13 octobre 1994

[Mgr Bernard Fellay - FSSPX] "Saint Pie X, au début du XXe siècle, ouvrant son glorieux pontificat, a ce terrible constat..."

SOURCE - Mgr Bernard Fellay - FSSPX - 13 octobre 1994

Lettre du Supérieur Général n°47 - octobre 1994
Chers Amis et Bienfaiteurs,

Saint Pie X, au début du XXe siècle, ouvrant son glorieux pontificat, a ce terrible constat : « Nous éprouvons une sorte de terreur à considérer les conditions funestes de l'humanité à l'heure présente. Peut-on ignorer la maladie si profonde et si grave qui travaille en ce moment bien plus que par le passé, la société humaine, et qui s'aggravant de jour en jour et la rongeant jusqu'aux mœlles, l'entraîne à sa ruine ? Cette maladie, vénérables frères, vous la connaissez, c'est à l'égard de Dieu, l'abandon et l'apostasie. Qui pèse ces choses a droit de craindre qu'une telle perversion des esprits ne soit le commencement des maux annoncés pour la fin des temps, et comme leur prise de contact avec la terre, et que véritablement le fils de perdition dont parle l'Apôtre n'ait déjà fait son avènement parmi nous. » (E Supremi  apostolatus, 4 oct. 1903).

Cet athlète de la foi jetait ces avertissements si graves en contemplant une situation de l'humanité qu'il nous faudrait qualifier de bénigne lorsqu'on la compare à la situation présente.

Les maux dénoncés, combattus ont depuis progressé effroyablement.

Les châtiments et les avertissements du ciel qui entre-temps ont retenti et se sont exécutés n'ont comme servi à rien pour un monde en folie, obstiné à vouloir rebâtir la tour de Babel : un monde où l'on pose pour principe l'absence de Dieu.

Déjà en 1903, St Pie X le disait : « Si grande est l'audace, si grande est la rage avec lesquelles on se rue partout à l'attaque de la religion, on bat en brèche les dogmes de la foi, on tend d'un effort obstiné à anéantir tout rapport de l'homme avec la Divinité. »

Comment ne pas voir dans cette attitude prélude d'effroyables châtiments, la cause des maux qui se sont abattus sur le monde contemporain et qu'on s'obstine suicidairement à voiler et à ne pas voir, enivré par les noms ronflants de paix, justice, sécurité que l'on fait retentir d'autant plus fort que leur absence se fait davantage ressentir. Voici quelques unes de ces flagrantes contradictions où conduisent le naturalisme, le libéralisme tyrannique : on prétend combattre la drogue en la distribuant ; prétextant du combat d'une maladie dans laquelle il ne faut pas hésiter à voir la main de Dieu, une punition pour les péchés, on propage le péché dans les masses sous le prude nom de préservatif, on corrompt en grand toute la société en propageant des péchés dont il vaut mieux taire les noms. On émet des lois dangereusement tyrannisantes pour combattre la "discrimination" qui provient d'un déchaînement des passions alors qu'on refuse par principe, au nom de la liberté, d'éduquer les passions de l'homme et que l'on a en horreur le nom même de vertu ; les moyens d'information surdéveloppés aujourd'hui, merveilles de la technique, servent de redoutables instruments de déformation ; par de grands efforts médiatiques et politiques, les mêmes personnes qui se proposent d'établir une paix mondiale et organisent des conférences sur la sécurité approuvent et décrètent le plus grand des génocides jamais vus dans l'histoire : chaque année, 50 à 60 millions (selon les chiffres officiels) d'innocents sont privés du droit même de vivre dans le sein de leur mère par ceux-mêmes qui font profession de sauver les vies (multiplions le chiffre par 10 ou par 20 pour totaliser les dernières années..); au vu de ces faits dont la liste pourrait être indéfiniment rallongée, nous adhérons pleinement à ce jugement du cardinal Pie : « Le naturalisme est pour les particuliers la route certaine vers l'enfer » (IIIe instruction synodale).

A la vue de cette tragédie du monde contemporain, que fait l'Eglise ? Elle pousse un timide cri d'alarme en même temps qu'elle se lance  dans la plus incompréhensible compromission : Faire siens les principes (du libéralisme) qui sont la cause des malheurs du monde actuel... Ainsi se désagrègent des pans entiers de l'Eglise au rythme même de la destruction de la société...
* * *
Au milieu de tous ces malheurs,  jetons un regard sur une œuvre dont la jeune histoire fait dire déjà : "Il y a là le doigt de Dieu".

Comment expliquer autrement la naissance et la croissance admirable de la Fraternité St Pie X ? Au moment où les séminaires se vident, les nôtres se remplissent, où les prêtres défroquent, ou au moins perdent leur habit, la soutane réapparait ; au moment où l'idée et l'identité du sacerdoce s'estompe tragiquement, une nouvelle génération de prêtres se lève et se répand sur  "toute la terre". Les chiffres, bien que ceux-ci ne soient que d'une importance toute relative, sont éloquents : fondée de rien par Mgr Lefebvre en 1970, elle compte en 1982 100 prêtres, 21 frères, 21 sœurs oblates, 180 séminaristes répartis dans 4 séminaires ; les prêtres exercent leur ministère dans 12 pays : 25 prieurés, 5 écoles, 2 maisons de retraite ; en 1994, douze ans plus tard : 310 prêtres, 48 frères, 50 oblates, 215 séminaristes répartis dans 6 séminaires. L'apostolat s'est étendu à 24 pays (sans compter les pays visités régulièrement) : 83 prieurés dont 44 avec une école, 8 maisons de retraite, 15 écoles secondaires.

Si l'on considère tous les genres d'oppositions qui se sont levés contre cette œuvre, en particulier un zèle tout à fait étonnant de la part d'une hiérarchie qui hélas n'en montre en général que bien peu lorsqu'il s'agit du salut de ses ouailles, cette œuvre relève du prodige.

Mais notre consolation et notre action de grâce, nous la trouvons dans un autre miracle, miracle de la grâce qui coule abondamment du Saint Sacrifice de la Messe, cœur de l'Eglise et cœur de notre œuvre, miracle dont nous sommes les témoins tous les jours.

Ce n'est pas seulement une œuvre sacerdotale qui se développe en des circonstances difficiles, c'est toute une petite chrétienté qui prend forme, nourrie, soutenue à la source de grâces qu'est le saint Sacrifice de la Messe. Ce que Mgr Lefebvre décrivait dans son sermon de jubilé sacerdotal se réalise sous nos yeux : "là où la sainte Messe est célébrée se bâtissent les églises, apparaissent les familles chrétiennes, bientôt  l'école régie par les principes catholiques" ; déjà ici et là des œuvres caritatives pour le soulagement de la souffrance, pour le soutien et des personnes âgées surgissent et se développent : voilà la meilleure preuve que l'Eglise possède les réponses tout à fait adaptées aux problèmes de notre époque : Elle n'est pas du tout dépassée, ni en ce qui concerne la famille, la jeunesse, ni en ce qui concerne la société.

Sa foi, sa charité, sa morale exigeante, sont des principes immuables qui transcendent le temps et les circonstances dans lesquelles se déroule la vie humaine. Toujours valables, ils restent les seuls garants du vrai bonheur que l'on ne peut trouver qu'en trouvant Dieu, posséder qu'en possédant Dieu dans le Christ Jésus.
* * *
Cependant chers amis, le merveilleux épanouissement de cette œuvre de la tradition catholique qui dans les faits et dans ses fruits montre bien qu'elle est une œuvre de l'Eglise catholique romaine, ne doit pas nous faire oublier la situation de plus en plus dramatique dans laquelle nous vivons.

Dormir, c'est mourir !

Les avertissements de Notre Dame à Fatima sont toujours actuels :

« Priez, priez beaucoup et faites des sacrifices pour les pécheurs, parce que beaucoup d'âmes vont en enfer, parce qu'il n'y a personne qui prie et se sacrifie pour eux ». (15 août 1917).

Ne nous laissons pas abattre par la situation très préoccupante du monde et de l'Eglise. Certes, si les agissements des hommes au début du siècle ont valu les châtiments de deux guerres mondiales, nous ne pouvons douter que nous nous trouvons en face d'événements encore plus terribles, à proportion des offenses faites contre Dieu, contre Notre Seigneur Jésus-Christ. Mais qui sait si le Cœur miséricordieux de Jésus, si le Cœur douloureux et immaculé de Marie ne se laissera toucher par une véritable croisade de Messes, de rosaires, de pénitences, comme à d'autres heures parmi les plus sombres de l'histoire de l'Eglise [1] ?

Il nous faut avec beaucoup de générosité vivre d'une manière conforme à notre foi, à tout prix : dans la prière et la pénitence, avant tout dans un grand esprit de foi et dans l'accomplissement fidèle du devoir d'état [2]. Allons à l'essentiel, à Jésus par Marie, au Cœur sacré de notre Roi et Seigneur Jésus-Christ par la dévotion au Cœur Immaculé de Marie. La victoire est ici assurée pour qui aura été trouvé fidèle, fidèle en tout, fidèle jusqu'au bout.

Voici la victoire qui vainc le monde, notre foi. (Jn 5, 4)

A la fin mon Cœur Immaculé triomphera.

Menzingen, le 13 octobre 1994

Jour anniversaire de la dernière apparition à Fatima

+ Bernard Fellay
Supérieur général

[1] La Madone ne peut plus retenir le bras de son Fils aimé sur le monde, il faut faire pénitence. Si ils ne se corrigent pas, le châtiment viendra. Si les hommes savaient ce qu'est l'Eternité, ils feraient tout pour changer de vie. Les péchés qui portent le plus d'âmes en enfer sont les péchés de la chair. Il viendra certaines modes qui offenseront beaucoup Jésus. Les personnes qui servent Dieu ne doivent pas suivre la mode, l'Eglise n'a pas de mode, Jésus est toujours le même.

[2]
le Cœur sacré de Jésus veut qu'on fasse comprendre aux âmes que l'authentique pénitence qu'il veut et qu'il exige maintenant consiste avant tout dans le sacrifice que chacun doit s'imposer pour accomplir ses propres devoirs religieux et matériels (devoir d'état) (Soeur Lucie 4 mai 43).

18 juillet 1994

[AUDIO] [Mgr Williamson, fsspx] Conférence au Brémien

Mgr Williamson, fsspx - transcription partielle par GL - 18 juillet 1994

[téléchargeable ici]

[...] Savez-vous les évêques ne sont pas toujours intelligents?

Vous voulez sans doute des mots d'encouragement? Eh bien je peux vous dire ce que disait St-Pie X au cardinal Merry del Val: "Eminence, ça va mal!". Personnellement quand les choses vont mal je préfère qu'on me le dise! Ca me fait une bouffée d'oxygène quand quelqu'un me parle de ce qui est. Et quand on cherche à me noyer dans les "hé, hé, hé, héhhhh", j'ai mal! Or aujourd'hui ça va très mal! Et on a beau, à mon avis, je regrette, (Je ne sais pas si c'est la peine d'enregistrer des paroles pareilles, hein?), parce que ça va briser ma carrière, ça risque de  briser ma carrière! Bon, brisez ma carrière si vous voulez, j'y suis prêt, en tout cas, ça va mal, ça va mal dans le monde et dans l'Eglise! 
Et dans la Fraternité? Mmmmmm, là vous voyez comment je vais casser ma carrière, hein? Il serait gentil de dire, Ah nous ouvrons des maisons partout, nous construisons, nous allons dans d'autres pays, on a des vocations, tout le monde est beau, tout le monde est doux, tout le monde est jeune, tout le monde est gentil, tout le monde est enthousiasmé, on a des évêques, nanana..., ils sont gentils, hehehehe... Hum! (Silence)  

Pourquoi la Fraternité jouirait-elle de protections spéciales contre ces forces de jour en jour plus déchaînées qui ont emporté des milliers de prêtres et d'évêques excellents dans l'église officielle? Je pourrais vous en raconter, ce serait  très édifiant! C'est la réalité! Et la Fraternité, qu'est-ce qu'elle a pour s'opposer à ce déferlement, à ce déchaînement des démons? Et du monde de la chair et des démons? Qu'est-ce que la Fraternité a pour se protéger? Quelles sont ses qualités, quelles sont ses garanties? La jeunesse? Ouais! Elle est gentille la jeunesse, elle est belle, elle a les forces de la jeunesse, les forces physiques, mais l'expérience, l'âge, la sagesse des années, Mes très chers amis nous avons tous beaucoup profité de la Fraternité, elle a fait de grandes et de belles choses pour nous tous, certainement pour votre serviteur! Certainement, et j'espère que demain ou après-demain, tant qu'elle est la servante de la foi et de l'Eglise, je compterais bien donner ma vie pour la Fraternité! Mais à condition qu'elle reste fidèle! Et ça!?... La jeunesse, est gentille mais elle n'est pas toujours sage! Comment voulez-vous qu'elle le fût? - Avec  circonflexe je  signale pour les grammairiens français! J'ai pourtant un petit machin pour me faire entendre, je regrette si je ne me fais pas entendre! - Et c'est bien si je ne me fais pas entendre, d'ailleurs, parce que je ne dis pas des choses qui font avancer ma carrière!   

Mais pensons aux années, j'évoquais tout-à-l'heure,  aux années cinquante et soixante, l'Eglise catholique, l'Eglise qui était encore apparemment saine à ce moment-là, qui semblait se porter bien, qui semblait très forte, aux années cinquante, cette Eglise qui s'opposait sous Pie XII, héroïquement  au déferlement du monde moderne, suite à la Deuxième Guerre Mondiale, les intellectuels, en Angleterre en tout cas étaient prêts à reconnaître que le communisme était faux, et qu'il n'y avait que le catholicisme, il y avait beaucoup de conversions,  100 000 conversions par an, et pour les Anglais c'est quelque chose, 100 000 par an! Et aux Etats-Unis aussi beaucoup de conversions, le monde semblait être sur le point de baisser les armes et de se rendre à la vérité. Et qu'est-ce qui s'est passé aux années soixante? C'est exactement le contraire qui s'est passé! C'est la vérité qui a baissé les armes et c'est l'Eglise catholique qui s'est rendue au monde moderne avec Vatican II.  
Alors je vous donne un scenario, je ne dis pas qu'il va être comme cela, je dis seulement qu'il pourrait être comme cela. Aux années quatre-vingt dix la belle petite fraternité résiste héroïquement avec tous ses merveilleux petits abbés, résiste héroïquement aux défaillances et aux trahisons de l'Eglise officielle,  et... les conversions s'esquissent et les intellectuels commencent à se rendre compte que le Novus Ordo ne marche pas, que l'Eglise officielle est fausse,  et au moment même où toute l'Eglise officielle sera sur le point de baisser les armes, et de se rendre à la vérité, qu'est-ce que nous pourrions voir, je ne dis pas qu'est-ce que nous verrons. Mais qu'est-ce que nous pourrions voir? La Fraternité qui baisse les armes et qui se rend à l'Eglise officielle.  

Je ne dis pas qu'il sera comme ça, je dis seulement il pourrait être comme ça. On l'a déjà vu, pas seulement avec une toute petite Fraternité, mais toute l'Eglise officielle qui s'est effondrée. A plus forte raison, à combien plus forte raison une petite fraternité ne pourrait-elle pas se rendre? Qu'est-ce qui nous protège? Qu'est-ce qui nous garantit? Encore une considération, une considération noire, mes chers amis, mais que voulez-vous? Moi je préfère l'oxygène, aux gaz nocifs de l'optimisme, de la fantaisie. Les gens baignent aujourd'hui dans la fantaisie, partout, partout, partout. On s'est découpé du réel et tout le monde baigne dans l'irréel, se noie dans l'irréalité, dans la fantaisie et ce courant de la fantaisie et en s'éloignant de la réalité devient de plus en plus fort. Alors comment voulez-vous que de braves petits abbés tiennent tête à tout cela? Dieu aidant, oui!  
Si Dieu n'aide pas, alors, pensez à ceci: toute congrégation et société catholique, dans l'Eglise, autrefois, avait au-dessus d'elle, la Congrégation du Clergé, la Congrégation des religieux, je ne sais pas, et s'il y avait quelque chose qui allait mal dans une société,  jusqu'à y compris, une défaillance de la part de ses chefs, ce qui humainement n'est jamais exclu,  dans le temps il y avait toujours la possibilité de faire appel à Rome et Rome pouvait intervenir et récemment Rome est intervenue dans la Fraternité Saint-Pierre, je ne sais pas si vous le savez, mais à l'intérieur de la petite Fraternité Saint-Pierre, je ne sais pas si vous vous souvenez, c'est cette petite fraternité qui est venue à l'existence en 88, composée de prêtres qui ont quitté la Fraternité parce qu'ils n'étaient pas d'accord avec cette résistance à Rome de la part de la Fraternité, et ces prêtres ont constitué une autre petite société, Fraternité Saint-Pierre qui serait sous Rome, bon! Mais qui continuerait avec la bonne messe, donc on aurait le meilleur des mondes possibles, on aurait l'aval de Rome et on aurait la bonne messe! Bon très bien. Alors dans cette petite fraternité-là, qui a surgi à ce moment-là, qui était donc sous Rome, il y a deux ou trois ans, ils ont élu un supérieur général qui n'a pas plu à Rome et Rome est intervenue qui a évacué l'élu et l'a remplacé par l'ancien supérieur général qui jusqu'à ce jour continue d'y être. C'est un exemple tout simplement de la façon dont Rome peut intervenir. Bon dans ce cas-là, c'était pour le bien ou pour le mal, je ne sais pas.  

Dans le temps, évidemment c'était généralement pour le bien, aujourd'hui c'est généralement pour le mal, donc c'est mieux de ne pas être sous Rome, mais attention il y a un prix à payer et le prix à payer c'est qu'on n'a personne au-dessus de nous, il n'y a personne, notre conseil général, notre petit supérieur général c'est le plafond! Il n'y a rien au-dessus, c'est dangereux! En soi! Toutes choses étant égales, en soi c'est dangereux! Ce n'est pas normal. Il faut qu'il en soit ainsi parce que se mettre sous Rome aujourd'hui c'est, c'est  embrasser la trahison, alors nous ne pouvons pas nous mettre sous Rome, complètement d'accord, sous ces officiels de la Rome actuelle. Mais en ne nous mettant pas sous ... Il faut payer le prix que nous sommes livrés à nous-mêmes. Alors dans le temps on avait la sagesse de (probablement d'après ses fruits je crois qu'on peut dire la sagesse exceptionnelle de Mgr Lefebvre -sans faire du culte de la personnalité - mais on avait à notre disposition cette expérience. Il est mort dans les années 80, il a lancé la Fraternité dans les années soixante, il avait, attendez, 65 ans lorsque la FSSPX a été fondées, il avait 89 ans je crois lorsqu'il est mort, donc c'est les dernières 20 années de sa vie. Là il y a une grande expérience, n'est-ce pas? Combien de vieillards avons-nous avec nous maintenant, pas beaucoup, or si la vieillesse pouvait, si la jeunesse savait, dit le proverbe(?), si la vieillesse pouvait, si la jeunesse savait, combien est utile d'avoir d'anciennes têtes, et il ne suffit pas d'avoir les anciennes têtes, encore faut-il savoir les consulter§ Si on les a et qu'on ne sait pas les consulter à quoi cela sert? 

Quelques considération joyeuses mes amis, pour vous égayer ce mois de juillet étouffant de 1994. Mais en fin de compte pourquoi serions-nous épargnés? Bon, nous avons voulu essayer d'être fidèles, oui, d'accord! Nous avons fait de notre mieux, oui, et le Bon Dieu nous en saura gré, très certainement,  mais, il ne faut pas se faire des illusions, alors moi je ne veux pas que cela se casse et Dieu aidant, je ne ferai rien pour cela, mais disons seulement que si cela se casse, moi je ne serai pas surpris. A chaque jour suffit sa peine dit Notre Seigneur, donc à demain les peines de demain, nous n'avons pas besoin de les affronter aujourd'hui, mais quand même voyons clair et pour voir clair, il est inutile de se dire qu'on est brave, on qu'on est jeune, qu'on est énergique, on a eu des réussites, ça va continuer comme ça.  

Peut-être que cela continuera, mais ce n'est pas seulement parce qu'on jeune, brave et énergique, ça ne suffit pas. Encore faudra-t-il la sagesse ou une aide particulière divine, une aide de Dieu ou de la Sainte-Vierge, mais là il est tout-à-fait possible que le Bon Dieu maintienne en existence la Fraternité jusqu'au début du dénouement de cette crise, il est possible et même si on pense, que Dieu n'abandonnera jamais ses brebis et qu'il ne permettra pas que ses petits soient livrés au désespoir et si on pense que la Fraternité est nécessaire pour (???) le désespoir, alors là il est possible que le Bon Dieu maintienne la Fraternité, rien ne l'empêche de le faire. Rien ne l'empêche! Mais il n'est pas impossible par contre que la Fraternité suive le mouvement général et se laisse engouffrer pour que nous nous rendions compte combien nous sommes fragiles et combien peu nous pouvions faire de nous-mêmes. Et je ne dis pas que c'est le cas, mais si jamais c'était le cas, c'est dangereux, c'est l'orgueil, c'est la vanité, c'est la présomption, c'est dangereux.
 
L'Eglise officielle va à la dérive, toujours plus, (???) que je sache les cardinaux en réunion n'ont pas bronché à l'annonce d'une réunion des Juifs, des Chrétiens et des Musulmans, par contre il y a un cardinal de la République Tchèque qui a bronché, un bohémien, donc, lorsque le pape a proposé de battre la coulpe de l'Eglise catholique pour tous les siècles de son passé face aux autres religions, les pauvres, qui ont été tellement opprimées par l'Eglise catholique durant tous ces siècles. [...]

23 février 1994

[Abbé Franz Schmidberger, Supérieur général - FSSPX - Lettre aux Amis et Bienfaiteurs (n°46)] "Afin de vous donner un aperçu du développement de l’apostolat..."

SOURCE - Abbé Franz Schmidberger, Supérieur général - FSSPX - Lettre aux Amis et Bienfaiteurs (n°46) - 23 février 1994

Chers amis et bienfaiteurs,

Personne ne sait combien de temps nous pourrons travailler dans les pays de l’Europe de l’Est. D’une part, en effet, les anciens fonctionnaires sont toujours au pouvoir, même si c’est sous un nouveau drapeau ! D’autre part, le communisme célèbre son retour officiel par le moyen d’élections libres comme en Lituanie et en Pologne. Cependant, tant que les portes nous sont ouvertes et que les âmes nous appellent au secours, nous ne pouvons pas fermer notre cœur. La parole du Seigneur : « Je dois accomplir les œuvres de Celui qui m’a envoyé tant qu’il fait jour, parce qu’il y aura la nuit où personne ne peut plus œuvrer » (Jn.9, 4) ne vaut-elle pas justement pour cette situation ? Et c’est ainsi que, fin octobre 1993, nous avons organisé ce grand convoi de secours en faveur des catholiques nécessiteux du nord de l’Albanie qui sera, si Dieu le veut, le premier pas d’un travail apostolique parmi ces hommes trahis de tous côtés.

Afin de vous donner un aperçu du développement de l’apostolat dans les autres pays de la même région, voici quelques témoignages pris sur le vif. Et d’abord un extrait de la lettre d’un de nos Frères qui a accompagné les abbés Mura et Esposito durant les vacances de Noël dans leur voyage en Biélorussie.
6 janvier 1994 
Monsieur le Supérieur général. 
Permettez-moi de vous faire part de quelques pensées et impressions concernant le dernier voyage en Biélorussie. 
Le voyage s’est passé de façon tout à fait normale et il n’y a rien de spécial à mentionner… La providence a fait de telle sorte que les gens nous sont restés fidèles… Les retraitants de Pâques nous ont presque tous rencontrés, et plusieurs pour des entretiens personnels. C’était très important et c’est le signe d’une grande sincérité et fidélité. En outre, le chœur de Mlle T. a chanté pour la première fois une messe en grégorien, « la première messe grégorienne en Biélorussie ». Et il n’est pas exagéré de dire : « mieux qu’au séminaire ! » II faut ajouter que c’est la messe de Pâques que la chorale a commencé à apprendre, mais cela a certainement plu à l’Enfant-Jésus. 
E., l’un des baptisés de Pâques, a fait baptiser ses deux enfants ; sa femme suivra lors du prochain voyage. Professeur de musique, pianiste et maintenant catholique convaincu, il veut se charger de l’organisation des Exercices de Saint-Ignace. Nous n’avons qu’à indiquer le lieu et les dates, il amènera les gens. Un tel zèle et un tel dévouement seraient souhaitables chez nous, à l’Ouest. 
Les gens évidemment ont besoin de pratique, de catéchisme, etc., mais nous sommes là et ils comptent sur nous …. La grâce et la providence de Dieu sont vraiment divines ! … L’abbé Esposito a été très impressionné ; il doit maintenant se mettre à étudier le russe énergiquement, car il est absolument nécessaire de pouvoir s’exprimer de manière concrète et correcte. Les fidèles l’aiment bien… 
Peut-être ai-je été parfois trop catégorique dans mes affirmations mais vous comprenez, Monsieur le Supérieur général, ce que j’ai voulu dire. 
Votre tout dévoué, Frère Y.
Comme deuxième témoignage, la lettre d’un de nos confrères :
Jaidhof (Vienne), le 10 janvier 1994 
Monsieur le Supérieur général, 
Laudetur Jesus Christus ! 
Ces quelques lignes pour vous informer du séjour d’un groupe de fidèles de Z. qui est passé par Jaidhof les 7, 8 et 9 janvier. Le groupe était composé de M. N. qui est le chef du “prieuré de St Josaphat” de Z., d’un professeur d’Histoire de l’Eglise à l’université de Z., d’une étudiante en grec, d’un vice-recteur de collège et de son épouse, musicienne. Ils m’ont bien expliqué la situation religieuse dans leur pays. Elle est vraiment déplorable, non seulement parce qu’il n’y a presque pas de prêtres, mais surtout parce que la formation religieuse des prêtres elle-même est mauvaise et déficiente. Actuellement, leur pays est la proie des protestants et des orthodoxes, et le peu de clergé n’a évidemment pas le niveau pour affronter cette nouvelle vague d’hérésie après le communisme. 
Pour remédier à la crise du clergé, ils voudraient que nous coopérions avec eux dans la formation d’un séminaire pour de jeunes lévites (ils ont déjà près de dix vocations), qui pourrait être placé dans une belle propriété près de N. En fait, ils veulent que nous assurions ou la formation religieuse, ou même l’enseignement théologique ou philosophique de ces jeunes, qui ne trouvent pas de bons professeurs ni de bons séminaires. Ils ont aussi le soutien d’un évêque et de quelques prêtres. Ils n’ont demandé aucune sorte d’aide matérielle, ce qui est remarquable pour des gens de l’Est… 
J’ai invité le professeur d’université à venir nous visiter à Zaitzkofen ou à Ecône, pour lui faire connaître le fonctionnement de nos séminaires. Ils m’ont invité pour les prochains jours à Z. pour parler de la Fraternité aux étudiants et pour prendre plus de contacts.
Et voici un troisième témoignage, une lettre en provenance de l’un des Pays Baltes :
Jeudi, 20 janvier 1994 
Cher Monsieur l’abbé Schmidberger, 
Permettez-moi de me présenter moi-même. Mon nom est (…). J’écris cette lettre au nom d’un petit groupe de jeunes gens âgés pour la plupart entre 21 et 26 ans qui sont intéressés pour préserver la tradition catholique. Nous avons entendu beaucoup parler de vos activités et des activités du glorieux archevêque Marcel Lefebvre. La Fraternité Saint-Pie X accomplit un travail très important et nous aimerions y participer dans l’avenir. Je comprends tout à fait que vous soyez très occupé, M. l’abbé, vous devez l’être. Ici les fruits de Vatican II sont juste en train de devenir évidents : des tables au lieu d’autels, la sainte communion est donnée aux gens debout au lieu de l’être à genoux, etc. En général, les adeptes du modernisme sont moins forts ici qu’à l’Ouest, naturellement. Tout bien considéré, nous pensons qu’il n’est pas trop tôt pour chercher la possibilité d’avoir ici la messe de toujours, au début peut-être une fois par an. D’autre part, je dois admettre que fort peu nombreux sont ceux qui sont intéressés par la tradition pour l’instant (entre dix et quinze personnes), mais “le Christ a commencé avec douze ; aussi n’avons nous pas à avoir honte d’être si peu”, comme disait Mgr Lefebvre. J’espère donc que ce ne sera pas un obstacle. Pouvons-nous donc espérer la visite d’un prêtre de la tradition cette année à X. ? Si oui, que pouvons-nous faire pour rendre cette visite possible ? Je serais très reconnaissant de votre réponse. 
Que Dieu vous bénisse, M. l’abbé, et votre mission. Votre (…). 
Chers amis,

Le Chapitre général qui doit avoir lieu du 11 au 13 juillet à Ecône auprès du tombeau de Mgr Lefebvre, pour l’élection du Supérieur général et de ses deux Assistants, sera de la plus grande importance pour notre Fraternité et même pour toute la famille de la tradition. A la longue, nous devons réussir à remettre en vigueur à Rome et dans les évêchés la saine doctrine, le vrai saint Sacrifice de la messe et la juste attitude catholique envers le monde et ses erreurs. Les funestes congrès religieux qui mènent fatalement le clergé et le peuple fidèle à l’indifférence religieuse doivent trouver une fin. Au lieu de cela, il faut que les adeptes des fausses religions entendent un appel à la conversion et au baptême, que les hérétiques et les schismatiques reçoivent la monition d’avoir à rentrer dans le giron de la sainte Eglise.

La reconstruction commence avec des familles nombreuses, catholiques, saines qui se rassemblent autour des autels, qui vivent de la grâce du saint Sacrifice de la messe, qui transforment leur foyer en un petit sanctuaire où l’on adore Notre-Seigneur et où l’on invoque quotidiennement Sa très sainte Mère par le Rosaire ; d’où est banni tout ce qui est contraire à la vertu chrétienne, particulièrement cette source empoisonnée qu’est la télévision, et où à sa place règnent la charité, la joie, la paix, fruits du Saint-Esprit. C’est dans un tel milieu que croissent les personnalités chrétiennes viriles, que se développent des âmes ardentes et apostoliques ; plus d’affection maternelle à l’intérieur, plus de virilité masculine à l’extérieur : voilà ce dont on a besoin ! Il nous faut des pères et des mères catholiques, des hommes et des femmes catholiques.

Que ces pères de famille cherchent ensuite à remplir des fonctions dans la politique de la cité afin d’obtenir de Notre-Seigneur son retour sur son trône royal dans la vie publique après qu’il y sera revenu dans la famille.

Joignez-vous donc à notre neuvaine de prières du 2 au 10 juillet. Nous invitons aussi les fidèles de nos prieurés et chapelles à une journée de jeûne et d’abstinence dans la même intention le 9 juillet ; et que les malades offrent leurs souffrances et leurs douleurs, les mourants leur vie en union avec la Victime eucharistique pour la sauvegarde et la propagation de la foi, pour la fin de la destruction du lieu saint, pour la sanctification des prêtres qui, dans ce monde sans Dieu, plein d’immoralité et d’infidélité, sont exposés quotidiennement à mille dangers et aux pires tentations. « Nul n’a un amour plus grand que celui qui donne sa vie pour ses amis » dit le divin Maître (Jn 15, 13).

De notre côté, nous n’avons qu’un seul désir : que ce Chapitre général soit, dans sa préparation, dans son déroulement, dans ses décisions et leur application, un acte de la profonde adoration de Dieu Trinité, une glorification de Jésus-Christ, Souverain prêtre et Victime, Roi d’amour sur toute la société humaine ; qu’il soit à l’honneur de la très sainte Mère de Dieu, médiatrice de toutes les grâces, à la gloire de la sainte Eglise catholique et romaine une grande bénédiction pour les âmes.

Menzingen, le 23 février 1994, mercredi des Quatre-Temps de Carême.

Abbé Franz Schmidberger

Supérieur général