nous vivrons enfin ensemble dans les paroisses par delà les sensibilités liturgiques. C’est le sens de l’histoire, le sens des vocations sacerdotales et religieuses actuelles et le souhait de la majorité des fidèles (voir sondage CSA : lettres 145, 145 bis et 146)…

Alors arrêtons les combats d’arrière garde, ne faisons rien qui rende plus difficile encore la réconciliation inévitable.